Quelques illustrations de la lignée des
depuis 1550 Flandres
L'Association des Lignages de
France (A.L.F.) a pour mission de rendre hommage aux lignages, y compris les
nouveaux,
en leur demandant de réaliser un thesaurus agnatique des porteurs du
nom dévoués au Bien Commun et un blason repris ou créé.
Le marquis de La
Roche-Lambert-Myons a apporté en 1922 ce blason dans sa généalogie Desurmont :
qu'il soit consensuel ou non, "vrai" ou "faux", ancien ou
fabriqué, l'A.L.F., en 2023,
sans dissimulation, le reprend pour apporter à
cette lignée l'oriflamme de son dévouement au Bien Commun.
Les sceaux de Guillaume et de Pierre,échevins
de la Seigneurie des Quesnes ont été conservés.
(Actes passés à Marcq-en-Baroeul, Wasquehal,
Lambersart).
Cette famille a
joué un rôle considérable dans l’industrie lainière, dans l’histoire de
Tourcoing et s’illustra par de nombreuses personnalités nationales.
Le 22 octobre
1508, les échevins de Gand écrivirent à l’archiduchesse Marguerite au sujet des
frères Mathieu et Jacques Masurel. Guilbert fit une donation à Saint Pierre de
Lille en 1610 ;
Marie Madeleine,
dame de la Noirière. et Saint Venant, épousa le 16 décembre 1658 René de Vos de
Steenwich, écuyer, conseiller en la chambre des comptes de Lille; Pierre
Masurel était chanoine de Tournai en 1660.
Jacques Prouvost(1670-1704, pierre tombale de
marbre près de l'autel Saint Nicolas de l'église de Wasquehal), épouse à
l'église Sainte Madeleine de Lille le 08-04-1698 Antoinette Masurel (1670-1730), fille de Noël
Masurel et Antoinette de Courchelle, elle même fille de Pierre de Courchelle et
Antoinette Prouvost: (dont Antoinette Prouvost épouse Noël Masurel dont le fils Jacobus Masurel fut jésuite et les deux filles
Antoinette qui épousa Jacques Prouvost-de Lespaul et Marie qui épousa
Joseph Roussel).
Bartholomé
Masurel fonda, le 17 juin 1610 , le
Mont de Piété de Lille dit municipal par opposition à celui d'Etat qui
s'installe ultérieurement rue du Lombard.
Rue Bartholomé Masurel à Lille
Lien de parenté de Barthémémy Masurel avec les Virnot et les Prouvost-Virnot
1850. Cloche provenant de l'église Notre-Dame de Tourcoing. Anno
Domini MDCCCL, ecclesiee Beatse Marise Angelorum Turcundii, dederunt me plures
parochiani, necnon generosiores quidam juvenes, quorum nomina sequuntur :
Franciscus DESBONETS, Paulus WATINE, Henricus MASUREL, Fidelis et Augustinus VANESLANDE,
Franciscus MASUREL,
Ludovicus et Emilius LEROUX, Achilles DESURMONT, Ludovicus Amandus FLIPO, et
quatuor fratres Edmundus, Léo, Henricus et Emilius LORTHIOIS. Fuerunt mihi
patrini Leo LORTHIOIS et Elisa MASUREL, ambo decem annos nati, a quibus vocata
sum Maria Leonia Elisa. La seconde cloche ne porte pas d'inscription.
Fixé a Tourcoing en la fin du XVI° siècle, la famille
Masurel était déjà à la fin du XVI° siècle d’importants filateurs et
négociants :
Lambert Masurel
épousa Marie Marlier,
dont Pasquier
Masurel {1595-1673) époux d'Antoinette de Le Tombe,
dont Pasquier
Masurel (1631-1722) marié (1660) a Marguerite Desrousseaux
dont Jean-Baptiste
Masurel (1675~1755) époux (1714) de
Marie Jeanne Delobel,
dont
Jean-Baptiste Masurel (1724-1793)
marié en 1757 a Marie Joseph-
Houzé, dont:
A La branche
ainée
1 Les François
Masurel :
François I Joseph Masurel 1766-1824 &1793
Angélique Joseph Desurmont 1761-1827
|
François II Joseph Masurel 1797-1851 &1822
Pauline Julienne Dervaux 1804-1847
|
François III Masurel 1826-1913
1851 Joséphine Catherine Pollet 1832-1868
|
François IV Masurel 1855-189'
& 1877 Eugénie Louise Jonglez 1857-1918
|
François V Paul Masurel 1878-1966 &1919
Jeanne Lussiez 1897-1985
|
François VI Masurel 1920 &1948
Solange Desurmont 1928-
|
François VII Masurel &
Christilla Marie Solange Perchot
|
François VIII Vincent Masurel
François-Joseph
I Masurel (1766-1824)
marié en 1793 a Angélique Desurmont,
dont
François-Joseph II Masurel-Dervaux (1797-1851),
fondateur de la maison Masurel et fils, marié en 1822 à Pauline Julienne Dervaux,
dont
François 1826-1913, Ernest
1829-1884, Paul Victor 1835-1892, Jules Paul 1841-1925, Paul Joseph 1842-1927 qui firent des
branches.Le petit fils d’Ernest-Joseph, Ernest, Emile MASUREL,1886 - Roubaix,1974
- Roubaix était propriétaire d'une
écurie de course
François Joseph III Masurel-Pollet (1826-1913)
Président
du tribunal de commerce de Tourcoing,
négociant en laines, associé de
la maison Masurel fils de Tourcoing. Il fut conseiller municipal de Tourcoing
membre de la chambre de commerce, administrateur de la succursale de la Banque
de France de Roubaix-Tourcoing,
président de la société de géographie de Tourcoing président du tribunal
de Commerce de Tourcoing. il habitait 83 rue de Lille, à Tourcoing. Il fonda,
avec ses trois fils , François, Edmond et Eugène, les pharaoniques usines François Masurel frères, fondées en 1876 et
construite à cet endroit en 1884 par le grand père d’Eugénie, François
Masurel-Pollet (1826-1913) avec ses 3 fils François, Edmond et Eugène. Elles
sont classées Monument Historique : 2000/05/21.
Il eut trois fils : François 1855-1894, Edmond 1857-1943, Eugène 1861
1 François Masurel-Jonglez (1855-1894),
conseiller
général du Nord, fonda en 1877, sous la firme François Masurel frères, une
filature et retorderie de laines qui, avec la perfection de son outillage et le
nombre de ses broches (65 000 en 1894) tenait le premier rang parmi les
industries françaises et avait ramené en France la fabrication des fils
d'Alsace. M. Masurel-Jonglez avait fondé dans ses deux établissements des rues
de Wailly et des Francs, comprenant en 1894 un millier d'ouvriers, fonda pour
son millier d’ouvriers des œuvres sociales : allocations aux jeunes
ménages et aux femmes en couche, encouragement à l’épargne, association de
secours mutuel et caisse de retraite, vice président de l’association des
filateurs de Roubaix, Tourcoing,
Fourmies et Reims, de
l’Association nationale de l’industrie lainière à Paris, président du comité lainier administrateur de
la caisse de liquidation de Roubaix-Tourcoing,
président de la commission centrale de statistique et administrateur du
lycée de Tourcoing
Dès 1889, la
maison Masurel-frères obtenait une médaille d’or à l’exposition de Paris
Commissaire général de la section française de l’exposition de Chicago
Vice-président de la caisse d’épargne de Tourcoing, Il fut président de l'Union des filateurs de
laines peignées de Tourcoing,
vice-président de l'association des filateurs de Roubaix,
Tourcoing, Fourmies et Reims et vice-président de l'Association nationale de
l'industrie lainières à Paris. En 1892, M. François Masurel-Jonglez fut élu
conseiller général du canton Nord de Tourcoing par 3404 voix contre 2720 à son
concurrent, M. Paul Lemaître. Il fut en outre : président de la Commission
centrale de la statistique et administrateur du lycée de Tourcoing. Il mourut à
Mouvaux le 14 juillet 1894. Sa mort fut un deuil public, tous comptaient sur
lui et espéraient en lui.
La famille Masurel a financé aussi la construction de l’école Saint-François de Mouvaux et de l’église Saint-François d’ Assise 1894-1895, financée par François Masurel pour remercier Dieu de l’avoir sauvé d’une grave maladie. Les travaux commencent en 1894, année de sa mort; l’église est consacrée le octobre 1895, dédiée à Saint François, en hommage au fondateur ; un descendant, Albert Masurel, fit don des grands orgues en 1901 à l’occasion du mariage de sa fille. La statue du christ donnant le bras à Saint François d’Assise est offerte à l’église par les employés et ouvriers des établissements François masurel ; une bombe en 1944 fait exploser les vitraux et des maisons devant.
« Les
établissements François Masurel Frères est une
société créée en
1877, sous le nom des Établissements François Masurel et
Fils, par François
Masurel Pollet et son fils François Masurel Jonglez.
A la fondation de la société en nom collectif, François Masurel Pollet
apporte un capital de 100.000 francs pour partie en bâtiments et terrains et pour
partie en espèces, son fils apportant « son temps et ses soins ». « En 1877, il
fonde avec ses fils une filature de laines qui, avec la perfection de son
outillage et le nombre de ses broches (80.000), tient le premier rang parmi les
industries françaises. Cette filature a permis de ramener en France la
fabrication des fils d’Alsace. » (Extrait du dossier de Légion d’honneur de
François Masurel Pollet) Mais des 1882, François Masurel Pollet laisse à ses
fils la direction de l’entreprise pour se consacrer à ses autres activités.
C’est à cette date qu’Edmond Masurel Baratte rejoint son frère. En 1887, le
troisième frère, Eugène Masurel Wattinne rentre à son tour dans l’entreprise
qui se développe très rapidement avec la construction en 1884 d’une grande
usine dans le quartier des Francs à Tourcoing. Située à côté de la gare des
Francs, l’approvisionnement en matières premières est facilité. Une bonneterie
et une teinturerie viennent compléter l’usine en 1890.
Les Etablissements François Masurel Frères : Après les décès
prématurés de François en 1894 et d’Eugène en 1902, Edmond reste seul à diriger
la société avant que son neveu Jacques, fils de François, le rejoigne. Jacques
Masurel Lepoutre, fils de François Masurel Jonglez, devient directeur des
Établissements François Masurel Frères en 1911. Les usines et ateliers comptent
plus de 1.000 ouvriers à la veille de la 1re guerre mondiale. La guerre
entraîne quasiment l’arrêt de l’entreprise et il faudra attendre 1923 pour
retrouver le niveau d’activité d’avant guerre.
Edmond Masurel Baratte réalise de nombreux voyages d’études aux États-Unis,
en Amérique du sud, au Brésil, Japon, Angleterre, Espagne, Suisse et Italie…
pour développer les exportations pour les Établissements François Masurel
Frères mais aussi pour toute l’industrie française de la filature de laines. Il
reçoit à ce titre la Légion d’honneur en 19282.
Entre les deux guerres, la société ouvre d’autres usines : une près
d’Elbeuf et une filature aux États-Unis à Wondsockett3.
En 1945, un nouvel atelier de bonneterie est construit sur les plans de
l'architecte Marcel Forest ainsi qu'une nouvelle chaufferie. Dans les années
soixante, les établissements François Masurel Frères fabriquent de la laine
peignée et de la laine d'angora. En 1995, la bonneterie est restructurée et
agrandie par l'architecte Patrice Cau.
De nos jours, l'usine, classée monument historique, dépend de la société
anonyme des Usines de la Blancheporte, société de vente par correspondance. »
Wikipedia
Mouvaux dans les albums de Croy ; la chapelle du Lazaro et l’église Saint-François d’ Assise à Mouvaux
fils de François Masurel ( 1855-1894) et Eugénie Jonglez
(famille Mathon Masurel) de 1906 à 1913,
Lettres par Lucie Hermance Masurel 1884-1917, fille de François Masurel 1855-1894 et Eugénie Louise Jonglez 1857-1918 et épouse de Paul Edouard Mathon 1882,
transmises par Stéphane Mathon :
«
Lettre de Mère (1857-1918)
Mouvaux, le 7 août 1906 Mon cher Francis, Je viens de recevoir ta
carte avec
ton adresse et avec plaisir j’y réponds pour te donner les
nouvelles que tu
demandes de toute la famille. Ninie va bien et elle en profite pour se
promener
tous les jours avec son mari qui a congés pour la fête des
fabricants. Le
Docteur Isbecque ayant conseillé beaucoup de distractions, on
suit scrupuleusement
un conseil aussi agréable. J’ai dîné hier
avec André et Marie avec G.M. Mathon,
Mrs Henry et Eugène Mathon et M.Maurice Lefebvre. Là,
tout le monde va bien
aussi. Jacques est rentré de Wimereux samedi et il
s’occupe de ce qui pourrait
lui être utile au Canada. Il est allé voir Mr Macke pour
lui demander s’il
pourrait aller dans la ferme de ses parents pour s’y mettre au
courant des différents
travaux de la ferme. Mr Macke a écrit chez lui et on attend la
réponse. Jean et
Robert rentrent ce soir à 8 heures. M. Flament a une fille
depuis avant-hier,
elle est née lundi après-midi. Ton cheval Maïna va
bien, celui de Jacques
aussi, on commence à mettre ce dernier en pâture depuis
hier. Le marchand de
bestiaux est venu reprendre deux bêtes. Carlo et Suppy sortent
tous les jours
avec nous. Isaïe est revenu au travail ce matin. Bon-papa Jonglez
souffre
toujours de la tête et il a pris un avis de Mr Brunet lundi. Mr
Brunet dit que
ce n’est rien et avec quelques drogues lui conseille du repos et
du calme.
Bon-papa a donc décidé de ne pas sortir pendant une
quinzaine de jours, même
pour les dîners du jeudi. Voilà toutes les nouvelles ; il
fait très chaud ici
et je reste bien volontiers à Mouvaux ! Je te souhaite un bon
séjour à Spa et
j’attends une lettre me donnant des détails. Je
t’embrasse bien affectueusement.
E. Masurel-Jonglez Lettre de Mère (1857-1918) Mouvaux, le 11
août 1906 Mon cher
Francis, J’ai reçu ta lettre ce matin, elle s’est
croisée avec la mienne.
Bon-papa Jonglez va mieux. Mr Brunet a été satisfait de
sa visite de ce matin
et je crois qu’il est maintenant en bonne voie de
guérison. Mon oncle Paul
Jonglez est revenu de Berck hier soir, mais il va retourner
aujourd’hui, il
était plus tranquille de venir voir par lui-même ce qui en
était. Nous
renonçons complètement au voyage de Suisse, si bon-papa
va tout à fait bien
nous irons plutôt passer quelques jours à la mer à
la fin d’août pendant que
Zoé sera à Lourdes et Elodie à son village.
J’ai de bonnes nouvelles de
bon-papa François qui s’amuse très bien, il rentre
le 16 août. Mon oncle Edmond
est venu dîner jeudi avec son fils ; la question du Canada a
été attaquée
pendant le dîner et après. J’étais fort
heureuse de me sentir entourée et
appuyée par tous mes enfants. Eugénie a été
prise à partie aussi après le dîner
; puis c’était mon tour toute seule. J’ai dit ce que
je pensais, avec calme,
quoique dans mon for intérieur j’étais en
ébullition. Enfin, c’est une question
vidée, on n’en parlera plus. J’ai été
abreuvée de conseils. Le dernier a été
celui-ci : « Qu’est-ce que tu vas faire de tes enfants
jusqu’au moment du
départ ? A ta place je les mettrai quelques mois à
l’école industrielle ?... »
Cela se passe de commentaires. Jacques cherche à se placer dans
une ferme et
pour Jean je crois qu’un séjour en Angleterre serait plus
utile pour lui car
l’anglais lui rendra beaucoup de services au Canada, plus que les
études
industrielles. Au revoir, mon cher François, je t’embrasse
bien affectueusement,
amitiés de tous. Ta Mère qui t’aime. E.M. Lettre de
Mère (1857-1918) Mouvaux, le
15 octobre 1906 Mon cher Francis, Bon-papa François est
décoré de la Légion
d’Honneur, la nouvelle en est a paru à l’Officiel
samedi. Depuis ce ne sont que
cartes et visites de félicitations qui arrivent chez bon-papa.
Les ouvriers de
la filature lui ont adressé leurs félicitations samedi
soir et lui ont offert
un bouquet ! Dans le Journal Officiel on donnait le nom de Mr Masurel,
filateur
de laine, sans prénom, de sorte qu’Edmond a reçu
aussi un certain nombre de
félicitations. Edmond fils est parti hier pour quelques mois
à Mulhouse, après
ce séjour il fait un grand voyage dans l’Amérique du sud et l’Australie.
Bon-papa trouve qu’il ferait mieux de se marier. J’ai d’assez bonnes nouvelles
de Ninie, le Docteur est content de ses progrès mais désire la garder encore
jusque fin novembre, elle ne verra donc pas ses frères et beaux- frères avant
leur départ. Il est décidé que nos 4 voyageurs Canadiens partent d’ici le mardi
30, ils passeront le 31 à Londres et ils partiront le 1er à 10 heures du matin
pour arriver à Liverpool à 4 heures, le bateau partant à 5 heures. J’ai reçu ce
matin une lettre de François le peintre qui est au Canada, il y est très
heureux, me donne quelques renseignements et serait fort content de voir des
gens du pays, ce qui lui arrive très rarement. Mr Philippe a une fille depuis
hier, tout va bien. Tes chevaux vont bien mais Top Gun continue à tousser, on
le promène toujours au pas. Au revoir, mon cher Francis, je t’embrasse bien
affectueusement. Tous tes frères et soeurs se joignent à moi. Ta Mère qui
t’aime E.M. Lettre de Jacques (1888-1951) et Jean (1890-1917) Masurel St
Alexandre de Gatineau Le 5 janvier 1907 Mon cher François, Nous avons bien reçu
ta lettre datée du 11/12, mais comme nous étions partis à Montréal passer les
fêtes de Noël et du Nouvel An, nous ne l’avons trouvée ici qu’à notre retour,
ce qui te fera comprendre aisément pourquoi la réponse s’est faite un peu
attendre. Elle nous a fait grand plaisir, je l’ai lue plusieurs fois afin de
bien retenir les bons conseils que tu nous donnes sur la question « business ».
Nous avons passé un séjour très agréable à Montréal avec Paul et les de St Laon
qui ont une petite fille de 11 ans, qu’en riant nous avons mariée à Robert,
enfin il n’y a rien d’impossible pour qu’un jour ce soit sérieux.
Naturellement, le principal sujet de conversation fut le Teminscamingue, car tu
n’ignores certainement pas que les Mathon et de St Laon sont presque décidés à
aller s’y installer à moins que le voyage en France d’André ne vienne changer
leurs projets. Quant à nous, nous sommes bien décidés sur ce que nous allons
faire, débuter avec agriculture et élevage, et quand nous aurons passé un
moment comme cela, nous ferons selon les besoins et la situation du pays une
industrie quelconque afin de nous enrichir car il faut tout de même un peu
d’ambition. Quant à l’endroit où nous allons nous établir nous n ‘en savons
rien, car nous ne voulons pas faire comme André et Paul, décider sans rien
avoir vu. On dit ici beaucoup de mal de l’Ouest et si tout ce qu’on dit est
vrai ce n’est certes pas le pays rêvé que l’on pensait, enfin je crois que le
plus sage serait d’aller voir par nous même de cette façon plus tard nous
n’aurons rien à nous reprocher. Comme la distance qui nous sépare est assez
grande, je pense qu’il serait bon de fixer sous peu une date pour ton départ
pour la Canada. Je me suis informé de la fonte des neiges et voici ce que m’a
dit le vacher qui a été 10 ans dans l’Ouest. « Pour le 10 mars, il n’y a plus
de neige du tout », quant à la province de Québec et l’Ontario, cela varie du
15 mars au 15 avril, mais je crois que cette année elle sera vite fondue car
les pluies que nous avons eu ces jours-ci en ont déjà fait disparaître une
partie. Donc, pour le bien, il faudrait que tu sois ici les premiers jours de
mars, nous partirons tout de suite dans l’Ouest et peut-être nous aurons la
chance de le voir avec encore un peu de neige. Je dis la chance car je trouve
qu’il ne faut pas se contenter de voir un pays sous son bel aspect, mais il
faut voir aussi le mauvais côté, vu qu’au printemps la campagne dans n’importe
quel pays est toujours ravissante, tandis que l’hiver nous apporte souvent bien
des déceptions. Ici dans Québec et l’Ontario il n’est pas bien dur car il fait
rarement du vent. Tandis que dans l’Ouest, il en fait paraît-il... Pour la
ferme sont nous t’avons parlé, Mr Leseleuc nous fera savoir si le vendeur se
résigne à baisser son prix qui est maintenant 55 000 payable comptant. Nous
avons toujours le plan cadastral de sa propriété, ce qu’il ignore complètement.
II a exactement 279 acres (1) estimées par le gouvernement 42 000 frs, comme
c’est un homme assez calme, je suis à peu près certain que sa ferme sera encore
à vendre au printemps. En attendant la lettre qui nous annoncera la date de ton
départ, je t’envoie, mon cher François, la meilleure des poignées de main. Ton
Frère qui t’aime Jacques (1) environ 110 hectares Mon cher Francis, Je ne
voudrais pas laisser partir la lettre de Jacques sans y joindre un petit mot.
Je suis tout à fait de son avis et en cela du vôtre également, qu’il faut voir
par soi-même avant de se décider. C’est pourquoi il faut que nous allions voir
l’Ouest au printemps. Lorsque tu viendras nous pourrons alors discuter les pour
et les contre de chaque chose sans se presser, nous n’avons donc pas à en
parler maintenant. Je commence à savoir traire, car comme Mère a du te le dire,
je suis pour le moment à la vacherie. Je soigne également les chiens et les
lapins, et je soigne les premiers avec d’autant plus de goût que les deux
jeunes, encore à la mère, sont à nous ; le frère qui s’en occupait nous en a
fait cadeau. Ce sont de beaux grands chiens se rapprochant un peu des chiens
bergers de chez nous, mais plus grands. J’espère que tes chevaux vont toujours
bien ainsi que tes chiens. Jules doit avoir un peu plus d’ouvrage maintenant
qu’Isaïe n’est plus là. En te remerciant de ta bonne lettre, reçois mon cher
François, la meilleure des poignées de main de... ...Ton frère qui t’aime Jean
Lettre de Mère (1857-1918) Mouvaux le 21 janvier 1907 Mon cher Francis,
J’attends ce soir Charles et Ninie qui reviennent pour quelques jours afin de
dire au revoir à Marie et Lucy. J’irai à leur rencontre à Lille, ils vont
souper chez Mme Prouvost et y loger. Demain Ninie va assister à la toilette de
mariée de son amie Hélène Flipo et viendra ensuite avec son mari dîner ici avec
les Mathon. Mr et Mme Emile Masurel ont perdu une petite fille de 9 ans, leur
dernière, d’une jaunisse infectieuse, l’enterrement a eu lieu samedi. Mr le
Curé est venu me montrer une lettre de Rome, l’affaire passera samedi et
l’avocat est certain du succès. Il y a une carte postale arrivée de Waereghem
le 18 février disant ceci : « Je crois bien faire en vous informant que
personne de chez Colle n’est encore venu pour prendre le cheval - E. Waegebaert
» Je t’envoie ci-joint la lettre de Jacques et de Jean, j’en ai reçu deux aussi
pour ma part. Rien de nouveau ici, nous avons eu hier un temps idéal ; comme il
n’y avait pas de dîner de famille j’en ai profité pour aller avec Suzanne à
Néchin faire ma visite de l’an à Germaine Jonglez. Nous avons pu nous promener
toute l’après-midi dans le jardin du couvent, on aurait dit une journée de
printemps. Elodie va à Tourcoing, je vais lui remettre ma lettre pour la poster
au bureau afin d’y mettre l’adresse. Je t’embrasse bien affectueusement. Ta
Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Paul Mathon-Masurel
Montréal, ce 25 février 1907 Mon cher François, J'ai bien tardé à répondre à ta
lettre, ne crois pas cependant que c'est parce qu'elle ne m'a pas fait plaisir.
Au contraire, j'ai été très heureusement surpris et te remercie vivement pour
tes bons souhaits. Depuis le départ d'André, ma vie a été assez occupée.
D'abord par le venue de petits à Montréal et ensuite par tout ce dont j'ai eu à
m'occuper. Tu dois savoir que j'ai décidé de nous fixer à Montréal. En étudiant
bien les chances de réussite, la multiplicité d'affaires qui se présentaient et
aussi le gros intérêt d'argent, je me suis dit que tout de même pour nous il
devait y avoir ici plus à faire que dans les champs. Nous trouverons du reste
facilement, je crois, à nous caser. Un de nos nouveaux amis, en France actuellement,
va tâcher de créer plusieurs affaires. Je pense bien que nous arriverons bien à
un résultat. Jacques m'écrit aujourd'hui qu'il est en correspondance pour
savoir si tu ne pourrais pas arriver aussi par "La Provence", fin du
mois prochain. Le voyage serait beaucoup plus agréable ainsi en famille. Quant
à nos jeunes fermiers, ils sont toujours enthousiastes de leur vie rurale. Que
cela dure puisqu'ils sont heureux. Tu me dis que tu t'occupes activement de la
vente de la propriété de Mère. Je la verrai avec grand plaisir débarrassée de
cette propriété et j'espère que, dés qu'elle le pourra, elle enverra dans ce
pays son argent disponible. Lorsque tu seras ici, tu verras par toi-même les
raisons qui plaident en faveur de l'émigration en ce pays des capitaux français
et qu'alors tu pourras conseiller à Mère de transporter ici tous ses fonds.
Quel avantage de laisser son capital dans une affaire pour en tirer 5% lorsque
les maisons rapportent 10 à 12% et acquièrent une plus value annuelle en raison
du développement croissant de la ville. Et combien d'autres choses du même jeu.
Les compagnies de toutes sortes suivent la même croissance. C'est le moment
d'entrer dans ce pays pour les capitaux étrangers. Tu me disais que Mère avait
presque décidé son départ. Lucy ne m'en dit rien, y aurait-elle renoncé?
L'a-t-elle remis a plus tard et attend-t-elle que ses fils soient installés? La
vie Montréalaise n'a rien d'extraordinaire, elle est bien monotone et province.
Malgré cela on y parle français et cela a un certain charme, mais le caractère
du pays est bien différent de celui des Yankees. On a conservé le calme français,
on ne se lance pas à corps perdu dans la mêlée. On est moins
"bluffer" qu'aux Etats. Enfin le temps se passe et voilà comment dans
un mois je serai installé dans cette même ville avec Lucy et mes enfants. Je
suis bien heureux de les voir arriver, car c'est bien ennuyeux d'être ainsi
toujours en correspondance lointaine et de ne jamais savoir à 15 jours près ce
que l'on pense, ce que l'on complote de l'autre côté de l'Atlantique. Malgré
cela, quand on pense à la France, on s'imagine que c'est tout près d'ici, ça
n'a l'air de rien de s'embarquer pour y retourner. Je suppose que c'est l'air
du pays qui nous produit cet effet. Nous avons eu depuis quelques jours pas mal
de froid et de tempêtes. Les gens de l'ouest sont absolument gelés. Ils n'ont
plus de charbon et presqu'impossibilité de leur en apporter, la neige bloquant
les voies. Les charmes de l'ouest... Allons, au revoir mon cher François, merci
encore de tes souhaits, je te fais aussi les miens bien qu'un peu tardifs. Embrasse
Mère pour moi, je te prie. Quant à toi reçois la meilleure poignée de main...
...de ton beau-frère Paul Mathon Amitiés à Suzanne. ----ooooOOOOoooo---- Lettre
d’Edmond Masurel (1857-1943) Tourcoing, le 24.4.1907 Mon cher François, Ma
lettre te trouvera probablement au milieu de la famille au grand complet. Ta
Mère doit être bien heureuse. Dis lui que ta tante et moi nous pensons bien
souvent à elle et à vous tous. Bon-papa vient de passer une petite crise qui
n'a pas été sans nous donner un peu d'inquiétude. Le coeur fonctionnait mal ;
ses idées étaient plus sombres que d'habitude. Il s'est installé chez ta tante
Joséphine pour être plus près du docteur. Il a même désiré voir le confesseur.
Mais depuis deux jours il va mieux et il a quitté la chambre. Toute inquiétude
a donc cessé. Ton cousin Jules Masurel vogue maintenant dans un lac d'azur sur
la côte du même nom. J'ai vu les cadeaux qui à eux seuls valent une jolie dot.
Les grèves se multiplient. Elles commencent à entamer les filatures par le
corps des bacleurs. Nous sommes convoqués par le consortium demain. Les tramways,
les menuisiers et les tireurs de cordes sont en grève depuis quelques semaines,
sauf ces derniers qui commencent seulement. Le discours de Mr Dron à ses
électeurs, constatant que l'insécurité de l'industrie entrave tout projet de
construction est tout à fait de circonstance. L'horizon n'est pas clair et, si
même le terrain des Francs nous échoit, nous réfléchirons encore avant de le
couvrir. Mr Marescaux ne nous a pas encore revus depuis que nous lui avons confirmé
l'offre de 5 francs net. J'ai eu ce matin la visite de Mr Cuningham que tu
connais. Il n'a rien traité et dit qu'il ne traitera rien avant septembre. Les
ordres n'affluent plus autant depuis 8 jours, et le voyage de Mr Devillers en
Suisse et à Mulhouse n'a pas produit tout ce qu'il espérait: 15 à 20.000 Kilo
de chaîne simple au plus.
Notre stock est d'ailleurs épuisé, et nous n'avons
rien à craindre de la baisse, sauf les difficultés
inhérentes à toute période
de baisse. Le gazage marche toujours fort. Donne nous des nouvelles de
l'installation de tes soeurs et de l'entreprise de tes
beaux-frères. Le moment
de l'exécution est arrivé et la saison s'y prête,
je l'espère. Dis leur les
voeux que je forme pour leur réussite et présente leur
mon plus affectueux
souvenir, en particulier à ta Mère. Bien Cordialement Ed.
Masurel P.S. Zoé a
déposé la clef de la caisse au bureau. A.Duterte
t'écrira sous peu. Il
m'annonce que la grève est imminente pour les filatures.
----ooooOOOOoooo----
Lettre de Mère (1857-1918) PLACE VIGER HOTEL Samedi 11 mai 1907
MONTREAL Mon
cher Francis, Je suis sans nouvelle de Ville Marie depuis 8 jours,
j’espère que
le courrier de ce soir m’apportera une lettre me disant ce que tu
as décidé
pour tes frères et répondant à mes questions. Je
me suis occupée de voir des
meubles mais pour terminer j’attends ta réponse. Paul a
reçu 2 lettres d’André
depuis quelques jours et je suis étonnée de ne rien
recevoir, d’autant plus
qu’André ne dit rien de vos décisions. Quant
à lui , il dit ce matin dans une
lettre à Paul, qu’il est ennuyé de prendre des
décisions mais qu’il le faut,
sans dire la raison qui le force à agir sans son associé
dans une décision
aussi importante. Paul en est très ennuyé et, si tu as
quelque influence sur
André, tâche de le faire patienter, nous ne pouvons plus
tarder beaucoup à
arriver ! Pourquoi cette presse subite, quand il était bien
convenu que rien ne
serait décidé sans Paul et avant son arrivée? Que
se passe-t-il donc ? Les
lettres d’André ne nous renseignent guère. Ici nous
passons notre temps le plus
agréablement possible, on va dans les magasins, on rend des
visites, Mr et Mme
des Etangs sont charmants et nous les avons vu plusieurs fois ; nous
voyons
aussi Mr et Mme Daoust, les Chilaudeau... Hier soir nous étions
à peine couchées,
Suzanne et moi que nous entendons les pompiers passer à grande
vitesse sous nos
fenêtres, l’incendie se voyait parfaitement,
c’étaient les abattoirs du
quartier de l’Est, bâtiment à plusieurs
étages et très important avec glacières
etc... Cela a duré longtemps et il y a pour 500 000 frs de
dégâts ! C’est la
semaine du concours hippique, cela t’aurait beaucoup
intéressé, c’est dommage
que tu aies été bloqué là-bas, c’est
le dernier jour aujourd’hui, il y a
concours 4 jours et même le soir à 8 heures, c’est
le moment le plus select où
les Canadiennes et les Anglaises exhibent leurs plus jolies toilettes
décolletées. Dans la journée on y va en tailleur.
Mr des Etangs dit qu’il y a
des chevaux sauteurs extraordinaires qui ont le record du saut en
hauteur, mais
si les chevaux sont bons, il paraît que la
généralité des cavaliers ne montent
pas bien. Il est 6 heures, je suis obligée de fermer ma lettre
sans avoir reçu
de courrier, je t’ai télégraphié dans la
journée, car j’ai besoin d’être fixée
pour l’achat des meubles.. Il fait très froid,
aujourd’hui, cela va encore nous
retarder probablement ; enfin nous attendons pour nous mettre en route
que vous
nous télégraphiez d’arriver. Au revoir, mon cher
Francis, je t’embrasse ainsi
que tous mes enfants et petits enfants bien affectueusement en vous
disant à
bientôt je l’espère ? Meilleures amitiés de
Paul, Lucy et Suzanne. Ta Mère qui
t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère
(1857-1918) BAY VIEW HOTEL
Ville-Marie le 26 mai 1907 H.Landréville, Propriétaire
Mon cher Francis, J’ai
reçu ta lettre d’avant ton embarquement et j’ai
communiqué à André et Paul les
passages qui les intéressaient. Ils suivaient déjà
à la lettre les
recommandations de Mr Tobias. A 7 heures chaque jour ils sont au
magasin jusque
10 heures du soir et se remplacent pour les repas afin qu’il y
ait toujours
l’un d’eux au magasin. André essaie en ce moment
(c’est dimanche) un cheval que
Landréville a ramené de Joliette, il est allé
jusque la ferme avec Marie et
Paul ; Il voudrait un cheval pour conduire les marchandises, le
camionnage
coûte cher et il croit qu’il aurait vite regagné la dépense du cheval. Les
garçons ont eu leurs chevaux gris pour 900 piastres. Le marchand qui voulait repartir
est allé les trouver pour leur laisser au prix qu’ils avaient proposé. Ils sont
enchantés de leur acquisition. Je vais maintenant passer mes journées à la
ferme, avec l’une ou l’autre de mes filles et nous faisons la popote ; Je
n’aime pas prendre un bonne ici avec mes 3 garçons et j’avais pensé à une combinaison
qui me semble bonne. Eloi avait semblé être amateur d’aller au Canada, s’il
voulait venir il pourrait être très utile. C’est un garçon de bonne composition
qui mettrait la main à tout et s’occuperait du potager. Ici il faut payer un
piastre et demie un jardinier à la journée et encore il ne peut pas me
promettre de venir faire mon potager. On paierait le voyage à Eloi et on lui
donnerait 1200 frs par an logé, nourri et blanchi. Si Eloi n’aime pas venir tu
trouverais peut-être un bon et brave garçon du même genre, tout à fait recommandable.
Il faudrait l’avoir tout de suite. Il partirait d’Anvers à Montréal en 2de
classe. De Montréal à Mattawa et Témiscamingue. Tu pourrais le conduire et
l’embarquer à Anvers et t’informer sur le bateau s’il y a quelqu’un qui suit la
même ligne pour s’en occuper. Il faudrait lui donner son itinéraire écrit. Je
vais m’informer ici aussi, si je trouve je te télégraphierai. Jules et sa femme
feraient bien affaire si je devais rester, mais pour le moment un homme
suffira. Marie et Lucy ont des ennuis de bonne. Alice a dû être débauchée à
Montréal et elle a entraîné Julienne. Elles ont prévenu toutes les deux sans
même donner la raison, elles ont dit qu’elles allaient à Montréal, elles
partent jeudi. Marie et Lucy cherchent à les remplacer, mais plus par des
Françaises. Marie va demander à Gestie de lui procurer une Irlandaise et Lucy a
écrit à Mme Daoust pour lui demander sa cuisinière puisque Mme Daoust s’en va.
Ici à l’hôtel on peut se passer de bonne un moment, ces dames s’occuperont de
leurs enfants en attendant d’avoir quelqu’un. Nous avons eu quelques bonnes
journées chaudes, les routes sont complètement séchées. Les garçons ont presque
terminé leurs labours. On sèmera cette semaine, je crois. Robert a terminé le
nettoyage de l’étable à cochons et des granges, tout commence à se rapproprier,
les bêtes sont bien soignées et ont déjà gagné. Un peu à la fois tout
s’arrangera. Cette propriété est vraiment superbe, je crois que tu as fait là
une bonne acquisition. Fais des compliments de ma part aux bonnes et donne leur
de mes nouvelles, je leur écrirai par un prochain courrier. Des compliments à
Jules, Henri, Eloi, etc.. Si Eloi vient au Canada, il faudra le remplacer, fais
pour le mieux, arrange cela avec Henri. Je t’embrasse bien affectueusement. Ta
Mère qui t’aime E.M. Affectueux souvenir de tous. ----ooooOOOOoooo---- Lettre
de Mère (1857-1918) BAY VIEW HOTEL Ville-Marie le 2 juin 1907 H.Landréville,
Propriétaire Mon cher Francis, Rien de neuf depuis 8 jours, sauf le départ des
2 bonnes de Marie et Lucy. Alice, la bonne de Lucy, a été débauchée à Montréal,
à l’hôtel Viger, pour le service d’un docteur célibataire qui cherchait une
cuisinière et une femme de chambre. Elle nous a accompagnés à Ville-Marie pour
débaucher Julienne qui était fort contente avant son arrivée, mais s’est
laissée gagner par l’appât de 125 frs par mois et une liberté plus garnde.
Elles ont donc cherché à se faire prévenir par leur malhonnêteté et leur
grossièreté, mais comme elles n’y sont pas parvenues elles ont prévenu et ont
dû ainsi donner un dédit de 100 frs comme c’était stipulé dans le contrat. Elle
ont prévenu sans donner de raison et on ne l’a su qu’indirectement. Avec cet
exemple nous ferons bien, si Eloi se décide à venir, de lui demander un
engagement d’un an et de lui augmenter son gage au bout d’un an ; la 1ère année
nous coûtant le voyage en plus ! A la ferme on travaille activement, le beau
temps est enfin venu, demain on va commencer les semailles. Tous les labours
sont finis. La jument n’a pas encore pouliné. Le vieux cheval qui boitait va
mieux, il a repris son service
hier. Les étables, granges... sont bien en
ordre. Les bêtes vont pouvoir bientôt rester tout le temps
dehors. On a proposé
hier à Jacques 4 boeufs à engraisser pour 85 piastres,
c’est le fermier Alice
qui habite un peu au dessus de chez eux et qui vient de vendre sa
ferme. J’ai
dit à Jacques d’aller demander conseil pour le prix
à Riopel son voisin. Cela
ne me semble pas cher, et on les mettrait dans le bois
jusqu’à la fin de l’été.
Est-ce qu’Eloi va se décider ? Dis le moi dés que
tu le sauras. Les de St Laon
sont en mer, ils ont dû s’embarquer hier et nous arriveront
dans une dizaine de
jours. Ce sera encore un élément de plus dans la petite
colonie française. Nous
allons partit sitôt le dîner tous ensemble au lac
Laferrière ; les messieurs
vont pêcher, je ne sais pas si je serai rentrés à
temps pour écrire à Ninie,
veux-tu lui communiquer ma lettre, en attendant. Je t’embrasse
bien affectueusement,
mon cher Francis, compliments à Zopé, Elodie, Jule,
Henri, etc... Je compte sur
toi pour voir un peu à tout en mon absence, il doit y avoir
excès de légumes,
oeufs, etc... les oeufs pourraient être conservés si Ninie
ne les prend plus
étant à Reckem et les légumes offerts à
Bon-papa François, Mr le Curé, l’école,
etc... Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre
de Mère (1857-1918)
BAY VIEW HOTEL Ville-Marie, Dimanche 9 juin 1907 H.Landréville,
Propriétaire
Mon cher Francis, Nous avons encore eu cette semaine quelques jours de
mauvais
temps, pluie et froid, qui ont arrêté les travaux de
culture et m’ont empêché
d’aller à la ferme, les chemins étaient
détrempés et transformés en marais de
boue. Depuis 2 jours le beau temps est revenu et tout sèche
comme par enchantement,
hier Jacques est venu me chercher, j’ai trouvé du
changement à la ferme après
ces quelques jours. Ils avaient profité du mauvais temps pour
travailler aux
clôtures qui sont très avancées. Tous les poteaux
sont placés et les fils
tendus sur plus de la moitié. Jacques était allé
abattre des bouleaux dans le
bois pour mettre une traverse de bois en haut des piquets (il a fait
sortir un
chevreuil en traversant le bois) ; de cette façon les
bêtes voient bien la
clôture et n’iront pas se prendre dans les fils de fer.
Demain ils vont
continuer à semer leur avoine, ensuite les pommes de terre ;
dans la maison
toutes les chambres sont finies, chacun a choisi sa nuance : Jacques en
bleu,
Jean rose, Robert gris blanc et moi blanc. On peint maintenant les
vestibules et
la cage d’escalier ; je les fais peindre en ton gris pierre, un
peu clair. Pas
de meuble encore d’arrivés, mais comme André a
reçu des lits pour son magasin,
je lui en ai pris deux plus celui de Mr Tobias qu’il a
recédé à André et au
moins les enfants peuvent se coucher dans un lit et ne sont plus
piqués des
fourmis, comme ils l’étaient en se couchant sur la paille
dans la cuisine. On
attend la naissance du poulain d’un jour à l’autre.
Il y a 25 poussins sur 2
couvées, la 3ème a été manquée, la
poule a quitté un moment ses oeufs. Mr
Landréville recommence à boire, c’était
à craindre avec son bar, voilà la 3ème
fois depuis 15 jours et cette fois-ci il y a 3 jours que cela dure ; il
a la
boisson aimable, il propose à Marie de la promener en voiture,
il caresse les
enfants, joue avec eux, etc... Monsieur Gaudet prend sa pension ici et
s’en
donne aussi, mais lui, on n’y voit rien. Il y a bien du monde
maintenant ici,
des commis-voyageurs, des prospecteurs, etc..., tous gens
d’affaires ; le bar
est très couru et le soir on y boit et on y rit
jusqu’à minuit ou 1 heure du
matin. Tout ce monde est convenable heureusement et ne gêne pas
les habitants
de l’hôtel. André et Paul sont toujours bien
contents de leurs affaires et très
occupés. Les dames s’occupent de leurs enfants, Lucy a
trouvé une bonne et
Marie en a aussi une en vue. J’attends de savoir si Eloi veut
bien venir ; s’il
ne vient pas on me propose un ménage, la femme comme
cuisinière, le mari
aiderait les enfants, ce sont des bretons, Mr et Mme Tassé,
l’homme est employé
à la ferme des pères, la femme va en journées
lessiver chez Mme Guay
qui en
fait le plus grand éloge. Mais j’aimerais encore autant
Eloi, l’été je prendrai
une engagée pour m’aider et l’hiver ils resteraient
à trois, Eloi ferait le
ménage. Ce ménage Tassé a un bébé de
1 an qu’il faudrait prendre aussi, ce
serait plutôt gênant. J’attends avec impatience la
1ère lettre de France et les
nouvelles que tu me donneras de tous ; je vais maintenant écrire
aux bons-papas
et répondre à quelques lettres que j’ai
reçues, mon dimanche se presqu’en
entier à la correspondance. Je t’embrasse bien
affectueusement, mon cher
Francis, tous ici t’envoient un affectueux souvenir. Tu
t’es fait des amis à
Ville-Marie, on te regrette et on espère que tu reviendras !...
Mr & Mme
Guay sont toujours très aimables, ainsi que toutes les personnes
que nous avons
été voir. Ta Mère qui ‘aime E.M. Lettre de
Mère (1857-1918) BAY VIEW HOTEL
Ville-Marie le 16 juin 1907 H.Landréville, Propriétaire
Ma chère Ninie, J’ai
été ce matin, dimanche , à la messe de 7 heures,
afin d’avoir toute ma matinée
pour la correspondance ; j’ai retrouvé après la
messe mes 3 fermiers qui s’en
sont retournés déjeuner et donner à manger
à leurs bêtes et reviendront à 11
heures et demie pour assister à une conférence
donnée par Mr Lavallée, professeur
d’agriculture à Montréal. Nous dînerons
ensuite tous ensemble à l’hôtel. Il
fait très chaud aujourd’hui, il y a déjà
23° à l’ombre ce matin, la journée
s’annonce chaude, il y a sur le lac un brouillard
mélangé de fumée, car hier il
y a eu aux environs plusieurs feux de forêts, on dit même
que 4 maisons ont été
détruites ; ces incendies sont très fréquents ici.
André a été souffrant cette
semaine, il a été pris d’un point violent, suite
d’un refroidissement, il a eu
passé 40° de fièvre ; le docteur craignait une
pleurésie ou une pneumonie,
Marie était fort tourmentée mais heureusement les
craintes ne se sont pas
réalisées et André va maintenant très bien.
Il est allé prendre pension à
l’hôpital dans une chambre très gaie avec sa femme,
les soeurs sont très bien
et il a été on ne peut pas mieux soigné. Ici la
coutume est d’aller se faire
soigner à l’hôpital où l’on est mieux
que chez soi et où on a les soins et le
docteur à côté. Le téléphone relie
l’hôpital à la maison du docteur. André doit
reprendre demain sa vie habituelle au magasin. Leurs affaires marchent
toujours
très bien et, on a pu juger par l’indisposition
d’André de toute la sympathie
qu’il s’est déjà acquise dans le village.
Aujourd’hui, Mr le Curé dans son
sermon a parlé du développement que prenait le village,
qu’il souhaitait que le
village conserve toujours sa piété et que le
développement matériel ne nuise
pas a ses sentiments religieux, qu’il était heureux de
voir quelques bonnes
familles chrétiennes augmenter le nombre de ses bonnes et
anciennes familles,
ceci à notre adresse puisque nous sommes les seules nouvelles
familles. Dans
une lettre que Marie recevait ces jours-ci, on lui dit
qu’à Roubaix, ville des
potins par excellence d’avec ses frères et de votre
départ probable pour le Canada.
Qu’y a-t-il de vrai ? Cette même lettre annonçait
aussi le décès du petit Louis
Prouvost. Veux-tu, ma chère Ninie, communiquer ma lettre
à Francis, je ne lui
écrirai pas aujourd’hui. Je n’ai pas encore
reçu mes meubles commandés à
Montréal, il paraît qu’avec le grève des
débardeurs de Montréal, il y a eu un
mois de retard dans l’expédition, notre wagon n’est
parti que depuis 3 jours.
Heureusement j’ai fini par pouvoir procurer chacun lit à
mes fils qui avaient
dormi 3 semaines sur la paille ; j’espère avoir tous mes
meubles dans une
dizaine de jours et je resterai alors à la ferme.
François apprendra avec plaisir
que toutes les semailles sont faites, l’avoine commence à
lever. Les bêtes sont
dans les pâturages clôturés et on va se mettre
maintenant à blanchir les
granges à la chaux ; Dans la maison, l’intérieur
est presque terminé, c’est
très bien. Le pays a maintenant un tout autre aspect que quand
François l’a vu.
C’est excessivement joli avec toutes ses collines de verdure et
de lac où l’on
se promène en barque le soir. Marie et Lucy ont leur’avenir sera
bon pour eux ! Ils attendent les livres que tu leur annonces, ils auront
maintenant un peu plus de temps à eux en attendant la récolte. Ils ont encore à
finir le pacage du bois et à peindre la grange. Mr Landréville ne boit plus, il
est devenu très bien. Mr Gaudet qui avait pris sa pension ici un moment est retourné
chez lui, il boit toujours mais cela ne se voit pas, il en a tellement
l’habitude ! Le bar fait bien ses affaires, surtout depuis qu’il fait chaud !
Marie qui avait demandé à Gestie, son amie, de venir chez elle pour l’aider a
reçu la réponse. Gestie viendrait très volontiers, mais sa mère est très âgée
et ne veut pas la laisser partir. Au revoir, mon cher Francis, je te prie de me
rappeler au souvenir de toute la famille ; tous ici t’envoient aussi un
affectueux souvenir. Je t’embrasse de tout coeur. Ta Mère qui t’aime E.M. P.S.
Veux-tu dire à Henri le jardinier, en lui faisant mes compliments, qu’il me mette
une cinquantaine de marrons sauvages de côté, je voudrais en essayer la
plantation au Canada. Compliments à Zoé, Jules et Eloi. ----ooooOOOOoooo----
Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 12 juillet 1907 Mon cher Francis
Jacques t’a écrit la semaine dernière désirant te mettre au courant lui-même de
tout ce qui concerne la ferme, il a emporté sa lettre avec lui et devait la
mettre à la poste à Ottawa, j’espère qu’il ne l’aura pas oubliée. Il est absent
pour la semaine, je l’ai engagé avant la dernière organisation intérieure de sa
laiterie, beurrerie, porcherie d’aller voir plusieurs belles installations
comme celle des Pérès d’Oka près de Montréal et 1 ou 2 autres et d’aller aussi
à la ferme expérimentale d’Ottawa. Il devait aller voir les Pérès du St Esprit
en même temps. Il est question d’acheter un moteur (il prendra aussi tous les
renseignement). Ce voyage sera très utile, car il est préférable de faire bien
tout de suite. Il ira voir les divers constructeurs qui ont tous des
succursales à Montréal. Toutes les bêtes vont bien, le poulain est superbe, la
jument a beaucoup de lait ; les petits cochons courent déjà avec leur mère dans
la cour de la ferme et barbotent à qui mieux mieux dans toutes les petites
mares formées par la pluie qui ne cesse pas depuis 2 jours. Tu ne reconnaîtrais
plus les bêtes, surtout les vaches si laides, elles ont pris de l’embonpoint,
ont un beau poil, on voit qu’elles sont bien soignées. Les travaux avancent
lentement car Desrocher est surchargé, il termine la maison de Marie, celle de
Lucy, il commence celle de Mr & Mme de St Laon, un agrandissement de
magasin pour André et aussi un agrandissement au magasin Gaudet. Nous n’avons
que 2 charpentiers qui travaillent à la grange, il y a encore à faire l’annexe
du côté des cochons. Le moulin pour l’eau est arrivé il y a 2 ou 3 jours, on a
commencé à nettoyer le puits, mais le mauvais temps arrête les travaux
aujourd’hui. A la maison il y a encore la galerie à faire, la cave et la
peinture extérieure. Je me demande quelles récoltes on va avoir cette année,
l’avoine n’a pas plus de 0.15 p de hauteur, les foins sont petits, tout cela
va-t-il mûrir à temps. Pour le foin on pourra toujours le récolter, mais
l’avoine ? ? ? Les pommes de terre et l’orge sont très belles. Ne te préoccupe
plus de me trouver quelqu’un en France, je vais tâcher d’avoir un ménage ici,
il paraît que cela se trouve assez facilement pour l’hiver. Au revoir, mon cher
Francis, je t’embrasse bien affectueusement ; compliments aux bonnes, Jules,
Henri et sa femme, Eloi. Tous tes frères et soeurs t’embrassent. Ta Mère qui
t’aime E.M. ---oooOOOooo--- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 18
juillet 1907 Mon cher Francis, J’ai reçu avant hier, le 16, ta lettre du 2
juillet ; tu vois il faut une quinzaine de jours pour que les lettres arrivent
à Ville-Marie ! Je l’ai sous les yeux afin de répondre à tout ce que tu me dis.
J’ai été hier à la banque pour donner le reçu des 50.000 francs qui viennent
d’arriver, je suppose que ta prochaine lettre me dira si tu as vendu de mes
obligations ou si c’est une avance de la maison Masurel. Au sujet
d’André et
Paul, je ne crois pas qu’ils aient besoin de capitaux, comme tu
as pu le répondre
à bon-papa François ; ce que Mr Mathon leur a
envoyé doit leur suffire
momentanément. Ils augmentent beaucoup leur stock de
marchandises, ils sont
toujours très satisfaits de leurs affaires. Ils ont donné
à Chénier un intérêt
dans les bénéfices au lieu de l’augmenter comme il
le demandait, afin de
l’intéresser davantage à la vente et de se
l’attacher. Il est très capable et
il ne faudrait pas qu’on le leur enlève. Il y a un nouveau
Store qui va
s’ouvrir, c’est un monsieur de Montréal qui a
acheté le magasin de Bauduin, en
face de chez André. Mr Riopel nous a dit que c’avait
été acheté hier, cela fera
peut-être baisser les prix, car ce sera le seul moyen pour ce
monsieur
d’attirer la clientèle, nous verrons cela ! Tes photos
nous font beaucoup de
plaisir, nous les collectionnons et nous en ferons un album. Dés
que la galerie
sera faite autour de la maison, Jacques prendra la photo pour te
l’envoyer. On
va commencer lundi, quand les granges seront finies. Pour l’eau,
je doute fort
que notre puits donne suffisamment tel qu’il est et l’eau
est mélangée de
sable. On va creuser davantage, Mr Riopel a dû faire la
même chose pour son
puits, il a de l’eau en abondance, Mr Ranger aussi ; il n’y
a pas de doute,
nous en trouverons à la même profondeur, c’est la
même nappe d’eau. Le moulin
est là, mais on attend l’eau pour le monter. Ne paie pas
mes notes avant mon
retour, je m’en occuperai dés que je rentrerai. Les
fermiers attendent leurs
livres avec impatience, ils ont eu quantité de brochures
à la ferme
expérimentale, quand Jacques y est allé. Ce dernier vient
d’écrire pour avoir 2
petits cochons de race Yorkshire de cette ferme, ils vont
s’attacher à n’avoir
que de beaux produits. Les avoines et l’orge sont
attaquées par de petits
pucerons qui font jaunir toute la récolte, c’est
général. Le père Moffet qui a
la plus belle avoine de la région n’en est pas exempt non
plus, Jacques l’a
consulté. Il dit qu’il n’y a rien à faire,
que peut-être le soleil va faire
disparaître tout cela et qu’il ne faut pas s’en
tourmenter encore. Les pommes
de terre sont magnifiques. Je pars tout à l’heure à
Lorainville voir un ménage
tout à fait bien que m’a recommandé Mme
Bellangé. Je les ai vu lundi, ils m’ont
plu beaucoup tous les deux. Ils n’ont pas d’enfants, ils
ont l’un et l’autre de
30 à 40 ans. La femme a été un certain temps chez
MR Forget à Montréal avant
d’habiter le Témiscamingue. Ce ménage rend beaucoup
de services aux pères
depuis nombre d’années, le mari aux chantiers et la femme
pour la cuisine. Tout
le monde en fait grand éloge. La seule difficulté est le
prix, un bon gage seul
pourrait les tenter. Ils ont une terre à eux avec une petite
maison. On m’avait
dit que le gage ici était de 25 à 30 piastres par mois.
Ils ne veulent pas
venir à ce prix-là. On m’en a dit tant de bien et
c’est tellement difficile à
trouver que je vais tâcher de les avoir au moins pour cet hiver
si leurs prétentions
ne sont pas trop élevées. Jusque maintenant je tiens
toujours le ménage, mais
je ne serai pas ici toujours et il faut absolument quelqu’un.
T’ai-je demandé
de payer la note de Mr Nuttin pour ce qu’il m’a
expédié ; elle se monte à
92.05, je n’ai encore rien reçu. Je viens
d’écrire à Mr Prévost,
l’expéditeur
de Montréal pour les réclamer. Vendredi après-midi
J’ai interrompu ma lettre
pour aller à Lorinville, je ne suis pas encore fixée pour
ce ménage, la femme
n’étant pas chez elle je n’ai vu que son mari, Mr
Crevière, il m’écrira un mot
d’ici 2 ou 3 jours, on ne pourra les avoir à moins de 40
piastres par mois,
mais ils ont tant de capacités tous deux que je crois
qu’ils nous feraient regagner
cette dépense. Le mari a lui-même défriché
100 acres, construit tous ses bâtiments,
maison , grange, etc... il sait mettre la main à tout. La femme
est capable non
seulement de tenir le ménage, mais de s’occuper de tout ce
qui concerne la
ferme, elle fait même le pain à la perfection. Ils me
paraissent désirer venir
chez nous et j’espère qu’ils accepteront pour 40 piastres. En passant chez
Bellehumeur nous nous sommes arrêtés pour commander un distributeur de fumier ;
Jacques, grâce à son voyage à Montréal était au courant des prix, il a obtenu
de Mr Bellehumeur de l’avoir au prix coûtant. C’est le premier que Mr Bellehumeur
vend dans le pays et il espère que cela lui en fera vendre d’autres. On
commencera les foins dans une huitaine de jours probablement ! Au revoir, mon
cher Francis, je t’embrasse bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se
joignent à moi. Compliments à tout le personnel. Ta Mère qui t’aime E.M.
---oooOOOooo--- Lettre de Jean Masurel (1890-1917) Ferme Ste Marie, Dimanche 20
juillet 1907 Mon cher Francis, Voilà déjà longtemps que tu réclames de nous une
longue lettre qui doit te renseigner sur tout ce qui s'est passé à la ferme
depuis ton départ. Je crois que Jacques l'a déjà fait, mais assez brièvement.
En tous cas je tâcherai de ne rien oublier afin de te satisfaire. Pour la
première fois aujourd'hui depuis que les de St Laon sont arrivés, nous avons eu
ce bonheur de ne pas recevoir et de ne pas être reçus: nous tenions absolument
à faire le tour de notre propriété que nous n'avions pas encore fait, aussi
nous passerons la journée ici au lieu d'aller dîner chez Marie qui reçoit le
reste de la famille plus les de St Laon et Mr La Perrière. Cela me permettra de
mettre au courant notre livre de compte que Jacques nous a rapporté de Montréal
et que je n'avais pas encore pu mettre en ordre: Mère m'aidera dans le début et
ensuite j'en sortirai facilement car notre comptabilité n'est pas encore bien
compliquée jusqu'à présent. Je te mettrai de temps en temps au courant de nos
exploits, tu pourras ainsi juger si nous faisons de sensibles progrès. Je viens
d'être interrompu par Mère qui avait vu une souris dans la cuisine et qui se
précipitait dans la salle à manger en poussant des cris de frayeur ; pour la
rassurer nous avons été l'assommer ; cela n'a pas été long et je viens continuer
ma lettre pour pouvoir la finir avant le dîner si possible. Le lendemain de ton
départ, le maquignon possesseur des deux fameuses grises venait lui-même à la
ferme tenter une dernière démarche ; il nous offrait 525 piastres pour la team,
mais quand il vit qu'il n'y avait rien à faire au delà de 500 piastres, il
s'est vu forcer de céder et nous montâmes dans sa voiture pour aller chercher
cette paire de chevaux tant désirée. Une chose est certaine, c'est que j'ai
admirablement réussi et chaque jour presque on me félicite du bon marché que
j'ai fait comme on dit dans le pays. Cependant on ne peut pas dire qu'elles
n'ont pas de défaut: toutes les deux ont le pied gauche de devant un peu en
dehors, mais il faut faire bien attention pour le remarquer tant le défaut est
petit. En plus des 10500 piastres de l'achat de la ferme, cela nous faisait
encore 500 piastres à sortir de notre poche. Mais quelques semaines après, nous
vendions 3 tonnes de foin à 14 piastres 1/2 la tonne rendu au quai, mais comme
nous étions à ce moment là en plein labour, nous l'avons fait charrier à 1
piastre la tonne, ce qui ne nous faisait plus que 13.5 piastres, total 40.50
piastres. A la suite de cela venaient plusieurs achats, entre autre 11 sacs de
pommes de terre de semence au total 12.50 piastres, quatre boeufs à engraisser
80 piastres, des fils de fer à clôture pour une quinzaine de dollars et un tas
de petits achats divers qu'il serait trop long de mentionner. Comme rentrées,
outre le foin, nous avons touché des oeufs, 2 sacs de pommes de terre revendus,
nos brebis qui n'étaient pas pleines du tout et la laine de ces3 brebis au
total 8.50 piastres (rien que la laine). La truie, le 4 juillet seulement, nous
donnait 8 beaux jeunes, dont un est mort quelques heures après sa naissance et
un autre beaucoup plus petit que les autres et toujours battu par eux que nous
avons été obligé de tuer. Deux jours plus tard, le 6, la poulinière nous
donnait un magnifique poulain, une jument que nous avons appelé
"Zora". Ce poulain et tous ces petits cochons se portent à merveille
et nous consolent d'avoir attendu si longtemps après tout ce petit monde qui
égaie maintenant si bien notre ferme. Les deux allonges de dix pieds de chaque
côté de la grange sont terminées. Tous nos outils agricoles sont révisés et il
nous reste encore suffisamment de place pour y placer notre moteur et les
différents agrès qui y ont rapport. Nous ferons nous même l'intérieur de notre
porcherie qui pourra contenir certainement une trentaine de cochons. Le seul
habitant de ce nouveau bâtiment, le cochon acheté avec la ferme, est maintenant
à point et le boucher viendra le chercher demain. Il ira, croyons nous à 160 ou
180 livres (12 cents la livre). Nous avons commandé à la ferme expérimentale à
Ottawa deux petits cochons de deux mois de race pure pour commencer notre
élevage ; cela nous coûte 75 frs (piastres?) sans le transport. Nous
n'achèterons pas de vache cet hiver ; le foin étant peu abondant dans tout le
pays se vendra un prix exorbitant et paiera beaucoup plus que d'élever des
vaches et d'en vendre le lait (conseil donné à Jacques à la ferme expérimentale).
Cela nous épargnera en plus un grand travail et nous permettra de nous occuper
du moteur et du défrichement. Nous avons commandé un distributeur de fumier automatique,
instrument indispensable à quiconque veut faire une bonne culture et épargner
la main d'oeuvre. N'ayant pas de voitures potables nous avons été obligés
d'acheter un "Express" à deux chevaux ainsi qu'un harnais de luxe.
Mes deux grises font très belle figure dans cet équipage. Nous commencerons nos
foins demain si le temps se maintien beau : jusqu'ici nous avons été favorisés
; ce n'est pas comme en France à ce qu'il me semble. La récolte d'avoine a
souffert cette année d'un insecte assez nuisible mais qui tend à disparaître.
Les pommes de terre par contre sont splendides et s'annoncent très belles.
Comme tu as du l'apprendre par Mère, la (jument) noire de Jacques a eu un
accident dans les clôtures, mais la voilà remise et prête à commencer les foins
demain. Le vétérinaire a quitté Ville-Marie pour retourner rejoindre sa femme
dans l'ouest, il est placé par le gouvernement. Il est probable que nous en
aurons un nouveau ; en tout cas c'est à souhaiter. Nous espérons recevoir
bientôt les livres que tu as achetés pour nous: ils seront utiles dans bien des
cas je suis sûr. Nous comptons sur l'arrivée d'Albert et d'Edmond samedi
prochain ; ils nous apporterons des nouvelles sur Tourcoing et Mouvaux, mais je
crois bien que tu nous annonces tout ce qui peut nous intéresser. Si tu as un
moment de temps écris nous, tu sais que cela nous fait toujours beaucoup de
plaisir. D'ailleurs on ne peut pas jusqu'à présent se plaindre de manquer de
nouvelle de nouvelles de ton côté. Fais bien des compliments de ma part à tout
le personnel du château Masurel et dis leur que tout le monde ici se porte à
merveille. Quant à toi, mon cher Francis, en attendant le plaisir de te lire,
je te serre affectueusement la main. Ton frère dévoué Jean P.S. J'ai oublié de
te dire qu'il fallait joindre aux achats un moulin à faucher. Nous l'avons
acheté à Riopelle, agent de la marque "Mc Cormick". Suit un mot de
son frère Jacques: Mon cher François, Si tu veux me faire un grand plaisir,
envoie moi ma selle que j'avais pour monter Polo, car ici j'ai souvent envie de
monter à cheval à cheval mais malheureusement je n'ai rien et pour en acheter
une il faudrait mettre un très grand prix pour avoir quelque chose de très laid
; si tu pouvais la confier à Mr Pierre Mathon ce serait parfait. Nous en aurons
bien soin afin que tu puisses t'en servir quand tu viendras nous voir dans un
an ou deux. Bonne poignée de main de ton frère dévoué Jacques
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 26 juillet
1907 Mon cher Francis, C'est enfin sur mon bureau américain que je t'écris ; il
est arrivé avant hier, après avoir mis 2 mois pour faire le trajet de Montréal
à ici ; il ne manquait plus que cela à la commande que j'avais faite. Je l'ai
placé dans le salon entre les 2 fenêtres, à la 3ème fenêtre, j'ai groupé une
table et quelques fauteuils. Dans l'encoignure de l'autre côté il y une
banquette, quelques chaises et une table avec journaux, brochures etc... Cette
salle est très pratique, dans le bureau on a déjà casé les livres de comptes,
papier à lettres etc... au dessus, tous les livres (Jacques a reçu les 2
volumes de Dictionnaire Usuel de Chirurgie et Médecine Vétérinaire). Cela
paraît bien. Nous attendons Edmond et Albert samedi ou lundi. Jacques leur a
écrit à New York pour les avertir que le dimanche, il n'y avait pas de départ
de bateau, car ils avaient écrit qu'ils arriveraient dimanche soir pour
repartir mardi. On ira au quai demain si on ne reçoit pas de dépêche! Nous
avons aujourd'hui une forte tempête, malgré cela Jacques vient de partir à
Ville-Marie avec ses chevaux et le Barn pour porter à Loisel, le boucher, un
cochon que Robert a engraissé et qui est superbe. Il l'achète à 0.14 cents la
livre dépecé. Jacques vient d'écrire pour en demander deux autres à la ferme
expérimentale ; ce sont des Yorkshire qu'il avait vus lors de sa visite, il y a
une quinzaine de jours. Dés que le temps le permettra, on va se mettre aux
foins, lundi probablement. La récolte ne vaudra pas celle de l'an dernier
paraît-il, mais elle sera assez bonne. Les 2 moulins à faucher sont tout prêts
à fonctionner. On n'attend que le soleil qui ne fait pas souvent défaut ici.
J'ai vu Lucy hier qui m'a dit avoir reçu ta lettre, elle n'a pas pu me la
montrer parce que Paul l'avait gardée dans sa poche. Elle m'a dit que Mr
Marescaux avait demandé un plan de la propriété, y aurait-il enfin un amateur?
J'en serai ravie, car pour nous trois, une petite maison en ville serait bien
plus agréable et moins coûteux. Je préférerais, s'il le fallait, faire un
sacrifice pour vendre et laisser pour 225 ou même 200. Si tu crois qu'on ne
pourrait pas obtenir 200, on pourrait laisser jusqu'à 190, mais pas au-dessous,
ce serait bien bon marché pour une propriété comme celle là et il me semble
qu'il serait préférable de la garder encore un moment! Je te remercie de
m'avoir envoyé la feuille des départs des transatlantiques. Le 19 septembre, je
ne crois pas être déjà en mesure de revenir, j'aimerai mieux le 10 octobre. Je
quitterai Ville Marie au commencement d'octobre avec Robert et Suzanne. J'irai
voir l'école où sera Robert et pour laquelle je me renseigne en ce moment, je
passerai quelques jours à Montréal et je partirai le 9 pour New York. Dés que
je serai bien décidée, j'écrirai à la Compagnie Transatlantique pour retenir ma
cabine. Au revoir, mon cher Francis, je t'embrasse affectueusement. Tous tes
frères et soeurs se joignent à moi. Ta Mère qui t'aime E.M.
----ooooOOOOoooo---- Lettre Lucy Mathon-Masurel (1884-1917) 2 août 1907 Mon
cher Francis, Je me disposait à t'écrire hier soir lorsque Mme Guay, suivie de
Mme et Mr de St Laon et de leurs filles sont arrivés. Les de St Laon n'ont pas
fait long feu, ils étaient tout en foufelle par l'arrivée de deux ingénieurs
qu'ils avaient connus sur la Provence lors de leur dernière traversée ; quant à
cette bonne Mme Guay, elle ne m'a quittée qu'à 9 heures 1/2, ce n'est pas bien
tard tu me diras, mais je t'assure qu'avec la vie que je mène en ce moment j'ai
besoin de mes 9 heures de sommeil pour ne pas me tuer complètement. Je t'assure
que pour l'instant ma vie est loin d'être folichonne et que par moment je
regrette la vie facile de Roubaix ; la cause de tous ces ennuis c'est que je
n'ai pas de domestique, je suis installée chez moi depuis huit jours seulement,
cette huitaine m'a suffi pour voir combien il est pénible de devoir tout faire
soi-même, la cuisine à entretenir, la maison, soigner les enfants, raccommoder,
que sais-je encore ; avec cela Eugénie a du te faire part de ce que je lui
disais dans ma lettre, je puis te confirmer la nouvelle, encore "un
moutard en route", je ne suis pas ravie du tout, aussi ne me félicite pas
je t'en prie. Je n'aime pas du tout que l'on en parle. Je suis honteuse de tant
gémir, mais cela vous console un peu de vous plaindre. Ta bonne et longue
lettre m'a fait un réel plaisir, aussi j'espère que tu te donneras encore la
peine de m'écrire de temps en temps, tu seras la chaque fois avec le même
plaisir. Ici, comme diversion, nous avons eu le passage d'Edmond Masurel et
d'Albert Ternynck. Ils étaient très gais, aussi avons nous eu beaucoup de
plaisir avec eux, ils nous ont donné des nouvelles de tout le monde. Tu n'a pas
idée comme cela fait plaisir d'entendre parler de son clocher et de tout ce qui
s'y rapporte. Albert nous a donné quelques petites séances de souplesse qui
nous ont fait beaucoup rire, il avait mis pour l'occasion un petit chapeau à
Marie avec un de ses palitou (?) sac, il était épatant imitant la parisienne
(mauvais genre) dans la perfection. Ils nous ont dit que Madeleine Masurel
était fiancée à Gaston Ternynck, ceci tout à fait entre nous car le chose est
encore tout à fait officieuse, il ne faudrait pas que la nouvelle s'ébruite et
que l'on sache que c'est par nous. Edmond paraît très heureux de sa décision,
je lui ai dit ton opinion sur sa fiancée, il en a été très satisfait et m'a dit
"Ah bien, je suis bien content de savoir ce que pense François, j'attache
toujours de l'importance aux conseils et avis qu'il me donne" ; cela m'a
fait plaisir d'entendre faire ainsi ton éloge indirect ; ne m'en veut pas de le
répéter si bonnement. Et l'affaire de Prouvost où en est elle? Ninie est-elle
toujours disposée à partir au Canada, et Charles lui...je le croirai parti
quand je le verrai arriver. Quant à toi nous t'attendons au printemps prochain.
Mère projette de monter une brasserie pour un de ses fils, il faut que tu y
apportes tes lumières et tes conseils. Ca serait trop fatiguant pour Mère,
monter l'affaire à elle seule. Si Ninie se décidait aussi nous serions enfin au
complet ; quel bonheur et comme je voudrais déjà en jouir de ce bonheur...
Embrasse pour moi Ninie et ses enfants, mon meilleur souvenir à Charles. Quand
tu verras les deux grands-pères dis leur que je les embrasse et que je pense
souvent à eux bien que je ne leur écrive que bien rarement. Quant à toi, mon
cher Francis, je te quitte en t'embrassant de tout coeur. Lucy
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 2 août 1907
Mon cher Francis, Je réponds à ta lettre du 18 juillet où tu me dis qu'il
pourrait y avoir un acheteur sérieux pour Mouvaux, en Mr Maurice Caulliez. Ta
prochaine lettre me fixera probablement à ce sujet. Si Mr Maurice Caulliez
achète, je suppose que c'est pour en jouir tout de suite et tu seras obligé de
faire déménager tout ce qu'il y a dans la maison avant mon retour. Bon-papa
Jonglez pourrait peut-être donner l'hospitalité à mes meubles dans les magasins
qui restent encore libre et Mr M.Caulliez reprendra peut-être différentes
choses qui sont faites pour la maison comme les tapis, les intérieurs de cheminées.
J'ai fait un inventaire sur un cahier que tu trouveras dans mon bureau, dans le
tiroir de gauche ou l'armoire de gauche. Les prix d'achat sont marqués. Si tu
ne trouvais pas, le mieux, c'est de faire estimer par Morel les objets que Mr
M.Caulliez pourrait reprendre. C'est lui qui a presque tout fourni. Tu peux
vendre mon piano à queue si tu trouves un amateur. Dans le cas où on vendrait,
où crois-tu habiter? J'aimerai de voir avant de louer, je ne veux rien acheter,
ni bâtir ; je trouverai bien l'hospitalité chez Bon-papa Jonglez en attendant
d'avoir une maison, à moins que tu ne m'en proposes une que je connais, je
pourrai alors te télégraphier mon avis...Mais je doute fort que la campagne se
vende aussi bien. Si tu vois J.Desurmont avant son départ, ce qui n'est pas probable
avec le temps que les lettres mettent en route, tu le remercieras et tu lui
diras que j'aurais été fort heureuse de profiter de sa société pour revenir,
mais je ne sais pas encore si je pourrai quitter à cette époque là! J'ai enfin
engagé un ménage ; celui dont je t'ai parlé dans ma dernière lettre, Mr et Mme
Crévier. Mme Crévier est venue quelques jours pendant qu'Edmond et Albert
étaient ici, elle est repartie hier et reviendra avec son mari dans 2 ou 3
jours. Elle est très bien, c'est une femme de 44 ans, bonne cuisinière, active
et avec cela gaie et causante
; ce sera très bien pour tenir le ménage des
enfants. Elle sait mettre la main à tout. Le mari, je le connais
moins, mais il
paraît aussi agréable que sa femme. Je n'ai pas pu les
avoir à moins de 40
piastres par mois...les enfants sont très contents de leurs
engagés comme on
dit ici. Il fait du très mauvais temps pour les foins, Jacques
et Jean ont
fauché une matinée ; ils ont été
obligés d'arrêter à cause de la pluie. Aujourd'hui
il fait froid, ils ne recommenceront pas avant lundi. Espérons
que le temps
sera remis! Les travaux de la maison avancent, le calorifère est
posé, la
galerie couverte et planchéiée. Quant à l'eau, on
fait un nouveau puits qui
donne bien du tourment, les tuyaux se bouchent à cause du
gravois qu'on
rencontre, mais on trouve de l'eau et on espère avoir
bientôt fini. Il y a 6 ouvriers
chaque jour, charpentiers et ouvriers de Brother. Tous les animaux sont
superbes, le poulain vient bien, les cochons se développent
à vue d'oeil, les
poussins deviennent des poulets. Pour la première année
tout a réussi à
merveille. Nous attendons d'un jour à l'autre un envoi de 2
porcelets Yorkshire
de la ferme expérimentale. Mr Crévier nous amène
sa vache qui est très bonne,
nous n'en achèterons pas d'autre cette année à
cause de la rareté du foin, il y
aura plus d'avantage à vendre le foin qu'à faire du
beurre. Les ménages Mathon
vont très bien, Lucette est ma pensionnaire depuis quelques
jours afin de
soulager sa maman qui n'a pour aide qu'une fillette de 14 à 15
ans qui ne vient
que pour la journée et il n'y a pas possibilité d'en
trouver d'autre, même en
payant! Marie a également une jeunesse de 18 ans, mais qui peut
loger chez
elle. Edmond et Albert sont arrivés dimanche soir et ont
passé leur journée de
lundi avec nous; nous avons été fort heureux de les
revoir et notre temps s'est
passé agréablement. Ils sont venus souper à la
ferme et ont dîné chez Marie. Le
dimanche soir nous nous étions tous réunis à
l'hôtel pour leur arrivée. Au
revoir, mon cher Francis, je t'embrasse bien affectueusement,
compliments aux
bonnes. Ta Mère qui t'aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de
Mère (1857-1918)
Ferme Ste Marie, le 10 août 1907 Mon cher Francis, Je n'ai pas
reçu de lettre de
toi cette semaine, je te suppose en promenade à Boulogne ou
ailleurs ; ici, il
n'est pas question de vacances en ce moment, on fait les foins depuis 8
jours,
on a déjà rentré 13 grosses charges, on aurait pu
en faire davantage si la
pluie n'était pas venue retarder plusieurs fois. On a
fauché toute la partie du
côté des granges jusqu'au bois, mais tout n'est pas
rentré. Ils espèrent
pouvoir rentrer le reste aujourd'hui et commencer lundi la partie du
côté de
chez Riopelle, c'est le plus beau morceau. Ils ont arrangé la
fourche
américaine à leur grange, cela va beaucoup plus vite, on
y attelle un cheval.
Dimanche, nous avons encore eu une naissance, la vache blanche nous a
fait la
surprise de nous donner un veau. Elle était chez Riopelle avec
les 4 boeufs achetés
à Alice parce que Mr Riopelle a trop d'herbe et nous avait
proposé de les
prendre, et le matin, en passant pour aller à la messe nous
avions vu la vache
avec un pis tellement enflé que l'on se demandait si elle avait
vêlé ou si elle
était sur le point de le faire. Jacques est donc allé
après la messe chez Mr
Riopelle qui avait trait la vache le matin, mais elle n'avait pas
donné son
veau. On n'a pas pu la reprendre à ce moment là, elle
était repartie dans le
bois, et le soir on est allé à sa recherche. Mr Riopelle
avait eu soin de lui
attacher une clochette, on l'a trouvée avec son veau, une belle
petite génisse
rousse qu'on a ramené à l'étable. Tout cela se
passait à 8 heures du soir, au
moment où nous étions prêts à partir passer
la soirée chez Mme Guay. Jean et
Robert sont restés et nous sommes partis à 3, Jacques,
Suzanne et moi. Il y
avait chez les Guay une trentaine de personnes, toute la haute
société de
Ville-Marie, les Tremblay, Filteau, Bastien, Bouillane, Laur, Aubin et
d'autres. On a fait de la musique toute la soirée jusqu'à
11 heures et demie.
On a bien de la peineà trouver de l'eau dans la propriété ; le puits est
insuffisant, on a creusé à 5 endroits, on est toujours sur la roche, on sera
probablement obligé de creuser un puits comme chez nous au lieu d'un puits
artésien. Le calorifère est presque monté. La galerie se termine. Il restera la
cave à planchéier, mais on laisse cela pour le dernier parce qu'il faut faire
passer les tuyaux d'eau d'abord. Jacques a reçu ses 2 petits cochons de la
ferme expérimentale, 2 Yorkshire, un verrat et une truie ; le verrat est un peu
plus jeune, on les avait demandés de mères différentes pour le croisement. Ils
sont très beaux. Je t'embrasse affectueusement, mon cher Francis, tous tes
frères et soeurs se joignent à moi. Ta Mère qui t'aime E.M. P.S. Les livres que
tu as fait expédier sont arrivés à bon port avant-hier, ils semblent très bien
faits ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 16
août 1907 Mon cher Francis, J'ai reçu ta lettre du 2 août à ton retour du
Touquet et les enfants ont reçu les cartes postales que tu leur as envoyées et
dont ils te remercient. On est en pleine récolte de foin, il y a déjà 30 tonnes
environ de rentrées et il y a encore à faucher toute la partie du côté des
Riopel. Le foin récolté jusqu'à maintenant est très beau. Aujourd'hui il pleut,
on n'a pas pu faucher, cela force nos fermiers à se reposer mais il faudrait
que cela ne dure pas car il est temps de terminer. Le samedi on ne fauche pas à
cause du dimanche où on ne peut pas étendre le foin, ce sera donc pour lundi
qu'on recommencera, il y en a bien pour toute la semaine. La récolte d'avoine
sera moins mauvaise qu'on pensait, je crois bien qu'il y en aura suffisamment
pour les besoins de la ferme. La galerie se termine autour de la maison,
dimanche nous prendrons quelques photos. Cette semaine j'ai pris Jacques et
Jean pendant qu'ils étaient tous deux sur leur moulin à faucher. On fera
développer toutes ces photos pour te les envoyer. Et la campagne est-elle vendue?
Si la vente se fait, je désire garder mes plantes vertes et les plantes de
serre qui pourraient résister dans les appartements, ma collection de bégonias
qui sont en massifs, ce sont des tubercules qu'on enlève à l'automne et que je
garderai pour mon jardin. Quant à la collection de chrysanthèmes, tu peux le
recéder à Mr Maurice Caulliez, en m'en réservant une quinzaine. Pour les bancs,
chaises de jardin, outils de jardinage, échelles, etc... c'est du mobilier qui
ne va pas avec la propriété et qui doit être repris aussi. On pourrait se
réserver un banc, une table et quelques chaises. Le bois à brûler serait
également à reprendre ainsi que les fagots par l'acheteur. Veille à mes
intérêts. Tu me parlais de la maison de Mr Lemaire-Caulliez en cas où la mienne
serait vendue, ce serait en effet très bien mais je préfère louer qu'acheter.
Je ne veux plus me mettre de propriété sur les bras maintenant ; si Mr Lemaire
ne voulait pas louer, on chercherait ailleurs; mais j'aimerais beaucoup cette situation
là qui ne me ferait pas quitter St François. Samedi soir Hier ma lettre a été
interrompue par une chasse au chevreuil. Un superbe chevreuil se promenait sur
la lisière du bois, Jean et Mr Crévier sont partis avec le fusil de Mr Crévier,
ils ont tiré 3 coups, sans se montrer, mais probablement que l'émotion de ce
1er tiré de chevreuil avait enlevé à Jean son adresse, il l'a manqué et plus de
cartouche. Le chevreuil regardait autour de lui sans bouger et Jean et Mr
Crévier s'en revenaient en rampant dans les herbes pour rechercher des cartouches
quand Jacques et Robert sont arrivés et ont effrayé le chevreuil qui est
reparti. Mme Crévier et moi comptions déjà sur un bon rôti de chevreuil à
offrir aux Mathon, mais ce sera partie remise. Nous avons aussi quelques ours
dans le bois. J'ai permis à Jacques et à Jean d'acheter une carabine pour ces
sortes de chasse, il est bon qu'ils aient une arme. Mr Lefebvre, notre voisin,
a justement une excellente carabine qui porte à 2 miles et avec laquelle il a
tué dernièrement un orignal plus gros qu'un cheval, il veut bien la recéder
pour 36 piastres, il s'en fera revenir une autre par son fils, ce sont des
armes contrôlées par le gouvernement et qu'on ne trouve pas à se procurer ici.
Demain je reçois ; Mme Crévier nous confectionne des tas de gâteaux de toute
espèce car elle s’aperçoit qu'on les aime et qu'on y fait honneur. Quant au
menu il ne peut être bien varié: boeuf ou mouton, j'ai fait tuer 2 poules que
nous mangerons à la mode canadienne, bourrées avec des patates, oignons, etc...
au Canada on ne connaît pas les fins plats, on ne s'en porte pas plus mal. Au
revoir, mon cher Francis, je t'embrasse bien affectueusement, tous tes frères
et soeurs se joignent à moi, Marie m'a dit qu'elle t'avait écrit une longue lettre!
Ta Mère qui t'aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme
Ste Marie, le 22 août 1907 Mon cher Francis, Nous avons eu dimanche réunion à
la ferme de la colonie française augmentée de deux jeunes gens, Messieurs
Bénard de Paris. Te rappelles-tu que nous avons fait la traversée avec les
parents de ces jeunes gens, qui étaient mes voisins de cabine et qui venaient
rejoindre leurs fils. Ils se sont d'abord installés à Montréal et les jeunes
gens sont partis visiter l'ouest puis la région du Témiscamingue. A Ville-Marie
ils ont appris que nous y étions et sont allé voir immédiatement ces Mrs Mathon.
Marie m'a téléphoné (car nous avons le téléphone maintenant) et je lui ai
demandé d'inviter de ma part ces jeunes gens à dîner pour le lendemain
dimanche. La réunion a été très gaie, ces jeunes gens sont charmants et ils se
plaisent si bien ici qu'ils ont écrit à leurs parents de venir les rejoindre et
il est très probable qu'ils se fixeront aussi à Ville-Marie. Ils ont passé
toute la semaine à aider André, pour charger et transporter ses marchandises,
avoine, sel, etc... et il paraît qu'ils sont très forts et très résistants. Ils
vont passer leur soirée tantôt chez l'un tantôt chez l'autre. On attend les
parents aujourd'hui ou demain. Tes livres ont déjà rendu service, Belle de la
Team de Jacques a été malade et le livre nous a indiqué sa maladie, c'était des
coliques de la vessie, on l'a soignée immédiatement, en deux jours c'était
fini. Il n'y a plus de vétérinaire à Ville-Marie, ces livres vont être très
utiles. On a vendu au boucher 3 des boeufs d'Alice pour 80 piastres, ce qu'on
avait payé pour 4 bêtes ; on va vendre également le petit veau qui a 3
semaines, car maintenant on fait le beurre, il y aura plus de profit à s'en défaire
tout de suite. Les foins sont presque terminés, on compte sur une soixantaine
de tonnes. Le moulin à vent sera terminé demain, on pose la pompe et la roue
aujourd'hui. Le puits se creuse à la pelle, en dessous du moulin à vent, à la
même place que l'ancien. On peint la façade ; le toit est rouge, la façade
blanche avec les encadrements des fenêtres bleus (les couleurs nationales). On
attend que ce soit terminé pour prendre les photos. Desrocher promet que tout
sera terminé pour le 1er septembre. J'ai de la peine à le croire. J'ai écrit
pour retenir ma place pour le 26 septembre sur la « Lorraine ». Il y a une
exposition agricole à Ottawa le 22, Jacques m'accompagnera jusque là et je
conduirai Robert chez les Pères du St Esprit qui ouvrent leur école le 1er
octobre. C'est encore là que Robert sera le mieux, après renseignements pris
sur les autres écoles. J'ai reçu ta lettre du 7 août, ainsi que Jean. Tu te
plains de ne pas avoir de détails sur l'installation de Marie et Lucy, je
croyais t'en avoir parlé dans une de mes lettres. Marie a une véritable petite
villa de bains de mer, très coquettement arrangée, elle est très confortable en
même temps avec salle de bains, WC, etc... Celle de Lucy s'arrange et sera très
commode. Quant aux enfants, tu dis que je n'en parle pas, il vont très bien.
Toto a eu beaucoup de chagrin de ton départ et il est fort heureux de voir ton
portrait sur le buffet chez lui. Ce Toto est connu de tout Ville-Marie où on le
rencontre seul à tout à toute heure du jour, il se débrouille très bien, fait
les courses de sa maman et travaille dans la cour du magasin quand on veut bien
le laisser faire. Ils sont tous on ne peut mieux portants. Luce est ma
pensionnaire, elle ne veut plus retourner chez elle. Au revoir, mon cher
Francis, je t'embrasse bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se
joignent à moi. Ta Mère qui t'aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Marie
Mathon-Masurel (1882-1954) Le Sourire, Ville-Marie, août 1907 Mon cher Francis,
Si je ne t'ai pas encore écrit depuis que tu nous a quitté c'est que je savais
que tu avais de nos nouvelles par Mère ; mais je vois part tes lettres que les
moindres détails t'intéressent, je vais donc te causer un peu plus longuement
des gens de Ville-Marie, car ceux de la ferme on les voit relativement très
peu. Si tu pouvais revenir au Canada maintenant tu trouverais bien du
changement. André se propose toujours de t'écrire pour te mettre au courant des
affaires, mais tu sais à quel point il est occupé, je vais essayer de le
remplacer. Premièrement, ils ont doublé leur magasin ; ils ont fait derrière un
immense hangar à un étage. Tu sais, n'est-ce pas, qu'ils ont acheté il y a
quelques mois la banque et la maison de Mr Law, et bien c'est dans le jardin de
ces 2 maisons qu'ils ont construit leur hangar. Chénier est effrayé de l'essor
qu'a pris l'affaire en si peu de temps ; on commande le double que du temps de
Tobias et il n'y en a jamais assez. Ils ont ajouté aussi de nouveaux rayons
tels que les meubles; pour te donner un exemple, ils ont commandé 18 chambres
complètes, elles sont arrivées il y a quinze jours, il n'en reste que 3! et
tout va de même... Ils ajoutent à leur store un commerce de foin et de patates.
Mr de St Laon est associé pour un tiers, il donne des capitaux bien entendu.
Voici en quoi consiste cette affaire qui est un peu dépendante de la première:
on achète le foin en août, au moment de la récolte, pour les pommes de terre
c'est la même chose. Nos habitants paient leur note en foin, puis nous le
plaçons dans les hangars qu'ils viennent de faire construire puis en avril,
mai, juin, quand le foin et les pommes de terre sont hors prix et qu'on se bat
pour en avoir alors ils viendront et retireront un très joli petit bénéfice.
Cette année en juin ils ont du faire venir des pommes de terre d'Hailybury et
on aurait gagné 1 dollar par poche ; tu vois le bénéfice... Il était aussi question
qu'ils reprennent les eaux de la ville, mais il aurait fallu pour cela graisser
la patte à Riopelle le maire. Ils y ont renoncé. Encore autre chose qui n'est
encore qu'en pourparler et pour laquelle ton secours nous sera très utile. Tes
deux américains sont venus et ont été d'une très grande amabilité avec nos
maris ; ils devaient prendre le thé chez nous hier mais ils ont du repartir
assez brusquement. Voici la proposition qu'ils nous ont faite. On a découvert à
Fabre tout dernièrement des mines d'or tout à fait pur et en grande quantité.
Nos américains ont acheté des terrains pour y construire toute une ville de
plaisirs et d'amusements, on y fait un jardin public, etc, etc... Voici le rôle
que nous devrions y jouer ; ces messieurs nous donnent le terrain pour rien et
nous devons y faire un store succursale de la maison Mathon Frères ; il peut se
faire entre les 2 maisons un échange de marchandise qui serait très profitable
aux deux. Voici ce que nous leur avons proposé: faites bâtir, nous vous
louerons et nous tiendrons le store. Ils voudraient même que nous fassions de
la banque ; ce serait assez facile, si la ville prend nous demanderions à Mr
Law de se mettre avec nous, il a déjà tenu un store dans le temps et serait
très à même de les aider ; on lui donnerait un intérêt quelconque sur les
bénéfices. Pour cette affaire ce sera, ou un four complet, ou on ramassera un
très jolie fortune. Je suis beaucoup plus penchée à croire que la dernière
supposition sera la vraie, car ces découvertes de mines vont forcément amener
du monde. Ces Messieurs vont aller à Bruxelles d'ici peu et veulent te voir et
te causer de tout cela. Tu serais bien gentil de faire tout ton possible pour
les voir et même les faire aller jusqu'à Mouvaux leur montrer la filature,
etc... Ils auront ainsi une opinion assez bonne des gens auxquels ils
s'adressent et nous donneront la préférence. Voici tout ce qu'il y a de neuf
pour les affaires. Ma maison est tout à fait terminée et, sans vouloir me
vanter, est vraiment très jolie. Le conseil que tu m'a donné de mettre une
porte à petits carreaux entre le salon et la salle à manger était excellent,
aussi tout le monde veut me copier. Nous avons deux superbes chevaux mais pour
les affaires je t'assure qu'ils ne chôment pas. Le dimanche nous ??? mettrons
bien souvent avec les de St Laon et monsieur Laperrière qui est devenu un de
nos bons amis. C'est un monsieur tout à fait distingué, ayant beaucoup voyagé,
il s'occupe de mines ; ainsi en ce moment il est parti pour 2 mois dans les
bois, il cause plus facilement l'anglais que le français ce dont j'ai été
enchantée, car nous avons pris l'habitude de causer l'anglais que j'ai presque
complètement rattrapé. Les enfants vont très bien. Toto est devenu l'inséparable
de Coco. On ne les voit jamais, ils jouent dans les hangars de Lucy à faire les
ouvriers dont ils ont d'ailleurs l'accent. Toto me sort quand il ne sait pas
faire quelque chose des?? je suis pas capable des quantités de phrases du même
genre. Denise est mon toutou qui me suit partout et qu'on entend. Pour m'aider
j'ai une fillette de 14 ans, aussi mes débuts ont été peu durs et nous avons du
bien travailler pour nous installer tout en tenant notre ménage. Quelle
différence avec la vie que je menais à Roubaix et que pourtant je ne regrette
pas, je t'assure. Mère commence à songer au départ pour la fin septembre,
commencement d'octobre. Trouves-tu que l'un de nous doit aller la conduire au
bateau afin de ne pas la laisser seule dans New York? Je ne crois pas que Jacqueline
sera jamais la femme rêvée pour un des petits car personne n'en raffole.
Dis-moi comment sont les fiancés Gaston et Madeleine. Maintenant, mon cher
Francis, en attendant le plaisir de te lire je t'envoie l'assurance de toute
mon affection avec un affectueux baiser. Marie Mathon P.S. Edmond et Albert ont
été enchantés de leur séjour, nous étions très gais, je les ai conduits au lac
Laperrière un peu partout, ils étaient désolés de devoir partir si vite.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, (fin) août
1907 Mon cher Francis, Je viens de recevoir une lettre de l'agent de la Cie
Transatlantique. Je puis avoir sur la « Lorraine » la cabine 213 pour le 26, je
serai donc de retour dés le commencement d'octobre. Peut-être irai-je à Paris ;
si le retour de Ninie de Biarritz peut correspondre avec le mien, j'irai la rejoindre
à Paris où je passerai un jour ou deux. Tout est en bonne voie ici, je puis
repartir, la maison s'achève, on peint l'extérieur, ce sera fini pour jeudi. Le
puits est presque terminé, mais il y a peu d'eau jusqu'à présent ; c'est un
puits creusé à la pelle et fait avec des pierres, on laissera l'eau du puits
artésien ancien se déverser aussi dans celui-là et on espère ainsi en avoir
suffisamment. Le moulin est posé au dessus, on n'a plus qu'à y mettre la roue
pour le faire fonctionner ; les conduits se font jusqu'aux granges. Dans la
cave c'est fini et la cave est planchéiée. Pour le 10 septembre nous n'aurons
plus d'ouvriers. Le moteur est arrivé avant-hier. Il fonctionne très bien, il y
a avec le moteur une scie pour le bois et un moulin pour faire la moulée. L'an
prochain on adjoindra probablement une presse à foin et peut-être un moulin à
battre. Pour cette année, Jacques louera une presse et Mr Riopel lui prêtera
son moulin à battre. Jacques en échange ira avec son moteur battre le grain de
Mr Riopel. Les foins ont été terminés mardi soir: 67 charges qui équivalent à
67 tonnes environ et le foin est superbe, parfaitement réussi malgré les pluies
assez fréquentes pendant la récolte ; maintenant on prend un peu de repos bien
mérité tout en faisant le petit train ordinaire. Hier ils ont refermé le bois
d'un bout à l'autre aux endroits abîmés pour laisser pacager les bêtes, elles y
sont aujourd'hui. L'avoine n'est pas encore mûre, il faut encore 2 ou 3
semaines. La famille Bénard est en pourparlers pour acheter un terrain près du
cimetière qui appartient aux Pères, c'est à cet endroit là qu'on suppose que
sera la gare quand on aura les chars l'an prochain, ce terrain ne peut donc que
gagner de valeur. Il est probable que le chemin de fer passera à travers notre
propriété et celle de Mr Riopel. Le chemin de fer fera encore gagner
Ville-Marie qui s'est développée cette année d'une façon sensible. On a bâti 47
nouvelles maisons, elles sortent de terre comme des champignons ; il y en a que
j'ai vu construire en 2 semaines, elles ne sont pas bien grandes il est vrai.
La maison de Mr de St Laon est couverte, et elle sera habitée au mois
d'octobre. Elle a très belle apparence. Hier je suis allée à la baie conduire
Suzanne à sa leçon d'anglais. Mairie et Lucy allaient partir faire une
promenade en voiture avec leurs enfants, elles m'ont emmenée et nous avons fait
une très jolie promenade par le ferme de la Vallée et sur le chemin de la mine
; nous sommes revenues par la route de Guignes et nous nous sommes arrêtées à
la ferme pour faire pour faire goûter les enfants. La ferme de la Vallée est
très jolie comme site, mais je préfère la nôtre au point de vue pratique et je
crois que le terrain est appelé à augmenter davantage de ce côté-ci,
Ville-Marie ne pouvant s'étendre que de notre côté. Ton choix a été heureux. Mr
Guay t'a-t-il écrit au sujet de quelques hypothèques qui sont encore inscrites
sur notre propriété. Mr Guay a écrit au baron de Kervain, il croit que ces hypothèques
ont été payées mais qu'on a négligé de les faire rayer, il demande à Mr le
baron de Kervain l'autorisation de faire le nécessaire et qu'il tient l'argent
à sa disposition pour lui envoyer dés que tout sera bien en règle. Mr le baron
de Kervain exige l'argent immédiatement, mais la propriété étant achetée à
condition qu'il n'y ait pas d'hypothèque, Mr Guay tient bon et défend nos
intérêts. Une démarche à Nazareth, près de Gand, chez le baron de Kervain
aplanirait probablement toutes les difficultés. Mr Guay dit qu'en gardant 1000
à 1500 piastres ce serait largement le montant des hypothèques. Au revoir, mon
cher Francis, je t'embrasse bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se
joignent à moi. Ta Mère qui t'aime E.M. P.S. Toto a décidément un goût prononcé
pour la peinture. Il ne se contente pas de peindre les motocyclettes, il y a
quelques jours, il passait la journée à la ferme, je suis arrivée à temps pour
l'arrêter dans ses travaux ; il avait trouvé un bidon de couleur bleue avec un
pinceau, il avait déjà peint toute une glace et commençait le plancher!...
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ferme Ste Marie, le 7 septembre
1907 Mon cher Francis, Je réponds à ta lettre du 22 août que j'ai ici sous les
yeux, je regrette que ton voyage en Angleterre n'ait pas donné le résultat
désiré, mais espérons que ce ne sera pas un empêchement pour obtenir ce que
nous désirons! Pour les projets de brasserie dont Lucy t'a parlé, je ne sais
pas ce qu'elle a bien pu te dire, il n'est nullement question de cela pour le
moment. J'ai pu, dans la conversation, lui faire part de mes projets pour
l'avenir, car certainement que dans quelques années, quand les enfants auront
acquis une certaine expérience, je les verrai volontiers adjoindre un commerce
quelconque à leur ferme, la brasserie irait très bien de pair avec une ferme.
Si Charles venait, il y aurait peut-être une combinaison à prendre avec lui,
mais toutes ces choses là ont besoin d'être mûries et qu'on en parle, ce n'est
pas par lettre qu'on peut discuter le pour et le contre et je n'en ai jamais
même parlé à Charles dans mes lettres. Tu peux être tout à fait tranquille, je
ne suis pas devenue américaine et entreprenante et je resterai excessivement
prudente pour l'avenir de mes 3 fils. Je ne me rappelle pas si je t'ai parlé
dans mes lettres du cadeau que je dois faire à Madeleine Masurel pour son
mariage. Veux-tu demander à Mme Albert Wattinne quelle est la somme que donnent
les tantes, je crois que c'est 150 francs et tu les mettrais de ma part à
Madeleine qui l'emploiera comme elle voudra, car il sera trop tard à mon retour
pour m'occuper du cadeau moi-même. Les travaux touchent à leur fin, le puits est
terminé et semble donner bien de l'eau ; l'ouvrier de Brother ayant fait la
noce toute la semaine, je n'ai pas pu avoir l'eau dans la maison, ce sera pour
lundi prochain qu'on reprendra les travaux pour en finir. Il n'y a plus que la
roue du moulin à poser, et la salle de bain et les lavabos. Les tuyaux sont
posés partout. La façade est très jolie, blanche avec les encadrements bleus et
le toit rouge. Marie a pris les mêmes couleurs. Lucy a un fraise écrasé qui est
beaucoup moins joli que notre bleu. Je dois envoyer demain l'argent pour notre
passage à bord de la « Lorraine », soit 500 francs par place, ce qui fait le
billet à 1000 francs. Je passerai très probablement par Paris à mon retour, les
trains sont plus commodes et je ferai quelques achats pour l'hiver! Je compte y
rester le moins de temps possible, un jour ou deux. Au revoir, mon cher
Francis, je t'embrasse bien affectueusement, meilleures amitiés de tous tes
frères et soeurs. Ta Mère qui t'aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère
(1857-1918) Ferme Ste Marie, le 14 septembre 1907 Mon cher Francis, Encore
quelques jours à passer ici avant le retour, et c'est la dernière fois que je
t'écris! Jeudi à 10 heures nous embarquons sur le Météore ; Paul et Lucy nous
accompagnent jusque Montréal où ils ont quelques courses à faire, Montréal est
le Paris des Canadiens! Comme je te l'ai dit dans ma dernière lettre, je
m'arrêterai 2 jours à Ottawa pour l'exposition et pour conduire Robert chez les
Pères, je pense pouvoir repartir le samedi soir pour Montréal afin de passer 2
ou 3 jours avec Paul et Lucy. Je descendrai à l'hôtel Viger. Mardi soir je prendrai
le train pour New York, je descendrai à l'hôtel Lafayette où l'on parle
français et je demanderai à l'hôtel qu'on s'occupe de mes bagages, d'aller les
chercher au chemin de fer et de les enregistrer au bateau. Une fois sur le
bateau, c'est français et il n'y a plus de difficultés. Je ne sais encore si je
passerai par Paris, c'est probable. Je te télégraphierai en arrivant au Havre.
La semaine a été bien mauvaise comme temps, ce qui n'a pas empêché les fermiers
de travailler dehors à enlever les souches, près de la maison d'abord, puis
dans la prairie le long de la rue et dans toute la grande partie devant la
maison. Il y en avait d'énormes où il a fallu atteler les deux chevaux gris.
Lundi ils pourront labourer d'un bout à l'autre. Le moteur a scié aussi une
belle quantité de bois. Mr Ranger, notre voisin, celui qui a vendu sa maison à
Lucy, est venu dimanche avec sa femme passer la soirée avec nous. Il fait
revenir une certaine quantité de vaches laitières pour lui et nous allons en
prendre quelques-unes aussi ; en les faisant venir ensemble cela coûtera moins
cher de transport. Comme on fait le beurre maintenant, quelques vaches en plus
paieront bien. Mr Ranger a deux frères qui ont de grands troupeaux de vaches,
ils s'y connaissent et se chargeront d'acheter. Mr Ranger ira les chercher au
commencement d'octobre. Elles reviendront à 30 ou 35 piastres rendues ici. J'ai
été interrompu par Jacques qui voulait me montrer le distributeur de fumier en
marche avant que je m'en aille ; on l'a essayé avec un peu de fumier, il me
semble bien fonctionner. Leur ferme va être bien gérée, comme on dit ici,
j'espère qu'elle leur rapportera dans un an ou deux, elle avait été fort
négligée par les prédécesseurs. J'ai reçu enfin aujourd'hui les 3 colis de
France, la caisse de vaisselle est arrivée remplie de débris, le reste en bon
état ; je suis contente de pouvoir installer le tout avant mon départ. La
vaisselle de Marie a eu le même sort et je m'attendais à des dégâts, tout cela
n'avait pas grande valeur, heureusement. Au revoir, mon cher Francis, à bientôt
maintenant et en attendant, je t'embrasse bien affectueusement, tous tes frères
et soeurs se joignent à moi. Ta Mère qui t'aime E.M ----ooooOOOOoooo---- Lettre
de Lucy Mathon-Masurel (1884-1917) 1
9 décembre 1907 Mon cher Francis, Rien
qu’un mot, car j’ai tant de correspondance à faire
aujourd’hui qu’il faut que
je me presse ; mais je tiens quand même à te faire tous
mes souhaits pour 1908.
Que ta santé continue de même et que tu sois satisfait
pour tour les désirs.
J’ajouterai le souhait de te voir accompagner Mère dans
son prochain voyage
pour le Canada, nous serions si heureux de te revoir, nous
étions si désolés de
te voir partir au mois de mai ; toi-même était si content,
si gai ici que tu
faisais plaisir à voir, tu as du reste laissé excellent
souvenir ici et Mr
Desrocher est très flatté des cartes postales que tu lui
envoies, tu serais
donc reçu à bras ouverts partout ; rumine donc ce petit
projet, il n’est pas
mal du tout. La grande distraction de Ville-Marie, pour
l’instant, c’est le
patinage. Marie s’adonne de tout coeur à ce sport, elle a
pris quelques leçons
et espère savoir bientôt aller complètement seule ;
du reste elle s’en tire pas
mal, je crois qu’elle sera même assez gracieuse si elle ne
prend pas de défaut
en apprenant. Ecris nous encore de temps en temps. Tes lettres nous
intéressent
beaucoup. Je tâcherai du reste de t’écrire plus
souvent. Je t’embrasse de tout
coeur, mon cher Francis, et te retourne mes voeux (?), Paul se joint
à moi.
Lucy ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Jacques Masurel (1888-1951) Ferme
Ste
Marie, le 10 mars 1908 Mon cher François, J’espère
que tu ne m’en voudras pas
trop de ce long silence car, comme tu dois bien le supposer, notre vie
est
toujours bien occupée et le soir quand nous rentrons, les
fatigues de la
journée ne nous disposent pas beaucoup pour écrire. Tu
dois croire, comme je le
croyais aussi, qu’en hiver il n’y a rien à faire, je
t’assure pourtant que nous
ne nous sommes pas encore tournés les pouces. Il y a tout
d’abord tous les
soins à donner aux animaux, ensuite se faire la bois de
chauffage, charriage du
fumier, nous avons aussi été obligés
d’arranger la barn et le grenier car l’eau
gelait. Pour le moment nous faisons un hangar à bois.
L’hiver est très dur ici
cette année, et il était très difficile
d’empêcher l’eau de geler, voilà le
grand inconvénient du pays ; ainsi depuis huit jours le tuyau
qui menait l’eau
aux écuries et qui est à 4 pieds ½ dans la terre
est gelé, ce qui nous oblige à
charrier de l’eau avec un tonneau ; mais maintenant que nous
connaissons le
pays, nous n’aurons plus ces ennuis là car nous
protégeons plus nos tuyaux,
ainsi dans la maison, depuis que nous l’avons arrangé,
plus rien ne gèle. Dans
ma dernière lettre, j’ai parlé à Mère
d’un projet que j’étudie depuis longtemps
et qui est de faire une beurrerie. Je suis certain que cette industrie
nous
paierait très bien, car tous les fermiers sont bien
décidés à tenir des vaches
si il y avait une beurrerie. Mais le moment est arrivé, et si
nous nous ne le
faisons pas un nommé Sirard en fera une. Avec 1500 à 2000
piastres, on peut
faire une bonne petite beurrerie, on peut faire cela pour moins cher
aussi,
pour 700 piastres on en fait une, mais il vaut mieux faire quelque
chose de
bien avec une bonne eau pour conserver mieux le beurre en
été. J’espère que
Mère approuvera cela, en tous cas je vais acheter du bois car il
a beaucoup
baissé et ainsi, si nous nous décidions, nous aurions du
bon bois sec sous la
main, et au cas où Mère ne voudrait pas nous revendrions
le bois , ce qui sera
toujours une bonne spéculation. Si Mère nous autorise
à faire cela, sitôt les
semailles finies, je partirai en bas faire mon apprentissage dans une
bonne
beurrerie, puis quand Mère arrivera au Canada nous pourrions
bâtir afin d’être
prêts pour l’automne, à cette époque il
existe une grande baisse sur le prix
des vaches, je partirai alors du côté de Montréal
avec des personnes très compétentes
pour acheter des vaches laitières dont j’aurai pris la
commande chez tous les
fermiers. Comme je le disais à Mère, avant de bâtir
la beurrerie, nous
passerons un contrat avec les fermiers qui nous promettront de tenir
des
vaches. Mais je suis bien certain qu’ils ne se feront pas tirer
l’oreille, car
à tous bouts de champs ils me disent : « Pourquoi que vous autres qui avez de
l’argent vous ne faites pas un beurrerie, ça vous paierait bien plus que votre
ferme et puis pour nous autres, au lieu de vendre notre foin et de partir en
chantier pour gagner notre vie, on garderait des vaches et ainsi on vivrait
bien heureux sur notre terre auprès de notre femme et nos enfant ». Comme tu le
vois, nous rendrions en même temps un grand service au pays. Enfin Mère jugera
cela comme elle voudra. Dans ma dernière lettre, je demandais à Mère de nous
envoyer un ménage, mais je crois qu’une femme seule serai peut-être aussi bien
car l’homme au bout de quelque temps serait peut-être bien tenté de s ‘acheter
une terre et de nous plaquer là. Je te souhaite beaucoup de chance dans tes
concours hippiques cette année, surtout pas de mauvaise chute. J’ai appris que
tu exerçais 4 bons sujets pour le concours hippique de Paris. Tu nous ferais
grand plaisir en nous envoyant encore de temps en temps des photos, moi de mon
côté je vais me mettre à en faire et je t’en enverrai. J’espère que Charles
Prouvost viendra au Canada bientôt et que nous lui trouverons quelque chose à
Ville-Marie. Il sera meilleur homme d’affaire que les Mathon j’en suis certain,
car ces derniers ont été déjà deux fois sur un bien mauvais chemin. Ils ont
fait quelques amélioration dans leur gérance depuis leur inventaire, mais ils
feraient bien d’en faire encore. Ainsi, presque tous les commis du magasin ont la
clef, et le dimanche, à toute heure ils rentrent là dedans avec des amis. Je
suppose qu’ils sont honnêtes, mais s’ils ne l’étaient pas il leur serait bien
facile de voler tout le magasin... Quant à leur foin, ils en ont acheté
beaucoup plus que leur grange ne leur permettait d’en mettre, alors ils furent
obligés d’en laisser une certaine quantité dehors, qui fut un peu avariée. Ils
en ont vendu un peu jusqu’à présent, mais avec un très léger bénéfice, 1
piastre par tonne au plus. Quant à leurs pommes de terre, ils ont confié cela
au fils Bénard qui, ne s’y entendant pas du tout, a acheté des mauvaises pommes
de terre ; elles se sont gâtées et ils furent obligés de sacrifier une centaine
de poches qu’ils avaient payées 90 cents. Enfin, morale de tout cela, « il ne
faut pas courir 30 lièvres à la fois ». Jean est parti en chasse lundi à 25
milles d’ici avec un chasseur très expérimenté dans la chasse au chevreuil et
de l’orignal, j’espère qu’il ne reviendra pas bredouille. Monsieur Gaudet,
notre « engagé » est malade depuis deux jours, il a la grippe, aussi nous ne
sommes qu’à deux pour les travaux de la ferme... Je te quitte maintenant, mon
cher Francis, en t’envoyant la plus cordiale poignée de main. Ton frère qui
t’aime Jacques P.S. Embrasse Mère et Suzanne pour moi. ----ooooOOOOoooo----
Lettre de Mère (1957-1918) Hôtel Brevoort New York, 1 août 1908 Coin de la 5ème
avenue et de la 8ème rue Cable address, LAFBREVORT Mon cher François, Nous
avons débarqué hier soir vendredi à 7 heures après une traversée relativement
bonne. Le premier jour, parfait, le lendemain vers midi la mer a commencé à
s’agiter, Suzanne et moi avons mangé dans notre cabine, la mer est devenue de
plus en plus houleuse, le lundi presque tous les passagers étaient malades, il
n’y avait plus qu’une bonne vingtaine de vaillants (Charles était du nombre) à
la salle à manger. Puis le mardi cela s’est calmé et la fin de la traversée a
été très agréable. Nous avons mangé sur le pont une partie du temps et n’avons
paru qu’au dîner du commandant le jeudi soir, nous y avons bu la traditionnelle
flûte de champagne, du G.Mumm, et nous avons reçu comme souvenirs de la
traversée de très jolies coupe papiers, les messieurs avaient une chaînette à
breloque pour la montre. Les bonnes ont reçu des hoches. Comme passagers, il y
avait environ 120 en première classe, les secondes étaient au grand complet et
quelques centaines d’émigrants. Dans les passagers de 1ère classe il y avait un
peu de français, beaucoup d’anglais et d’américains, personne que nous ne connaissions.
Nous avons eu une cabine tout à fait confortable sur la pont, bien grande,
avec
deux fenêtres que nous pouvions ouvrir nuit et jour. Nous avions
une commode
avec un secrétaire pour écrire, j’ai pu
débarrasser ma malle en arrivant ce qui
est bien plus pratique. Il y avait encore, outre nos deux lavabos, une
grande
glace jusqu’à terre, enfin c’était
très bien. Notre garçon de cabine a été des
plus prévenants, nous apportant des fruits frais plusieurs fois
par jour, la
femme de chambre aussi, mais c’était sa 1ère
traversée et elle a été malade les
premiers jours ! La nuit de jeudi à vendredi et la
journée de vendredi nous
avons beaucoup souffert de la chaleur, même nous, avec nos
é fenêtres ouvertes.
Il y a des passagers de 1ère classe qui sont allés
s’étendre sur les canapés
des salons et à 4 heures du matin aux premières lueurs du
jour, on était sur le
pont. Malgré l’air qu’on a forcément par la
marche rapide du bateau, on avait
chaud ! Les messieurs allaient au fumoir où ils restaient en
manches de
chemise. Charles, Suzanne et moi sommes restés paresseusement
sur nos chaises
longues sur le pont pour voir les nombreux cachalots qui se sont
approchés du
navire. En approchant de New-York vers 2 heures nous avons
traversé un
brouillard assez intense, la sirène a marché, le navire a
ralenti, on s’est demandé
si on arriverait à temps pour débarquer ; au bout
d’une heure le brouillard
était dissipé, le temps était rafraîchi en
même temps, le bateau a remarché à
toute vapeur, on est arrivé à la santé dix minutes
avant le coup de canon
annonçant que le service est fermé. Enfin, vers 7 heures
nous débarquions. Il
ne nous a fallu qu’une heure pour avoir nos malles
rassemblées, plombées et
expédiées à Montréal, directement,
j’ai rarement vu autant de formalités qu’à
New York ! Nous allons partir ce soir par le train de 7 heures et nous
resterons à Montréal probablement jusque lundi soir car
je crois qu’il n’y a
pas de train le dimanche soir. J’ai reçu ici à mon
arrivée 2 lettres de
Ville-Marie, on nous y attend avec joie, on prépare à la
ferme un souper froid
pour notre arrivée, de façon à ce
qu’Amélie la cuisinière puisse aussi venir
nous chercher au bateau. M.et Mme Pierre Mathon et leurs filles sont
à
Ville-Marie depuis mercredi dernier. Tout le monde va bien
là-bas, on dit qu’il
y fait chaud aussi ! Je compte sur toi, mon cher Francis, pour
communiquer ces
nouvelles aux 2 bons-papas à qui j’écrirai en
arrivant à Ville-Marie, Je
t’embrasse bien affectueusement ainsi que Ninie et les enfants.
Meilleur
souvenir de Charles et de Suzanne. Compliments aux bonnes. Ta
Mère qui t’aime
E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie
19 août 1908
Mon cher Francis, Je viens de recevoir ta lettre du 6 et je t’en
remercie. Je
suis contente que tu aies gardé Jules, tu seras plus tranquille
qu’avec Isaïe,
et ainsi Jules reste ce qui doit lui faire plaisir. Charles nous a
quitté
dimanche, il doit s’embarquer demain et arrivera avant ma lettre,
il pourra te
donner de nombreux détails. Ici à la ferme tout va bien,
tes frères travaillent
toujours avec le même plaisir et le même courage, ils sont
en excellente voie.
Le lot vendu est resté vendu, c’est M. Bastien qui
l’a, quand je suis arrivé il
y avait déjà une grange et un petit bâtiment sur ce
terrain ! Les conditions
ont été changées, nous n’avons affaire
qu’à Bastien qui paie en 5 annuités,
intérêts à 6% et je prends un hypothèque sur
mon terrain. C’est beaucoup plus
simple et plus sûr. Jacques et Jean avaient fait changer tout
cela avant mon
arrivée ; ce lot a été vendu 2500 piastres, soit
500 piastres de bénéfice. La
terre défrichée est très bonne, mais ensuite
c’est le rocher et il y a beaucoup
de perte dans ce lot et il n’y a pas d’eau, ils ont aussi
calculé que ce lot
est sur Ville-Marie et aura à payer des taxes pour la ville,
tandis que les
autres lots sont dépendants du comté de Pontiac et
n’ont presque rien comme
taxes. Il leur reste encore plus que suffisamment comme terres à
cultiver, en
somme, après avoir tout examiné avec eux, j’ai
ratifié la chose. Il aurait
d’ailleurs été fort difficile de faire autrement,
c’était créer beaucoup
d’ennui, Mr Bastien en ayant pris possession et ayant construit. Je fais en ce
moment le relevé de leurs livres, ils ont tenu bien régulièrement leur livre de
caisse, puis dans quelques jours, quand j’aurai terminé, nous ferons un
inventaire de ce que vaut la propriété actuellement et à partir du mois de septembre
ou octobre, je leur avance quelques milles francs en banque et je les laisse
marcher à leur compte. J’aurai mon compte séparé en banque. Je te donnerai mon
aperçu d’inventaire dans ma prochaine lettre, cela me donne beaucoup de travail
de reprendre tous leurs comptes et je n’ai pas pu m’en occuper quand Charles
était ici. Jean est parti pour 3 jours avec Landreville et Lefebvre à la chasse
à l’orignal, c’est un chasseur enragé. Robert est occupé dans le bois à faire
un chemin qui le traverse dans toute la largeur pour pouvoir y mettre les bêtes
l’an prochain parce qu’on va resemer complètement la pâture qui est très maigre.
Hier Jacques a coupé l’orge avec la moissonneuse lieuse, en quelques heures
c’était fait. Pour l’avoine il faut encore quelques jours, le blé viendra
ensuite. La sécheresse à fait tort ; la paille est courte. Comme animaux il y a
les deux grises (elles ne sont pas pleines), 2 baies à Jacques, deux vrais
chevaux de fermier, et les 2 poulains qui sont bien changés depuis l’an
dernier. Pour l’hiver, on ne gardera que les grises, les chiens feront le
service de la baie pour porter le lait. Il y a 5 cochons, 11 moutons, 5 vaches
et 2 ou 3 bêtes à cornes, une trentaine de poules. Il y a maintenant tout
autour de la maison une jolie clôture, on a planté une ligne de planes et sur
la pente, de la maison au puits, c’est un verger... naissant... quelques pommiers,
pruniers, groseilliers. Le potager s’arrange ; dans la maison c’est maintenant
confortable, de l’eau partout, salle de bains, W.C. J’ai acheté un piano et une
bibliothèque pour le salon, je renouvelle les courtines, leur maison s’embellit
et on s’y trouve fort heureux tous ensemble, c’est dommage de ne pas t’avoir
aussi ainsi que Charles et Ninie. On a proposé à Charles l’affaire de Bastien,
vins, liqueurs, bière, etc... mais je crois que le pays ne plaît pas à Charles
et qu’il aurait de la peine à s’y faire. Nous n’espérons pas du tout le revoir
ici. Suzanne s’amuse très bien cette année, elle est plus heureuse que l’an
dernier. Elle va rentrer en classe le 7 septembre, ce pensionnat est très bien,
la supérieure vient des Etats-Unis, c’est une personne capable qui a beaucoup
voyagé et qui donnera tout de suite une excellente direction à la maison. Il y
a aussi des frères Maristes qui vont ouvrir une école pour les garçons. On a
construit cette année un palais de justice. La brouille est complète avec les
de St Laon, je n’ai même pas été leur rendre visite car ils ne se saluent même
plus. On s’en passe très facilement et il y a moins de potins, j’aime mieux
cela ! Mr Desrocher est venu avant hier passer la soirée avec sa femme, il a
gardé de toi un excellent souvenir. J’ai revu les Guay, Simar, Bellanger, Laur,
etc...tous m’ont fait le plus charmant accueil. et Mme Pierre Mathon sont
encore ici, chez Marie, Charles te dira les projets de Pierre Mathon, ils ne
parlent pas encore de leur projet de départ de Ville-Marie. Paul Mathon n’est
pas encore rentré, il est allé à Woodstock pour voir son associé M. Boyle qui
devait lui envoyer 150.000 frs pour leurs affaires et qui tarde un peu. Ils en
ont besoin. Ils ne m’ont pas encore remboursé les 20.000 frs qu’ils me doivent
et de plus ils ont emprunté encore 5.000 frs à Jacques peu de temps avant que
je n’arrive pour faire face à une échéance ; entre nous ils vont trop de
l’avant, ils me font peur. Je suis résolu à ne plus leur faire aucune avance,
je le leur dirai, et j’espère qu’ils vont pouvoir toucher ces 150.000 frs, ou
alors ! ! !... Je comptais que ces 20.000 frs avaient été remis à la banque à
mon compte, au lieu de cela ils en ont pris 5 de plus de sorte que je n’ai plus
qu’une somme insignifiante en banque, quelques milles francs, il doit rentrer
3.000 de prêts en novembre. Après cela je verrai
s’il faut que tu m’envoies
quelques milles francs. Le magasin Mathon a doublé en
façade, il est installé
comme les magasins de Montréal pour la caisse, c’est plus
luxueux que du temps
des Tobias mais les frais généraux doivent être
beaucoup plus importants et la
vente me semble diminuer. On dit que c’est la crise et que tous
sont dans le
même cas. Donne de mes nouvelles aux deux bons-papas, je leur
écrirai la
semaine prochaine. Je n’ai reçu aucune nouvelle de
bon-papa Jonglez. Je
t’embrasse affectueusement Ta Mère qui t’aime E.M.
Amitiés de tous tes frères
et soeurs et bons baisers à Ninie, Charles et tous les enfants.
Compliments aux
bonnes, Henri, Marie , Charles et Jules. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de
Mère
(1857-1918) Ville-Marie 27 août 1908 Mon cher Francis, Je
réponds à ta lettre
du 10 août, où tu me parles de la visite de Mr Mathon chez
bon-papa François et
de la mauvaise impression qu’elle vous a faite. Je puis te
rassurer
complètement, Mr Mathon me semble bien exagéré
dans ses appréciations et s’il y
a eu un peu de trouble avec une seule famille de Ville-Marie, il y a
contribué
en excitant plutôt, et la lettre qu’il a écrite a
été le bouquet. Il a tort de
s’en vanter, il aurait mieux fait de ne pas
l’écrire. Elle a entraîné une
brouille complète avec les de St Laon, ils ne se saluent
même plus, et une
réconciliation me semble difficile après une telle lettre
où M. Mathon termine
en leur témoignant son plus profond mépris. Les de St
Laon restent polis pour
nous et me saluent, mais je ne suis pas allée rendre visite. Mme
de St Laon
n’était pas d’un commerce agréable,
c’est une femme malade, neurasthénique qui
a un peu la manie de se croire persécutée. Elle a
été cause de beaucoup de
petits potins et cette bonne Mme Guay a été aussi
mêlée à tout cela, on lui
prête des propos qu’elle n’a pas dits, c’est
pourtant une personne bien
indulgente qui ne critique jamais personne. Depuis que les de St Laon
se sont
retirés de la société de Ville-Marie, il n’y
a plus de potins, l’accord règne
entre tous et je t’assure que les relations sont fort
agréables. Tout le monde
m’a fait le plus charmant accueil et on aime bien les enfants !
Pour tes frères
qui font un métier de domestique, ils commencent à se
débrouiller pa mal du
tout, ils se forment, ils prennent l’habitude du travail, quand
ils auront
acquis un peu plus d’expérience, avec la connaissance
qu’ils auront du pays et
des besoins du pays, ils pourront entreprendre autre chose avec leur
ferme.
Pour le moment, n’oublions pas que nous avons à faire
à des jeunes gens de 17,
18 et 20 ans. Ils ont fait leurs frais l’an dernier où la
récolte a été très
mauvaise et ils ont eu beaucoup de temps perdu pour remettre la ferme
sur un
bon pied. Je vais arrêter leurs écritures fin août.
J’ai fini de retranscrire
toutes leurs opérations au grand livre. Pour les Mathon, ils ont
une bonne
affaire entre les mains, je ne crains qu’une chose c’est
qu’ils veulent trop
vite développer et qu’ils se trouvent pris par le manque
de capitaux. Leur
associé, M. Jo Boyle qui devait leur envoyer des capitaux, ne
peut leur en
donner en ce moment, il est en procès pour une mine d’or
qu’il possède au Yukon
et dont un autre revendique aussi la propriété. Il a
gagné son procès mais il y
en a de petits à côtés qui l’empêchent
de retirer l’argent déposé au sujet de
cette mine. Les renseignements pris de plusieurs côtés sur
M. Boyle sont bons,
sa mine d’or lui rapporte beaucoup. Mr Laur , le banquier, a bien
voulu
accorder un certain crédit à André, en attendant
l’argent de Jo Boyle ; ils ne
pourront me rembourser mes 20.000 frs plus 5.000 avancés par
Jacques pour faire
face à une échéance que quand ils auront
touché, je me trouve donc avec 200
piastres devant moi, veux-tu me faire envoyer
l’intérêt de mes obligations
quand ce sera le moment de toucher ainsi que le reste d’argent
liquide que j’ai
chez Masurel frères. Au mois de novembre, il y a à
toucher 500 frs d’Anipé
d’Egypte et 800 frs que tu me dois pour
l’intérêt des 20.000, cela te servira
pour mes jardiniers. Ville-Marie s’est augmentée cette année d’un magnifique
pensionnat de jeunes filles, l’ancienne école de filles est transformée pour
les garçons, il est arrivé quatre frères Maristes. On construit un palais de justice,
il y a 2 ou 3 nouveaux magasins et plusieurs maisons construites depuis l’an
dernier. Pour un village de 800 à 900 habitants ce n’est pas mal. De plus la
ville fait amener l’eau d’une source dans le village. La ville a aussi
entrepris l’entretien des routes, on taxera les habitants pour tous ces frais.
On s’attend à des taxes assez élevées cette année et Mr Guay me disait que les
garçons avaient fait une excellente opération en vendant le lot qu’ils avaient
sur Ville-Marie et en n’en gardant que deux qui dépendent du comté de Pontiac,
il leur reste bien assez de terres comme cela. Tu vois que Ville-Marie s’est
bien développé quoi qu’en dise Mr Mathon. Les gens sont bêtes ! Il y a ici des
gens intelligents, d’autres qui le sont moins, ils ont l’esprit moins cultivé,
certainement, mais ce n’est pas une raison pour les déclarer tous bêtes ! Les
curés odieux, avec leur esprit de domination, le P. Chévrier et Mr Mathon ne
sympathisaient pas du tout ; le P. Chévrier représente tout le clergé, ils sont
tous odieux. Le P. Lambert et le P. Beaudry sont très aimés de tous et beaucoup
plus larges d’idées que le P. Chevrier. Ici le Canadiens sont habitués ainsi,
nous ne pouvons pas avoir le prétention de tout faire changer pour nous, on
nous laisse bien tranquille, le Père Chevrier a plusieurs fois fait l’éloge des
Français et témoigné sa satisfaction de nous avoir à Ville-Marie, laissons-le
agir à sa guise avec ses Canadiens. Le pays n’est pas triste, il est même joli
en cette saison. Enfin quant aux gosses, ils se font parfaitement bien
comprendre, ils parlent comme tous les enfants et emploient quelque fois des expressions
du pays, mais c’est tout. Mr Mathon n’est d’ailleurs pas un bon-papa fort
tendre et il malmenait tellement le pauvre Toto que ce dernier l’avais pris en
grippe et lui demandait souvent quand il allait partir. Monsieur Mathon a dit à
ses ménages que quand ils viendraient à Roubaix ils pourraient descendre chez
lui mais sans enfants !... Sois parfaitement tranquille nous sommes heureux
tous et je suis persuadé qu’il y a de l’avenir dans ce pays mais il faut aller
doucement et prudemment. Mr et Mme Pierre Mathon sont repartis aujourd’hui ; Mr
Pierre Mathon rêve de grandes affaires , il a commencé par manger de l’argent
au lieu d’en gagner. Il part le 11 septembre pour Paris, seul, il va tâcher de
faire prendre des actions sur la Nipissing, une excellente mine qui se trouve
de l’autre côté dans l’Ontario, il prendra un bénéfice sur chaque action qu’il
placera. S’il trouve des amateurs, c’est très bien ; mais l’affaire Rochette a
dû dégoûter pas mal de gens de placements à l’inconnu. Mme Pierre reste à
New-York avec ses petites filles. Toute le récolte est faite, elle sera rentrée
la semaine prochaine ; elle est belle malgré la grande sécheresse, mais il y
aura très peu de paille. Quand on aura battu le grain je te donnerai les
résultats. Jacques commence à labourer chaque jour. Jean et Robert s’occupent
des clôtures entre Mr Bastien et nous, ils amènent les piquets du bois et il y
a déjà la partie de la route au potager qui est faite, on met de la clôture
Maillet, ce sont des treillis carrés en fil galvanisé et peint. Aucun animal ne
peut passer à travers. Jacques a la représentation de cette maison et cela nous
revient ainsi beaucoup moins cher. On supprime tous les fils de ronces qui sont
dangereux pour les animaux. Le potager était fort négligé, j’ai pris Mr
Phalempin un mois pour le remettre en état. Tout pousse parfaitement ici quand
on veut s’en donner la peine. Marie et Lucy ont un potager qui ne doit rien à
celui de Mouvaux, elles ont de tout. Tomates, artichauts, salade, etc... Voilà
une bien longue lettre, mon cher Francis, je ne peux pas t’envoyer de photos
maintenant, on n’en a pris que quelques unes. André a emporté ce matin
l’appareil pour prendre quelques vues au lac des Quinze, il est allé y conduire
Monseigneur Lorrain. Les affaires l’appellent souvent au lac des Quinze où il a
établi un poste pour les sauvages. La semaine prochaine il part avec Mr Lapérière
au lac Abitibi toujours pour ses postes. Jean les accompagnera, ce sera pour
lui un voyage intéressant et il pourra s’y adonner à son plaisir favori, la
chasse. S’il le peut, il ira jusqu’à la baie d’Hudson. Jacques n’a pas les
mêmes goûts, sa distraction c’est la flûte, il va entrer dans la fanfare de
Ville-Marie comme petite flûte, c’est une société qui se forme, ils sont une
quinzaine. C’est le Père Lambert qui l’organise. Avant hier soir, la fanfare
est allée au devant de Monseigneur au quai. Jacques n’avait pas encore reçu sa
petite flûte, il n’a pas pu y aller. Dimanche, grande sortie à St Placide,
Jacques y sera, un break viendra les chercher pour aller donner une audition
aux habitants de St Placide qui vont jouer une comédie. Je crois que cela ne
vaudra pas les Français. Robert partage les goûts de Jean et a en plus une
passion pour sa hache, il est toujours prêt quand il s’agit d’abattre et de
bûcher, il est extraordinaire comme résistance, il est infatigable ! Je
t’embrasse bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se joignent à moi.
Tes cartes postales ont fait beaucoup de plaisir, on va te répondre. Ta Mère
qui t’aime E.M. P.S. Compliments aux bonnes, à Henri, Marie et Jules.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Jean Masurel (1990-1917) Ferme Ste Marie, le 28
Août 1908 Mon cher Francis, J’ai reçu avec beaucoup de plaisir ta charmante
carte postale il y a quelques jours. Je ne voudrais pas partir pour un si long
voyage à travers bois sans te remercier auparavant. Je compte quitter la
civilisation lundi matin avec Pit et André ; nous nous rendrons au lac des
Quinze en voiture et de là nous prendrons la voie des lacs jusqu’à l’Abittibi,
en passant par la rivière ennuyante, le lac, les îles etc... Si tu as une carte
assez complète du North Canada, tu verras fort bien le trajet que nous devons
parcourir. Je suis fort content de faire cet aventureux voyage qui me fera
connaître en même temps une grande partie du pays. Je ne sais pas si André
trouvera la vie des bois aussi agréable que moi, lui qui est maintenant trop
habitué à son confort et à son petit dessert à chaque repas. Enfin je te
donnerai le compte rendu de ce voyage lors de mon retour, ce qui nous conduira
à trois semaines d’ici probablement. Nos récoltes sont déjà presque terminées ;
nous n’avons plus que deux ou trois charges d’avoine à mettre en grange. Le
temps nous favorise beaucoup et tout le grain a été rentré absolument sec
jusqu’à présent. Quel changement avec l’an passé ! Tous nos animaux sont en
excellente santé ainsi que nous même et notre personnel. Nous avons fait défricher
du terrain cette année et nous avons encore deux individus qui y travaillent ;
malheureusement avec leurs pipes ils ont fait prendre le feu aux tas de
branches sèches et nous craignons que notre bois de chauffage, mis en tas à cet
endroit, ne brûle avec le reste. Mais comme ce bois est encore vert, peut-être
que le feu ne s’étendra pas jusque là. Nous avons pris des photos de la moissonneuse
et d’une charge d’orge ; nous allons les faire développer et nous t’en
enverrons. Allons, mon cher Francis, je vais te laisser maintenant afin de répondre
un petit mot à Maurice qui est impatient de recevoir de nos nouvelles. Une
excellente poignée de main. Jean ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère
(1857-1918) Ville-Marie 9 septembre 1908 Mon cher Francis, Nous venons d’avoir
deux jours de fête, lundi 7 qui est la fête du travail dans tout le Canada, et
hier matin c’était la bénédiction et l’inauguration du pensionnat de jeunes
filles et l’école des frères Maristes, par Mgr Lorrain. Nous avons été passer
notre après-midi à Ville Marie pour voir les différents jeux organisés sur une
grande pelouse. La fanfare dont Jacques fait partie a joué plusieurs morceaux.
Il y avait des courses, des sauts en hauteur et en longueur, des courses aux
pommes de terre etc. Robert qui s’est rappelé ses succès de courses à Maredsons
a été tenté de s’essayer encore une fois et sans aucune préparation ni
entraînement, il est arrivé bon premier a une course de fond. Pour le saut en
hauteur, il a été second. Son premier prix lui a valu une belle pipe en écume.
Hier mardi tout le village était encore en fête ; a 10 heures on se rendait à
la grotte de Lourdes musique en tête pour une grand messe en plein air. A midi
dîner chez les soeurs au pensionnat avec Mgr. Il y avait une dizaine d’ecclésiastiques
à la table de Mgr et 2 tables avec les notables de Ville Marie. Mr et Mme
Aubin, Mr et Mme Guay, Mr et Mme Desrocher, Tremblay, Lévêque, Bastien, les de
St Laon, Paul, Lucy, moi et d’autres encore. Le dîner était servi par des
jeunes filles. Comme menu un plat de viande avec 2 légumes, jambon et salade de
légumes. Puis des tartes de toutes les sortes, des blancs mangers etc., de
l’eau à discrétion, et du café ou du thé. Mgr a eu, je crois un menu un peu
plus important. A 2 heures avait lieu la bénédiction des 2 écoles, on s’est
réuni à l’église pour arriver en procession, toujours avec la musique, il y a
eu un sermon en plein air d’abord, puis la bénédiction. A 4 heures, Mgr prenait
le bateau le Météore pour partir à Hayleybury. La musique l’a accompagné sur le
bateau jusqu’à la baie Martineau. Là les musiciens sont descendus et ont repris
le bateau qui venait de Témiscamingue. A Ville Marie ils sont allés donner une
sérénade au juge Bellanger en visite chez les Bellanger que tu connais. C’est
un homme de 83 ans à qui on en donnerait 60. Il a remercié par un joli petit
speach et a donné 10 piastres pour la caisse de la musique. Puis ils sont allés
au presbytère jouer un morceau, le P. Chevrier les a beaucoup remerciés de leur
concours et leur a offert des cigares et du vin. C’est le P. Lambert qui a
organisé la fanfare, il fait sa partie comme les autres. Jacques est rentré
vers 7 heures enchanté de sa journée. Aujourd’hui on se remet à l’ouvrage avec
entrain. Jacques est parti au quai chercher des clôtures, il devrait en même
temps déposer Suzanne en classe. Robert est au bois où il abat avec ardeur.
J’ai terminé le relevé de tous les comptes, ils ont bien tenu compte de toutes
leurs recettes et leurs dépenses, j’ai pu reconstituer leur avoir ; en le classant
par articles au grand-livre, c’est maintenant très-net et très-clair et l’an
prochain nous pourrons faire un inventaire sérieux. La culture cette année leur
a donné de quoi nourrir leurs animaux, mais ils avaient eu leur ferme fin mai
et ont dû semer trop tard. Voici ce qu’ils ont gagné sur leurs animaux : Vaches
: Ils en ont repris pour 90 piastres ils en ont maintenant pour 160 piastres et
ils ont vendu pour 186 piastres au boucher puis pour 209.34 de beurre et de
lait. Porcs : Ils en ont pour 65 piastres et dans le courant de l’année ils se
sont fait pour 108.15 de bénéfice. Moutons : Ils en ont pour 50 piastres et ont
gagné 57.94 Basse-cour : Ils ont pour 15 piastres et on gagné 21 piastres sur
la volaille et 39 piastres sur les oeufs. Tous ces comptes seront mieux établis
l’an prochain, car on saura ce que la culture aura fourni à chacun des comptes
pour la nourriture et le prix de revient sera exact. Le mouton paraît être d’un
très bon rapport, il ne demande pas de soin et on l’hiverne peu de temps
pendant lequel on le nourrit de paille de pois. Les pois servent à faire la
moulée pour les cochons. Ainsi on a commencé par acheter 6 moutons pour 24
piastres et par la multiplication le troupeau vaut maintenant 50 piastres et on
en a vendu pour 57 piastres 94. De plus le mouton fait beaucoup de bien aux
terres, qu’il amende et qu’il débarrasse des mauvaises herbes. Voici maintenant
ce que m’a donné le relevé des comptes, je te l’inscris sur une feuille
séparée. J’ai enfin reçu aussi la note de M? Guay pour le contrant de vente et
le certificat du receveur de l’enregistrement constatant qu’il n’y a plus
aucune hypothèque sur la propriété. Les frais sont moins élevés qu’en France
j’en ai pour 27piastres 40. Les Mathon ont une très bonne commande, en ce moment,
pour l’approvisionnement des hommes qui font l’aqueduc pour amener l’eau de la
source. C’étaient Bellehumeur et de St Laon qui devaient livrer mais le jour de
la fête ils n’ont rien porté pour le souper des travailleurs qui n’ont rien eu
à manger. Le piqueur est venu aux magasins Mathon, Paul a pris la commande et à
5 heures du matin il envoyait 2 chevaux avec un chargement de provisions. Il y
a 20 hommes à nourrir pendant 2 ou 3 mois et c’est du payement comptant. Leurs
capitaux ne sont pas encore arrivés, ne manque pas de m’envoyer l’intérêt de
mes obligations et ce qui me reste au bureau. Je t’embrasse affectueusement. Ta
mère qui t’aime, E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie, 18 septembre 1908 Mon cher Francis, J’ai reçu ta lettre du 2 courant,
tu me dis que Charles et Ninie sont à Paris et que peut-être ils iront jusque
Vire ; je souhaite vivement que Charles puisse trouver une bonne affaire, sans
tarder, car il ne peut pas vivre seulement avec les rentes qu’il a ! Le Canada
n’a pas plus à Charles, aussi il n’a pas cherché à trouver quelque chose ici et
nous ne l’avons pas du tout influencé, car pour s’expatrier il faut le faire de
bon coeur. Ses nombreux voyages l’ont habitué a un confortable et une existence
agréable qu’on ne peut pas trouver ici. Il y avait une affaire qu’on dit la
meilleure de Ville-Marie, et qu’on a proposé à Charles, c’est celle de Bastien,
le marchand de vins, bière et liqueur. Jacques a eu l’occasion de parler il y a
quelques jours au commis des Bastien qui vient de le quitter pour entrer comme
gérant chez Boyer et il disait que Bastien faisait beaucoup d’affaires et tout
au comptant, que c’était très bon ! Pour les Mathon, rien encore de leur
associé ; Mr Lapérière est en ce moment à Detroit et il compte rapporter
l’argent. Espérons que cette fois sera la bonne et que cette leçon leur
profitera pour l’avenir. Je crois à l’honnêteté des associés, mais Mr Boyle qui
a une mine d’or qui lui rapporte beaucoup ne peut rien toucher tant que son
procès au sujet de cette mine ne soit complètement terminé... Il a gagné, mais
il a encore un ou deux petits procès à finir, paraît-il ! Envoie-moi au
commencement d’octobre l’intérêt de mes obligations et ce qui me reste d’argent
au bureau, cela me suffira pour un moment. Nous avons une sécheresse qui n’a
pas l’air de vouloir cesser, le puits de la maison est épuisé, celui des
granges le sera bientôt aussi, les garçons vont faire eux-mêmes un puits
artésien et les gens du pays ont donné le conseil de demander à Mr Wilcott de
venir avec une branche de coudrier chercher les endroits où il y a de l’eau. Mr
Wilcott est venu sitôt le dîner et j’ai été voir comment il opérait, car je
n’avais aucune confiance. Il prend une branche de coudrier en forme de fourche,
il prend les deux extrémités dans chaque main en mettant la pointe en haut. Il
se promène ainsi aux endroits où on voudrait avoir de l’eau. Quand il y a de
l’eau la pointe s’incline un peu à la fois et se tourne tout à fait vers la
terre, avec une telle force que vous ne pouvez pas l’en empêcher. J’étais fort
incrédule, mais j’ai dû me rendre à l’évidence ; Jacques a tenu la baguette,
Amélie aussi, le même effet s’est produit. On a de l’eau, d’après ces
indications, dans le potager, aux granges près de la porcherie, dans le bois où
on voudrait aussi mettre de quoi abreuver les animaux. Maintenant il s’agit de
forer pour voir si la baguette a dit vrai. Je te dirai plus tard. Toutes les
récoltes sont battues et mises en grange. Le grain est superbe, la sécheresse a
nui à la quantité mais pas à la qualité. Avant de terminer ma lettre, je veux
t’offrir mes bons souhaits de fête de St François et ceux de tous tes frères et
soeurs qui pensent bien à toi et ne t’oublient pas. On se réjouit à la pensée
de te voir probablement l’an prochain. Je t’embrasse bien affectueusement pour
eux et pour moi. Ta Mère qui t’aime E.M. Compliments à Zoé, Elodie, Jules,
Charles, Henri et Marie. Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie, 20 septembre
1908 Mon cher Francis, Les Mathon viennent de repartir avec leurs enfants après
une bonne journée de dimanche passée à la ferme !
Cet après-midi nous avons
tous été essayer la baguette de coudrier pour trouver
l’eau, c’est vraiment
curieux, quand la baguette est au dessus d’endroits où il
y a de l’eau, on ne
peut pas l’empêcher de se retourner complètement
vers la terre, même en
employant toutes ses forces. Paul et Lucy en ont fait
l’expérience tous les
deux. Quant à Marie et moi, je ne sais pas pour quelle raison
elle ne marque
pas avec nous. Les garçons ont essayé de creuser à
l’entrée du bois à un
endroit indiqué par le baguette, ils sont à 9 pieds du
sol, l’eau arrive déjà,
ils vont continuer demain. Lundi matin, J’ai été
interrompu par le souper, je
reprends ma lettre pour pouvoir l’envoyer par Jacques tout
à l’heure quand il
conduira Suzanne en classe. Marie m’a dit hier que Mr Mathon
devait lui envoyer
une caisse de vieux livres, veux-tu, au reçu de cette lettre,
téléphoner à Mr
Mathon pour lui demander s'il veut bien joindre à son envoi
quelques livres que
tu lui enverras et que ces dames voudraient avoir. C’est la
collection des
livres d’Imbert de St Amand que tu trouveras à la
bibliothèque, s’il y a
quelques autres ouvrages sérieux du même genre tu peux les
mettre aussi. Ces
sera pour nos longues soirées d’hiver. Le temps est
toujours beau et sec, le
baromètre excellent, quand aurons-nous la pluie ? Les
bêtes sont dehors jour et
nuit comme en plein été, chevaux aussi, c’est une
économie d’avoine. Je n’ai
pas le temps de t’en dire davantage, je t’ai
d’ailleurs écrit une longue lettre
avant hier. Le but de celle-ci était de te demander les livres
avant que Mr
Mathon n’ait fait son envoi. Je t’embrasse bien
affectueusement, mes amitiés à
toute la famille. Compliments aux bonnes. Ta Mère qui
t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo----
Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie, 25 septembre 1908 Mon
cher Francis, Je
réponds à ta lettre du 10 septembre ; j’en recevais
une de Ninie par le même
courrier me faisant part de leurs projets pour la Normandie.
Peut-être à l’heure
qu’il est sont-ils déjà propriétaires.
N’aurait-il pas été préférable, si
c’était possible de commencer par louer pour un bail de 3
ans, afin de voir si
ce genre d’existence leur plaira et sera assez
rémunérateur pour payer leurs
frais. Il y a dans l’élevage et l’agriculture un
apprentissage à faire et une
expérience qu’on acquiert souvent à ses
dépens ! Charles est observateur, il se
fera vite, je l’espère, à ce nouveau métier
! Nous avons trouvé de l’eau après
2 ou 3 essais infructueux, on trouvait toujours la roche à une
certaine
profondeur ; aux endroits indiqués par la baguette de coudrier
il y avait
quelques veines d’eau mais pas autant que nous désirions.
Enfin, dans le bas de
la côte, près du creek, à 127 pieds de profondeur
nous avons eu de l’eau, hier.
Aujourd’hui on pose les tuyaux et pour midi, notre puits
artésien fonctionnera
et ira déverser son trop plein dans le creek qui est à
sec. Les bêtes pourront
aller y boire et cela ménagera le puits creusé aux
écuries. Les puits artésiens
sont inépuisables, paraît-il. Nous étions bien
contents hier d’avoir enfin
trouvé de l’eau et il a fallu qu’un petit ennui nous
arrive ; Lady s’est
blessée sur le tranchant d’une hache, dans le hangar
à bois. Elle y était
entrée avec Jenny qui s’est mise à ruer. Lady a
voulu se garer et est allée
donner contre la cloison où il y avait un fer de hache sur une
tablette, par le
choc elle l’a déplacé et a été
blessée sur le gros de la cuisse, une entaille à
mettre les deux mains dedans ! Nous étions tous là pour
le dîner quand c’est
arrivé. On l’a lavée et on l’a
protégée avec un linge puis rentrée à
l’écurie.
Comme il n’y a pas de vétérinaire à
Ville-Marie, Jean et Robert ont vite mangé
un morceau et sont partis avec le gazoline d’André
chercher le vétérinaire
d’Haileybury. Ils l’ont ramené, il était 9
heures moins le quart. Il a examiné
la blessure et a immédiatement déclaré
qu’elle était très grave parce que l’os
a été atteint et un ou deux muscles, il a retiré
des éclats d’os, bien nettoyé
la plaie et l’a recousue mais il ne garantit pas de pouvoir la
remettre. Jean
est fort triste, il aime ses grises comme des enfants, et il avait très peur
hier soir que le vétérinaire ne lui conseille de l’abattre. Il a repris un peu
d’espoir aujourd’hui, je crains que ce ne soit fort long à guérir, si elle
guérit ! Le vétérinaire a logé ici et est reparti ce matin par le bateau de 9
heures. Il reviendra lundi. C’est un anglais qui ne parle pas un mot de
français, mais Jacques et Jean le comprennent et lui parlent anglais. Le temps
est toujours beau et chaud, nous sommes obligés de laisser encore nos fenêtres
ouvertes la nuit, le 25 septembre, le baromètre n’indique pas encore de
changement. De temps en temps il y a un orage, alors on sort tous les ustensiles
pour recueillir l’eau : cuvelles, seaux, etc... mais la pluie ne dure jamais,
c’est juste pour abattre la poussière. Suzanne est fort contente en classe et
plutôt que de prendre une maison à la baie, je la mettrai en pension du lundi
matin au vendredi soir. Le samedi et dimanche c’est congé, elle reviendra ici.
Les pensionnaires restent au couvent le samedi et le dimanche, mais je crois
bien que j’obtiendrai de la supérieure de mettre Suzanne dans ces
conditions-là. Mr Lapérière est rentré de son voyage, il n’a pas rapporté
d’argent mais encore une promesse. Le procès doit être terminé lundi et après
l’argent commencera à arriver...... Au revoir, mon cher Francis, je t’embrasse
bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se joignent à moi. Compliments
aux bonnes et à tout le personnel. Ta Mère qui t’aime. E.M.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie, 1er octobre 1908
Mon cher Francis, Je viens de recevoir ta lettre du 17 septembre et j’en avais
reçu une de Charles quelques jours avant, me parlant de tous ses projets, je
lui ai répondu hier. Cette propriété ne me semble pas d’un prix trop élevé si
la terre est en bon état ; les calculs de Charles ont fait naître quelques
réflexions de nos jeunes fermiers, réflexions que j’ai transmises à Charles
comme il me le demandait. Tu compares le prix de la Normandie à celui du Canada
et tu trouves que c’est relativement pas cher là-bas. Nous avons eu 300 acres,
une maison, des granges, des animaux et tout le matériel pour 52.000 ; il y a
un tiers défriché soit 100 acres et non pas 20 acres . Les bois ont leur valeur
et payent le défrichage, nous avons fait une bonne affaire qui rapportera quand
elle sera bien mise en valeur. Cette terre neuve qu’on défriche ne demandera
pas d’engrais avant un certain temps, et nous pouvons espérer que le
développement du pays augmentera la valeur des terrains. Le frère Maufait est
allé à Québec avec Mr Guay pour obtenir du gouvernement un chemin qui irait de
Ville-Marie rejoindre le Transcontinental. Le frère Maufait sollicite
l’entreprise du chemin de fer, il emploierait ainsi une centaine de paires de
chevaux et quantité d’hommes. Il devait rentrer hier soir ; Mr Guay qui est
revenu avant lui disait qu’il avait beaucoup d’espoir. J’espère que
l’inventaire sera bon et que tu pourras commencer à mettre un peu d’argent de
côté, il faudrait quelques bonnes années pour pouvoir penser à te retirer en
Normandie, on ne fait pas en élevage et en agriculture les bénéfices qu’on
réalise en industrie et il faut avoir un revenu qui vous permette de vivre sans
trop compter sur les bénéfices. Si tu réalises un jour tes projets, je ne crois
pas que tes frères aimeraient l’un ou l’autre à profiter de ta place. Pour le
moment ils ne voudraient en entendre parler à aucun prix, mais à l’avenir ils
pourraient raisonner autrement ! Le vétérinaire est revenu aujourd’hui pour
Lady, il a trouvé la plaie très belle et espère que dans quelques semaines ce
sera fini. Jean est bien content. Jacques se met aux labours avec sa team, s’il
ne peut pas faire seul, on tâchera de louer un cheval pour labourer avec Doll,
car il y a beaucoup à labourer cette année. On va retourner la pâture le long
de la route, on laissera comme pacage toute la partie du crique et le bois avec
la terre neuve qu’on millera. J’espère que tu m’as envoyé mon argent, je suis à
découvert en banque de 10 piastres et ici on ne vous fait
pas d’avance ; il
faudra que j’aille voir Mr Laur pour lui demander du
crédit jusqu’à l’arrivée
de mon argent, à moins que les Mathon ne reçoivent cette
semaine, comme on leur
a promis, une partie de l’argent qu’ils attendent. Je reste
ici à la ferme
l’hiver et je mettrai Suzanne en pension du lundi au vendredi.
Cette semaine,
le temps étant très mauvais, elle a couché chez
Marie qui ne demandait pas
mieux que de l’avoir en l’absence d’André. Ce
dernier doit revenir fin de la
semaine de l’Abitibi. Il fera un voyage désagréable
par ce vent et cette pluie
dans son petit canot de sauvage. Il en a pour plusieurs jours et doit
camper
sous la tente dans les bois, la nuit. Le puits artésien
s’est déjà bouché
plusieurs fois ; la force de l’eau amène de gros graviers
qui bouchent le bas
du tuyau et alors il faut tout enlever, les 130 pieds de tuyaux, mais
on ne se
décourage pas et on recommence. Les autres puits redonnent
depuis les pluies,
tout va rentrer dans l’ordre. On met des photos sur papier, mais
on attend le
virage pour pouvoir t’en envoyer, tu pourras voir l’ours
tué par Jean, mais ne
sois pas étonné si cela tarde un peu, le photographe qui
est en même temps
coiffeur, encadreur, etc... n’est jamais pressé. Je lui
avais donné 2 gravures
à encadrer à mon arrivée, il a seulement
reçu maintenant les échantillons de
baguettes. Au revoir, mon cher Francis, je t’embrasse bien
affectueusement,
tous tes frères et soeurs se joignent à moi. Ta
Mère qui t’aime E.M.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Marie Mathon-Masurel (1882-1954) Le
Sourire, 2
octobre 1908 Mon cher Francis, Voilà bien longtemps que je me
propose de
t’écrire sans jamais mettre mon idée à
exécution. J’ai pourtant bien souvent
des remords à cause de toi qui es toujours plein
d’attention pour les Canadiens
; jamais tu n’oublies ma fête dans tes lettres, on sent que
malgré
l’éloignement tu nous portes un vif intérêt ;
nous en sommes très touchés et je
t’assure, mon cher Francis, que nous pensons de notre
côté beaucoup à toi et
que tu arrives souvent dans nos conversations. Je vais tâcher de
te mettre au
courant des récents événements. Tout d’abord
tu sais que le père Mathon a
exagéré énormément et que nous en avons
tous été très mécontents, aussi je lui
ai écrit sur le sujet une très gentille lettre ; il
m’a répondu qu’on avait
très mal interprété ses paroles et que dans tout
ce qu’il avait (dit), il n’y
avait rien qui puisse nous faire tort. Tu sais sans doute que mon mari
est
parti dans l’Abitibi à la fin août et que je
l’attends d’un jour à l’autre. Tu
es aussi au courant par Mère que nous montons un poste pour la
fourrure, c’est
même dans cette affaire que nous avons tout notre espoir. Nous
pensons garder
le store de Ville-Marie tel qu’il est, en faire notre centre
d’approvisionnement et garder le plus d’argent possible
pour les fourrures.
Notre associé, M.Lapérière, qui est en même
temps notre ami intime, est un
homme d’une quarantaine d’années, très froid,
très pondéré et très calé dans la
partie fourrure ; nous avons eu sur lui au début les meilleures
renseignements,
à ce moment il n’était pas question
d’affaires, c’était au point de vue
relation. J’ai eu plusieurs lettres d’André par des
sauvages qui font la route
de l’Abitibi aller et retour pour porter notre marchandise.
André dit qu’il est
très content de voir les choses par lui-même, qu’il
travaille assidûment à
chéquer la marchandise et à mettre la comptabilité
sur pied ; mais il dit qu’on
ne peut se faire une idée de ce que ces voyages sont durs ; il
aura dormi
pendant trois semaines sous la tente sur trois malheureuses planches et
pour
nourriture du bacon, des haricots et quelquefois le produit de leur
pêche.
Pauvre gros Drédré, il va me revenir bien maigri et
très probablement avec un
fameux rhume car depuis lundi il fait un temps atroce, du vent et de la
pluie,
mais depuis hier il gèle ; hier soir nous avons vu les premiers
flocons de
neige. Tu avoueras qu’être par ces temps sur les lacs et
dormir au clair de
lune cela manque vraiment de charme. J’ai Jejette à
coucher cette semaine, le
temps étant trop mauvais pour qu’elle retourne à
la ferme, je crois que Mère va
la mettre en pension, j’aimerais beaucoup la garder, mais je
crois que Mère
préfère pas à cause de la naissance, cette brave
Jette est encore si naïve !
J’espère vivement une fille que j’appellerai
Paulette, si c’est un garçon il
portera ton nom, le parrain sera M.Lapérrière, la
marraine Suzanne. Je compte
que l’événement aura lieu tout au début de
décembre, peut-être même fin
novembre, j’ai hâte d’en avoir fini. En janvier je
compte recommencer à
patiner, j’étais fanatique de ce sport l’hiver
dernier. Lucy va apprendre, mais
j’ai bien peur qu’avec sa jambe qui a été
cassée, elle ait un peu de difficulté.
Toto n’ira pas en classe cette année, car ce sont les
frères et j’ai peur
qu’ils le fassent trop travailler. Mon personnel marche à
ravir. Je suis en
paradis maintenant avec mes deux bonnes françaises, aussi
j’ai beaucoup de
temps et j’en profite pour me faire un home agréable. Je
commence à devenir
adroite, je viens de terminer un très chic abat-jout dont
j’ai du fabriquer
moi-même le support et la carcasse, car Ville-Marie n’est
pas encore une ville
raffinée. Je vais m’adonner aussi cet hiver à la
lecture sérieuse, histoire et
autres. Mère t’a demandé de m’envoyer
l’histoire de France, elle a aussi écrit
à Me Charles Pollet qui a beaucoup lu de lui envoyer des titres
de livres. Je
vais m’instruire un peu, ce qui ne me fera pas de mal, et au
moins quand je retournerai
en France je n’aurai pas l’air de venir de chez les
sauvages. Je n’ai pas
l’intention de revenir avant 4 à 5 ans, je suis plus
ambitieuse que les Paul,
je ne veux m’offrir ce voyage qu’après quelques
beaux inventaires, André est de
mon avis. Quant à toi, mon cher Francis, tu es très libre
; n’oublie pas que tu
as promis de venir l’été prochain. Nous nous
faisons un véritable bonheur de te
revoir au milieu de nous. Sur ce, je t’embrasse bien
cordialement, quoique tu
aies horreur des baisers. Marie P.S. Les enfants vont à ravir
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie 10
octobre 1908 Mon
cher Francis, Nous avons reçu un mot ce matin de Mr Breton qui
est à New-York
et qui nous annonce son arrivée à Ville-Marie entre le 10
et le 20. Il nous demande
de lui écrire poste restante à Chicago pour lui donner
son itinéraire jusque
Ville-Marie. Jacques va lui envoyer un mot aujourd’hui
même. Nous tâcherons de
le distraire et de lui montrer le pays ; c’est dommage
qu’il arrive pour la
plus mauvaise saison. Jusqu’à présent il a fait
très beau et les chemins sont
superbes mais nous aurons probablement la pluie avant la neige et alors
tu sais
comment sont les routes ! On fait un champ de courses à
Ville-Marie sur la
pâture des pères qui se trouve en face du tournant de la
route qui va à la
ferme ; c’est un terrain magnifique. Il y a en ce moment 4 teams
employées à
creuser le parcours avec les charrues. On espère pouvoir donner
la 1ère course
à la fin du mois. L’hiver il y aura des courses sur la
glace. André a fait
revenir quelques voitures de courses ; il a reçu aussi ses
traîneaux. La vente
va bien en ce moment, ils sont contents de leurs affaires ; chaque fois
que je
vais au magasin, j’y vois du monde. Il paraît que
Chénier aura de la peine ,
dit-on, à continuer, il est pris par le crédit, il manque
de capitaux ; les
commanditaires, ils sont plusieurs, n’ont plus beaucoup
d’argent et Tobias ne
veut plus en avancer. On a vu plusieurs fois Tobias à la baie,
mais il est
naturellement en froid avec les Mathon ! T’ai-je dit que Mr de St
Laon avait
repris le magasin de Bellehumeur à Lorrainville, il y a mis un
français Mr
Feppel arrivé à Ville-Marie depuis quelques mois avec une
famille Laprèle qui
avait été recommandée aux Mathon par Génin
de Montréal. Mr Laprèle a été un
moment employé chez Mathon, mais on a eu sur lui de mauvais
renseignements et
on l’a remercié. Il est maintenant gérant du
magasin de gros de Mr de St Laon
et Bellehumeur à Ville-Marie. Les de St Laon et les
Laprèle passent leur vie
ensemble. Il n’y a plus jamais aucun potin à Ville-Marie,
on est fort
tranquille. La jument de Jean va très bien, le vétérinaire est revenu la voir
hier, il espère tout à fait qu’il ne lui en restera absolument rien. On l’a
fait marcher hier de l’écurie à la maison, elle ne boîte pas. Jean est aux
anges ! Au revoir, mon cher Francis, je t’embrasse bien affectueusement, tous
ici se joignent à moi. Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de
Mère (1857-1918) Ville-Marie, 21 octobre 1908 Mon cher Francis, J’ai été très
contente du résultat de l’inventaire et vous devez être satisfaits surtout une
année comme celle-ci. J’espère bien que cela permettra de donner un beau
dividende aux actionnaires ; si pas 10 pour cent, au moins 8, travaille dans ce
sens Henry Ternynck et Jules Joire. Mme Eugène Masurel qui a encore une fille à
doter doit aussi être de mon avis. C’est sur mes rentes que je dois établir mes
fils au Canada, les grosses dépenses sont faites heureusement mais je voudrais
avoir un peu d’argent à l’avance pour l’avenir. Jacques va sur ses 21 ans,
c’est un garçon qui se mariera de bonne heure, ce sera encore 100.000 frs à
sortir pour la dot, il est vrai qu’il en aura probablement une partie en terres
! Toi-même tu dois désirer que tes actions te rapportent le plus possible,
Edmond est si riche que cela ne lui change pas beaucoup, mais pour nous cela a
plus d’importance et je te fais mon interprète pour le demander. L’argent que
tu m’as envoyé est en banque, j’ai reçu 1932 dollars. Tout le bout de nos lots
est en feu, le temps sec qu’on a eu tout l’été a beaucoup aidé à propager les
incendies, il y en a partout et à certains jours on est envahi par la fumée.
Hier soir le feu commençait aussi tout à l’entrée du bois, on voyait les
flammes de la cuisine. Il n’y a aucun danger pour les bâtisses, tu sais à
quelle distance nous sommes. Ce feu ne s’éteindra que quand il pleuvra. Ce sera
peut-être un bon ouvrage, on ne pourra s’en rendre compte qu’après. Hier on a
tué le cochon et aujourd’hui Amélie confectionne du boudin, des tripes, des
saucisses, etc, etc... on en salera une partie. On en tuera encore deux avant
l’hiver. La jument grise se remet parfaitement de son coup de hache, elle ne
boîte pas du tout, la plaie n’est pas encore complètement cicatrisée mais elle
ne peut pas être mieux qu’elle n’est. C’est une fameuse chance d’en avoir été
quittes comme cela ! Nous avons eu vétérinaire pour la soigner. Nous attendons
d’un jour à l’autre Mr Breton qui s’est annoncé pour la date du 16 au 20, il ne
peut plus tarder. Les ménages Mathon sont avertis et le recevront à son arrivée
s’il ne nous avertissait pas à temps, je lui ai envoyé tous les renseignements
à Chicago. J’espère que ce beau temps va continuer pendant son séjour ici, il
fait très bon dans la journée et il gèle toutes les nuits. L’arrière saison est
fort agréable. Je t’envoie ci-joint un accusé de réception pour le bureau
veux-tu te charger de le remettre sans l’oublier. Suzanne est en pension fort
contente du lundi au vendredi, elle a beaucoup de plaisir et travailler bien.
Je t’embrasse bien affectueusement, mon cher Francis, tes frères se joignent à
moi. Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie, 24 octobre 1908 Mon cher Francis, Je te renvoie les papiers signés
ci joints, ils t’arriveront donc bien à temps pour l’assemblée de Décembre. Tu
me dis que le taux des actions sera de 6% cette année, c’est bien peu pour une
affaire qui rapporte autant, pourquoi faire d’aussi grosses réserves quand la
majorité des actionnaires a intérêt à toucher davantage. Insiste pour élever ce
taux à 8. Breton nous est arrivé avant hier et il est reparti ce matin. C’est
un charmant garçon, nous avons été très heureux de le revoir et de retrouver un
compatriote avec qui l’on pouvait causer agréablement. Je l’ai logé dans la
chambre de Jacques ; hier matin, il a été avec Jacques voir les ménages Mathon
et Marie et Lucy sont revenues dîner ici. J’avais des huîtres, du poisson,
petits pois et crème à la vanille. L’après-midi Jean a fait une promenade en
voiture avec M. Breton et l’a ramené chez Marie, où nous avons soupé et passé
la soirée fort gaiement. M Breton a de l’entrain, il est causant, c’est très
facile de le distraire. Il est parti tout à l’heure, Jean l’a ramené au quai,
il fait un brouillard si intense que je me demande si le bateau partira ! Il va
à Montréal, Québec et revient sur Albany, Philadelphie et New York. Il est tout
à fait enthousiaste des Etats-Unis qu’il a visités avant le Canada. Son père a
une ferme de 150 hectares, j’ai pensé que Charles pourrait avoir par lui, s’il
le désirait, des renseignements sur ce que peut rapporter une exploitation
agricole ; il s’en occupe beaucoup m’a dit son fils et tient lui même tous les
comptes de sa ferme. Je comprends l’hésitation de Charles pour entreprendre un
métier qu’il ne connaît pas et rompre avec son genre de vie, quitter sa
famille, sa ville natale, sans être certain de gagner de quoi vivre, c’est
certainement une grave décision à prendre ! Un conseil est difficile à donner !
Les Mathon sont toujours dans l’attente de l’argent de M. Boyle, il n’a même
pas répondu à leur dernière lettre très pressante. M. Lapérière est chez les
sauvages, il doit revenir d’un jour à l’autre, on l’enverra immédiatement
mettre son beau-frère en demeure de s’exécuter. Je ne te cache pas que j’ai
beaucoup de craintes, ils ne peuvent pas résister si cet argent n’arrive pas.
Je leur ai dit que je ne pouvais plus rien leur avancer, ils ne comptent plus
sur moi. Leur magasin marche bien, mais ils ont adjoint un commerce de
fourrures de compte à demi avec M. Boyle et confiants, ils ont marché avant
d’avoir touché l’argent de leur associé qui devait payer en juillet. Depuis
lors on attend l’issue d’un procès qui immobilise l’argent en banque. Ne dis
rien de tout ceci ; quant à bon-papa François, Paul lui avait demandé de
remettre le payement des intérêts à plus tard, il a consenti. Au revoir, mon
cher Francis, ici tout va bien à la ferme, tout le monde t’embrasse et moi tout
particulièrement. Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère
(1857-1918) Ville-Marie, 3 novembre 1908 Mon cher Francis, Nous avons eu de la
neige toute la matinée, mais à midi c’était changée en pluie, à la grande
satisfaction des laboureurs qui espèrent bien avoir encore quelques bonnes
journées avant la neige définitive. Ce matin d’ailleurs Jacques et Jean étaient
aux labours avec leurs teams. Lady va très bien et a repris son service. Cet
après-midi, ils sont allés passer les drilles dans le puits artésien que le
gravier et le sable avaient encore une fois bouché. Ce puits deviendra
excellent, je l’espère, mais l’eau étant encore chargée de sable et de gravier,
les tuyaux se bouchent souvent. La semaine dernière on a planté des arbres et
des sapins tout le tour de la maison, elle a un tout autre aspect ; au
printemps si nos fermiers en avaient le temps ils planteraient une allée de la
route à la maison. C’est le bois qui fournit les arbres. Tu me dis dans ta
dernière lettre que les livres de M. Mathon étaient déjà partis quand je t’ai
écrit. Nous attendrons une autre occasion pour ceux-là ; je voudrais d’abord
savoir ce que coûtera le transport. Veux-tu remettre de ma part 50 francs à M.
Castelnot pour la distribution de Noël à laquelle je participais les autres
années et 50 francs pour des messes pour les défunts de la famille. Je te
charge aussi de remettre à Ninie pour la St Nicolas de ses enfants cent dix
francs. On doit toucher pour moi au bureau les Unifiés d’Egypte 500 frs et je
crois aussi les obligations russes. Je vois également inscrits sur mon livre
pour novembre les 800 frs d’intérêts que tu me dois pour les 20.000 frs. Je
sais par bon-papa François que tu étais en Angleterre, c’est ce qui m’explique
que je n’ai pas reçu de lettre de toi au dernier courrier. Rien de bien
particulier ici. Suzanne est pensionnaire fort contente, je passe très bien mon
temps à la ferme, je n’ai pas encore pu m’ennuyer. Il n’y aura pas suffisamment
de besogne en plein hiver pour les 3 garçons, l’un d’eux ira passer quelque
temps dans une beurrerie ou laiterie anglaise afin d’y apprendre l’anglais en
même temps que de se perfectionner dans la fabrication du beurre. Ce n’est qu’à
l’état de projet, nous prenons nos renseignements. Tous les trois comprennent
l’anglais et le parlent, mais ils désirent se perfectionner et pourraient
chacun leur tour aller passer quelques mois de l’hiver, dans l’Ontario, de
l’autre côté du lac. Veux-tu envoyer un mandat de 18 francs de ma part à «
Fermes et Châteaux », 90 avenue des Champs Elysées, ou 9 avenue de l’Opéra,
pour le renouvellement de l’abonnement à m’envoyer au Canada, je leur écris en
même temps. Mercredi 4 Nous avons une tempête de neige depuis hier soir, tout
est blanc, on a rentré ce matin les 2 poulains, il reste encore les moutons
dehors, on ne les rentre que quand il y a un pied et demi de neige. On a tué
une truie hier, rien que la tête pesait 37 livres. Jacques va la porter au
boucher tout à l’heure, car nous avons encore un cochon à tuer dans 2 ou 3
semaines. C’est de la race Yorkshire de la ferme expérimentale, on a gardé des
jeunes. Au revoir, mon cher Francis, nous t’embrassons tous bien affectueusement,
tes frères et soeurs et moi. Ta Mère qui t’aime E.M. Lettre de Jean Masurel
(1890-1917) Ferme Ste Marie le 11-XI-1908 Mon cher Francis, Nous avons reçu, il
y a quelques jours les charmantes cartes postales venant de Liverpool je pense.
Tu me rappelles le récit que je devais te faire de mon voyage à l’Abitibi, je
l’avais un peu oublié, mais chose remise, quoiqu’en dise le proverbe, n’est pas
toujours omise. J’ai donc parcouru, en plus grande partie en canot, ces cent
soixante quinze miles qui nous séparent du poste « Mathon Frères & Co ». Le
paysage sur la route est fort varié, tantôt lac, rivières, montagnes, plaines
ou bois, le tout évidemment à son état le plus sauvage. Du reste, si on
rencontre un voyageur sur son chemin ce n’est jamais autre qu’un sauvage ; ces
derniers sont fort polis, acceptent avec empressement ce qu’on leur offre et
sont très conciliables. Le poste des Mathon est magnifiquement installé ; situé
sur une petite élévation faisant face aux deux adversaires (concurrents)
Révillon et la baie d’Hudson, il est très en vue et les sauvages le connaissent
déjà. Te raconter en détails par lettre un voyage aussi long et aussi rempli de
petites péripéties que celui là, serait une entreprise à laquelle ma plume
aurait peine à venir à bout ; je préférerais te raconter tout cela de vive voix
quand tu viendras nous voir, espérons que ce sera pour le prochain. L’aventure
la plus fâcheuse qui nous est arrivée au cours du voyage, fut la crevaison de
notre canot dans une rivière ; nous étions chargés lorsque l’accident s’est
produit et nous n’avons eu le temps que de regagner la rive au plus vite ; dix
secondes de plus et nous coulions. Ma jument Lady est tout à fait remise de son
coup de hache ; elle a labouré cet automne passablement, chose à laquelle je ne
m’attendais jamais. Je suis sûr que tu n’as jamais vu pareille blessure ; on
aurait pu y loger deux poings jusqu’au poignet (authentique). Elle ne s’en
ressent pas du tout ; malheureusement, son éparvin la fait toujours boiter un
peu. Ne connais-tu pas un remède efficace à cette tare. C’est une éparvin
calleux, situé sur la face interne du jarret de la jambe droite. Elle l’a
depuis bientôt deux ans ; un remède a été appliqué et n’a jamais réussi. Si tu
vois Philippe, demande lui conseil. Si tu venais au printemps prochain tu
verrais déjà beaucoup de petits changements dans la ferme ; tâche de te payer
le luxe du voyage, tu sais à l’avance le plaisir que nous causerait ta visite.
Allons, mon cher Françis, en attendant de tes nouvelles reçois la plus cordiale
poignée de main de ton frère qui t’aime. Jean ----ooooOOOOoooo---- Lettre de
Mère (1857-1918) Ville-Marie, 16 novembre 1908 Mon cher Francis, Jean m’a
remplacée pour t’écrire la semaine dernière, aussi c’est par toi que je
commence ma correspondance de cette semaine. J’ai sur mon bureau rien que dix
lettres à répondre et je te demanderai de donner de mes nouvelles aux deux
bons-papas et à Charles et Ninie, je ne pourrai que leur dire la même chose
qu’à toi et ils voudront bien m’excuser, je suis débordée de correspondance. Je
t’envoie un article du journal, « La Presse », relatant un accident arrivé au
bateau qui fait le service du lac et ci-joint aussi un petit article qui
annonce l’ouverture d’un chemin qui fera grand bien à Ville-Marie. Nous avons
eu un peu de neige, hier, mais pas suffisamment pour circuler agréablement en
traîneau ; aujourd’hui il n’y a qu’un degré sous zéro et le soleil commence à
se montrer, cela va encore dégeler. Samedi on a encore pu labourer mais à 4 chevaux
avec la grosse charrue. Jacques et Jean ont commencé le labour de la prairie ;
c’est un grand travail qu’ils ne pourront terminer qu’au printemps. Il y a
beaucoup de traces de lièvres et de renards sur la neige dans le bois, Jean et
Robert sont allés tendre des lacets samedi soir, j’espère qu’ils vont nous
faire manger quelques lièvres. Le renard n’a de valeur que pour sa fourrure. On
a soin de fermer le poulailler chaque soir, car les renards en hiver, rôdent
fréquemment autour des poulaillers. Quant aux ours, ils dorment tout l’hiver
blottis dans des troncs d’arbre sous la neige, ils ne se réveillent qu’au
printemps. Hier à la grand’messe, le Père Chevrier a rappelé aux cultivateurs
que c’était le moment de payer la dîme sur les récoltes, et qu’ils devaient le
faire en conscience, le 26è minot sur tout leur grain. Nous devons en argent,
le Père Chevrier nous a taxé pour 10 piastres, comme la famille Guay ; le ménages
Mathon donnent ensemble 15 piastres. Paul doit rentrer ce matin de Woodstock ;
les nouvelles de Mr Lapérière sont bonnes, la fièvre est tombée mais il ne peut
pas encore se lever. Il est probable qu’il ne sera pas remis pour venir remplir
ses fonctions de parrain chez Marie dans 2 ou 3 semaines ! Marie est encore
venue dîner à la ferme hier, elle est très vaillante. Je voudrais que tu
m’abonnes au journal « La Famille », prix 12 francs pour l’étranger, 7 rue
Cadet à Paris. Pour un an à partir de Janvier. Je confie ma lettre à Jacques
qui part pour la baie chercher une provision de choux venant du potager de ces
dames Mathon... (manque fin de la lettre) ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère
(1857-1918) Ville-Marie, 17 décembre 1908 Mon cher Francis, J’ai reçu hier ta
lettre du 2 décembre de Biella, tu as fait un bien beau voyage et j’espère
qu’il aura en même temps été fructueux ou qu’il le sera dans l’avenir ! Ninie
t’a probablement communiqué la lettre que je lui ai écrite après la naissance
de la jeune Paulette, Marie continue a aller admirablement ainsi que le bébé,
elle a une mine superbe et n’a pas le moindre petit ennui. Sa fille est fort
sage, elle mange et elle dort. Marie essaiera de nourrir en s’aidant du
biberon. La jeune nurse est fort capable malgré ses 20 ans, enfin tout va comme
sur des roulettes. Je vais passer mes journées à la baie, Jacques me conduit
avec les poulains, ou Jean avec ses grises, il y aurait encore un autre
attelage, les chiens, mais je ne veux pas leur confier ma personne car ils ne
sont pas assez dressés ; Jacques les attelle souvent maintenant, ils vont plus
vite que n’importe quel cheval. Jean est rentré mercredi de son excursion de
chasse, ils n’ont pas pu aller assez loin pour tuer des orignaux, il n’y a pas
encore assez de neige pour aller en raquette, les chemins sont très difficiles
à se frayer dans les bois, ils vont retourner un peu plus tard. Ils sont
revenus très contents de cette partie de chasse qui leur a fait voir du pays,
ils ont logé 2 jours chez un colon qui vient de s’installer seul dans les bois
pour y défricher un lot et ensuite le revendre, puis ils ont logé une autre
fois dans un chantier à bois où il y avait une cinquantaine d’ouvriers, c’était
l’ancien Cook de Landreville qui faisait la cuisine, ils ont été très bien
reçus. Puis ils sont allés se camper dans une vieille cabane au milieu des bois
pendant plusieurs nuits, dans la journée ils cherchaient les pistes de gibier.
Les Mathon sont contents de leur affaires en ce moment, il leur rentre beaucoup
d’anciens crédits ; les fournisseurs de Montréal que Paul a été voir ont
consenti à remettre les échéances à quelques mois. Boisvert a amené un stock de
fourrures de sa chasse qu’on pourra revendre avec de beaux bénéfices. Peter
Lapérière part bientôt à l’Abitibi où les sauvages vont lui amener également le
produit de leur chasse. Ces peaux se vendent facilement sur les marchés de
fourrures ; enfin je commence à reprendre confiance qu’ils en sortiront malgré
la difficulté qu’ils ont eu de ne pas recevoir les capitaux promis par Mr Boyle
pour lancer l’affaire de fourrures. Ce Monsieur est encore toujours en procès
pour sa mine d’or et il s’est retiré définitivement de l’affaire Mathon, dans
laquelle il n’a jamais mis un sous. Mr Lapérière seul reste avec eux et il est
indispensable car il s’y connaît en fourrures et est très aimé des sauvages. Au
revoir, mon cher Francis, je t’embrasse bien affectueusement et t’envoie mes
meilleurs souhaits de bonne année. Amitiés à tous. Ta Mère qui t’aime E.M.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Jean, Robert et Jacques Ville-Marie, le 25
décembre 1908 Mon cher François, Je viens aujourd’hui, un peu tard peut-être,
te faire mes meilleurs voeux de bonheur et de santé pour l’année qui va bientôt
s’ouvrir. Nous espérons tous que l’an 1909 ne nous réservera que des surprises
agréables telles que ton mariage et ta visite, qui sait ? peut-être ton voyage
de noces au Canada... Nous sommes toujours en excellente santé ; nos animaux
sont beaux et gras et les poulains commencent à marcher à la hauteur comme
dirait Jules. En ce moment nous travaillons au bois. J’ai été dernièrement
faire une partie de chasse d’une dizaine de jours et je n’ai rien tué. Il y
avait déjà trop de neige pour marcher à pied et pas assez pour aller en
raquettes ; mais je compte m’y reprendre avec la certitude de ne pas revenir
bredouille la prochaine fois. Souhaite la bonne année de ma part à tout ton
personnel, sans en oublier un seul. Je vais laisser la place à mes frères
maintenant et, en attendant de tes nouvelles je te serre affectueusement la
main. Ton frère qui t’aime Jean Mon cher François, Mes meilleurs souhaits pour
l’année 1909 qui, j’espère bien, ne se passera pas sans que tu viennes nous
voir ; Excuse moi si je ne t’ai point encore écrit, car jusque maintenant nous
avons été fort occupés, mais voici l’hiver qui va nous donner le temps d’écrire
et je me propose de t’écrire une longue lettre. Comme Jean te le dit, nos
poulains sont dressés, je t’assure que ça n’a pas été long, on leur a tout de
suite mis bride, collier, sellette et à la voiture ils ont marché comme si ils
avaient déjà fait cela depuis 10 ans, comme tu vois, ça n’a pas été difficile.
Nous avons bien labouré cet automne et nous comptons faire une excellente année
1909. Au revoir, mon cher François, encore mes meilleurs voeux et à bientôt une
longue lettre. Une bonne poignée de main de ton frère. Robert Mon cher
François, A mon tour de venir t’offrir mes meilleurs souhaits pour 1909, puisse
cette année être heureuse pour toi et nous donner le plaisir de te voir au
Canada. J’espère que tu as reçu la longue lettre que je t’ai écrite il y a 3
semaines, il n’y a encore rien de neuf pour mon service militaire ? que je n’ai
pas encore été à Montréal. Les vieilles gens du pays disent que la récolte de
l’année prochaine sera épatante parce qu’il n’y avait pas de lune la nuit de
Noël. Je te laisse, mon cher François, en t’envoyant la plus cordiale poignée
de main de ton frère qui t’aime. Jacques Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie, 30 décembre 1908 Mon cher Francis, Je voudrais que tu t’informes à
Tourcoing s’il ne faut pas faire inscrire Jacques pour le service militaire. Il
a fait sa déclaration au consulat à Montréal, je ne sais pas si cela suffit.
Pour le conseil de révision, il demandera à la passer ici. Marie va très bien,
elle a repris sa vie habituelle, sa nurse la quitte dans quelques jours, sa
petite fille pousse comme un chou et est très sage. Nous irons dîner chez Lucy
le jour de l’an pour que Marie puisse y venir et je les recevrai tous à la
ferme 8 jours après. Jacques a organisé un magnifique toboggan partant du toit
du hangar
à bois, près de la maison, jusqu’au bout du
potager, cela va amuser
petits et grands. Suzanne en profite pendant ses vacances ; même
hier après le
souper, elle a encore toboggané une heure avec Jacques !
C’est un excellent
exercice, car quand on a descendu toute la côte en toboggan, il
faut la
remonter à pied en traînant son toboggan (très
léger), mais il faut marcher
dans la neige jusqu'à la cheville et cela réchauffe.
Aujourd’hui cela poudre,
comme on dit ici, le vent chasse la neige, la piste est à
refaire, elle en est
couverte. Comme température c’est toujours à peu
près la même chose de 6 à 20°,
nous avons eu 32 un jour mais on n’en souffre pas. Cela
n’empêche pas Robert de
partir tous les jours avec sa hache et une bouteille thermos contenant
du café
bien chaud ! Il a déjà défriché 4 acres
à lui tout seul, c’est un bon bûcheur !
Jean utilise ses grises à charrier du fumier qu’il va
chercher à la baie, chez
Boyer ou ailleurs. La team de Jacques est louée 22 piastres par
mois dans un
chantier jusqu’au printemps. Les poulains font leur petit service
et les chiens
aussi, tous doivent travailler à gagner leur nourriture.
J’espère que tu n’as
pas oublié de nous abonner comme je te l’ai demandé
à « Fermes et Châteaux » et
à « La Famille ». Nous avons déjà
reçu plusieurs des publications offertes par
les bons-papas. La lecture et les réussites sont les grands
passe temps des
soirées d’hiver. Mr et Mme Auguste Lepoutre sont
arrivés à Montréal pour voir
leur fils et ont écrit aux ménages Mathon qu’ils
avaient l’intention de venir
nous voir et de pousser ensuite jusque Winnipeg. Paul a dû leur
répondre en les
engageant à aller d’abord à Winnipeg et revenir sur
Ville-Marie car les communications
sont encore difficiles ; jusqu'à présent il fallait
encore faire le tour du lac
en traîneau, le lac n’étant pas encore assez dur
pour traverser. On dit qu’on a
dû hier tracer la route et qu’on pourra bientôt
traverser. Je te quitte, mon
cher Francis, en t’embrassant bien affectueusement, tous tes
frères et soeurs
se joignent à moi, compliments au personnel. Ta Mère qui
t’aime E.M. Lettre de
Mère (1857-1918) Ville-Marie, le 31 janvier 1909 Mon cher
Francis, 35° sous
zéro, aujourd’hui avec un vent du Nord très violent
qui vous cingle, aussi mes
fils m’ont conseillé de ne pas sortir bien que ce soit
dimanche ; je me suis
rangé à leur avis et les ai laissés partir sans
moi à la grand’messe tout à
l’heure, ce temps là est exceptionnel heureusement. Ils
iront dîner chez Marie
et reviendront sitôt le dîner ; si le vent tombe, ils iront
ce soir à la petite
séance organisée en l’honneur de la visite de notre
nouvel évêque, Mgr
Latulipe, Lucy et Paul doivent s’y faire entendre.
J’attends de tes nouvelles
avec une certaine impatience, quelle sera ta décision ?
J’espère que le
prochain courrier m’en apportera. Jacques a été
à Montréal ; toutes les
formalités sont remplies pour le service militaire, Mr Robiquet
notre cousin a
été très aimable, c’est un gentil
garçon paraît-il, avec lequel Jacques a
sympathisé, ils se sont reçus réciproquement
à dîner, à l’hôtel Windsor et à
Viger et, quand Jacques est reparti, Mr Robiquet l’a conduit
à la gare. Il a
une trentaine d’années, a fait son droit, il est instruit
et travailleur. Il a
été réformé pour sa santé, il
n’a pas en effet l’apparence solide, dit Jacques.
Il a 9000 frs de traitement, le consul en a 30.000. Le consul a aussi
bien reçu
Jacques et s’est même charge d’écrire au
ministère de la guerre pour demander
que Jacques puisse entrer dans la cavalerie, ce qui ne se fait pas
généralement
pour les jeunes gens venant de l’étranger. Jacques
reviendra donc avec moi
quelques semaines avant de partir au régiment afin de revoir la
famille et de
se remettre à monter à cheval, pour y être refait
pour octobre. Veux-tu
t’informer au bureau si on n’a pas oublié de toucher
en janvier les coupons des
« Ville d’Amsterdam » à la banque du
Crédit Foncier, Ch de Fer P.L.M. et
Japonais au Crédit Lyonnais. En février il y a le loyer
de Mr Mamaut 406 frs et
les intérêts de Mr Macke 200 frs. Veux-tu aussi envoyer de ma part à Anna
Dubrule 50 frs pour l’école dominicale, comme je l’ai fait l’an dernier et
remettre à Zoé 15 frs que Mme Lemaire fera recevoir pour les Auxiliatrices et
Notre-Dame du Haumont. J’ai écrit à Mme Lemaire qu’elle pouvait faire toucher
chez moi. Mr le curé m’a écrit pour son autel, je lui donnerai à mon retour. Je
t’envoie quelques photos prises avec l’appareil de Suzanne et que Jacques a
fait développer à son passage à Montréal. Au revoir, mon cher Francis, je
t’embrasse bien affectueusement, tous tes frères et soeurs se joignent à moi.
Compliments à tout le personnel. Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo----
Lettre de Jacques Masurel (1888-1951) Ville Marie le 5 Février 1909 Mon cher
François, Notre hiver se passe très agréablement ici à Ville Marie et nous
sommes tous fort heureux ; nous avons eu quelques périodes froides, mais en
général le temps est plus doux que l’année dernière. Mère supporte cette saison
très facilement, d’autant plus que la maison étant bien chaude elle y reste
quand il fait froid. Dimanche dernier, comme il y avait une tempête de neige,
Mère a du manquer la messe, aussi tu comprends si elle se faisait de la
misère... Aujourd’hui, il fait très doux, il n’y a qu’un degré en dessous de
zéro , aussi notre pieuse maman en a profité pour aller communier. J’ai été à
Montréal voir le Consul et le Vice-Consul ; tous deux ont été charmants, je
leur ai demandé d’être versé dans la cavalerie (dragons autant que possible),
ils m’ont dit qu’ils feraient tout leur possible et qu’ils écriraient même au
ministre de la guerre s’il le fallait car c’était chose très difficile vu qu’en
principe on n’accepte pas dans cette arme les soldats n’étant pas présents au conseil
de révision et ensuite les résidents à l’étranger ayant 6 mois pour rejoindre
leur corps, ils pourraient arriver dans leurs régiments quand les autres
auraient déjà plusieurs mois d’apprentissage. J’ai dîné deux fois avec le
Vice-Consul, notre cousin, c’est un célibataire d’une trentaine d’années, il
est très gentil et je suis très content d’avoir fait sa connaissance. Hier il y
avait au courrier une lettre de Maurice Jonglez m’annonçant ses fiançailles
avec Melle Marthe Pollet. Nous trouvons tous ce mariage fort heureux. Voilà
déjà plusieurs fois qu’on annonçait ses fiançailles, une fois avec une
Tiberghien, une autre fois avec un Leurent, enfin cette fois-ci c’est la bonne.
Tu me dis dans ta dernière lettre que je devrais suivre les cours militaires
afin d’obtenir un brevet. Quand ces cours se donnent-ils ? Et combien de temps
durent-ils ? Car, si par exemple c’était en Août et Septembre, Mère je crois
devancerait bien son retour d’un mois ; mais si c’était en plus tôt, alors ce
ne serait pas possible, car que veux-tu que je fasse en France pendant
plusieurs mois, tandis qu’ici je suis je serai très utile aux travaux de la
ferme. Enfin, si tu veux bien prendre tous les renseignements sur ce sujet je
t’en serai bien reconnaissant. Pas grand chose de neuf à Ville Marie. Les
affaires sont bien tranquilles, comme on dit dans le pays, l’argent est rare,
mais tout le monde a espoir qu’au printemps ça ira mieux. Une nouvelle
compagnie de bateaux va se former sur le lac Temiscamingue ; ils vont,
paraît-il, mettre en circulation un superbe bateau de 125000 frs. Ceci fera
beaucoup de bien au pays car cette concurrence fera baisser les prix du fret.
Quant au chemin de fer, il doit toujours arriver au printemps, mais je ne sais
pas pour quel printemps. Enfin, les gens se démènent beaucoup et je crois que
cela ne pas beaucoup tarder. Les poulains vont à merveille et deviennent très
bons, je vais maintenant m’occuper de leur vente. Dimanche dernier nous avons
eu, au profit de l’hôpital, une petite séance donnée par les jeunes filles. On
y jouait une pièce avec entractes musicaux. Paul a joué du violoncelle, Lucie a
chanté et Marie accompagnait. La fanfare de Ville Marie dans laquelle je suis
petite flûte a prêté son concours. Un point important que j’oublie de dire. Cette
séance était présidée par sa grandeur Monseigneur Latulipe qui faisait sa
première
visite pastorale à Ville Marie. Cet évêque est
très dévoué et s’occupe
beaucoup de la colonisation ; il va aller à Montréal et
à Québec et fera tout
ce qu’il peut près des autorités pour qu’on
ait le chemin de fer ; il peut être
très influent car tu sais ici le clergé n’est pas
comme en France. Au revoir,
mon cher François, voilà les principales nouvelles du
pays, en attendant le
plaisir de te lire, reçois la plus cordiale poignée de
main de ton frère
dévoué. Jacques Masurel Lettre de Jean Masurel
(1890-1917) Ferme Ste Marie le
18 février 1909 Mon cher François, Tu ne peux te faire
une idée de la joie que
tu nous a causée ta résolution de venir nous voir le
printemps prochain ou
plutôt l’été prochain, ce qui sera du reste
préférable. Je te conseille le mois
d’Août moins chaud ici que le mois de Juillet et exempt des
myriades d’insectes
que ce dernier laisse vivre. Tu arriveras pour voir faire la moisson,
les foins
seront finis selon toute probabilité, ce qui nous permettra de
nous occuper de
toi et de te faire visiter le pays dans toute sa longueur et largeur.
J’espère
qu’il fera beau le jour de ton arrivée, les « grises
» toutes pimpantes et
heureuses de te revoir t’attendront sur le quai
surveillées de près par leur
maître qui se méfie toujours de leur excès de
zèle les poussant parfois à
partir avant le commandement. J’en suis très fier, il est
rare que j’aille à
Ville Marie sans que l’un ou l’autre ne m’en fasse
compliment ; enfin tu
jugeras toi-même de leur valeur. Il y a eu un peu de changement
dans la ferme :
les fameux poulains Bill et Jeiss sont vendus. Nous les avions
côtés 150$ dans
l’inventaire et nous les avons vendus 250$ à Jos
Bellehumeur le marchand de
Lorrainville. Nous lui avons acheté un jeune cheval de quatre
ans en retour
pour 200$ ; C’est un très beau modèle de cheval,
excellentes pattes et de belle
allure, avec la balance nous lui achèterons une nouvelle semeuse
perfectionnée
qui nous était indispensable vu le mauvais état de notre
ancienne. Nos gros
chevaux sont toujours au chantier, mais nous pensons les revendre
bientôt pour
acheter un cheval plus jeune que nous « spanerons » avec le
nouveau. Nous te
mettrons au courant de tout cela quand les marchés seront
conclus. Le restant
des animaux, chiens, chats, vaches, etc... sont tous en bonne
santé et les
bâtiments en bon ordre. Tu verras bien du changement bien que ce
ne soit pas
encore le « up to date » que nous désirons. Nous
allons semer passablement de grain
cette année. Nous pensons ensemencer environ 10 hectares en
avoine, blé et orge
; ce n’est pas encore l’ouest, mais c’est suffisant
pour nous et surtout pour
nos chevaux qui doivent préparer toute cette terre pour la
récolte et faire
cette dernière aussi vite que possible. Nous pensons ne faire
paître nos
animaux que dans le bois cette année, vu que leur pâture
est labourée et
portera de l’avoine. Du reste nous y avons fait et fait faire au
delà de 14
acres de défrichement et ce terrain semé en prairies sera
excellent comme
pacage malgré les souches qui ne sont pas encore
arrachées. Notre plus
important travail au printemps comprendra les clôtures qui ne
sont pas encore
très nombreuses. Bastien le marchand de liqueur et
l’acheteur de notre lot a
vendu son magasin ; les uns disent qu’il viendra habiter sur sa
ferme, d’autres
qu’il reprendra un débit de boissons à son compte.
Qui croire ? Tout le monde
va bien et est content d’apprendre ta décision.
Voilà mon cher François les
nouvelles susceptibles de t’intéresser et en te quittant
je fais encore une
fois tous les voeux pour que ta décision ne change pas.
Excellente poignée de
main de tous Jean PS : Je rumine un petit projet d’aller encore
essayer de tuer
un orignal bientôt. Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie
13 mars 1909 Mon
cher Francis, J’ai reçu ta lettre du 24 février
ainsi que Jacques et Suzanne.
Jacques réfléchit à ce qu’il doit faire, il
aurait préféré aider ses frères le
plus longtemps possible, crois-tu qu’il soit très
important pour son service
militaire de revenir plus tôt pour ce brevet. Je ne le laisserai
pas revenir
seul, dans ce cas je devancerai mon retour, nous aimerions tous mieux ne rien
changer à nos projets. André Mathon est parti pour une huitaine de jours à
Gowgandaw ; c’est un endroit à 90 milles d’ici, où un Français a découvert une
mine d’or, l’automne dernier ; Il y a là une véritable effervescence, on y
amène les machines, quelques milliers de personnes y sont déjà, tout s’y vend
un prix fou à cause de la difficulté du trafic, c’est à 40 milles du chemin de
fer, loin de toute habitation, on y a construit un hôtel, un chinois vient
d’ouvrir un restaurant, et on annonçait dans la presse l’arrivée de la première
femme, l’épouse d’un forgeron. Un des employés de la mine est venu hier à
Ville-Marie pour recruter 10 teams avec leurs charretiers ; ces hommes sont
payés 7 piastres et demie par jour, hommes et chevaux nourris et logés, c’est
donc 37.50 frs de bénéfice net par jour. Mais c’est un voyage très dur, trois
jours de route et dans les bois, les chevaux couchant en plein air dans la
neige, les gens sur leurs traîneaux ; là-bas, le travail n’est pas des plus dur
mais y a t’il de quoi abriter tout le monde ? André est parti avec son
charretier et ses chevaux et une bonne charge de foin dont il espère tirer un
bon prix. Mr Bergeron, le sellier y est allé, il y a une quinzaine de jours, il
a été 8 jours parti, il a rapporté 110 piastres. André aura bien des choses à
nous raconter à son retour. Les compagnies du cobalt et de la région ont offert
au Français un bon prix de sa mine, il ne veut pas vendre ; il espère dit-on
trouver encore de bons filons dés que le beau temps permettra de recommencer
les recherches. Jacques et Jean sont partis ce matin à Hailybury chercher des
marchandises, on est venu les solliciter de plusieurs côtés pour faire du
charriage ; c’est une façon de faire rapporter les chevaux l’hiver et d’occuper
ses loisirs, cela rapporte de 4 à 5 piastres, suivant la charge. Jean a eu
ainsi l’occasion d’aller dans plusieurs chantiers, cela lui fait connaître le
pays et les gens. Jean et Robert ont eu beaucoup de plaisir dans leur dernière
chasse, ils ont tué un chevreuil, un porc-épic, quelques lièvres et perdreaux.
Ils avaient trouvé la trace d’un superbe bock, mais il aurait fallu rester un
jour ou deux de plus et ils ne voulaient pas laisser plus longtemps Jacques
seul pour le soin de tous les animaux, 4 chevaux à sortir en plus, c’est
beaucoup ! Robert vient de repartir dans nos bois, voir s’il n’y a pas de piste
de chevreuils. Nous avons eu hier un temps idéal, je dînais chez Marie, nous
avons pu nous asseoir sur la galerie après le dîner et Paulette a été dehors de
9h½ à 5 heures ; les nuits sont toujours froides, par exemple ce matin il n’y
avait que 17° sous zéro, mais la journée est de nouveau superbe. Cela fait un
effet singulier cette température de printemps avec la neige tout autour de
nous, on ne voit pas encore la neige diminuer. Je t’embrasse affectueusement,
mon cher Francis, tous se joignent à moi. Ta Mère qui t’aime E.M. P.S. Je
voudrais que tu me fasses envoyer deux livres : « Le Génie Rural appliqué aux
colonies » à la librairie agricole, 26 rue Jacob, Paris, Prix 15 frs et « Sur
les deux Rives » par Léon de Tinseau ce dernier est sur le Canada, j’en ai lu un
compte rendu dans la presse. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie 27 mars 1909 Mon cher Francis, Je n’ai pas pu t’écrire au dernier
courrier et j’avais prié bon-papa Jonglez de te donner de mes nouvelles en te
disant la raison. Cette semaine j’ai encore passé tout mon temps près de Marie,
qui va mieux mais doit toujours se tenir au repos jusqu’à ce que ses muscles
soient remis. J’ai pris Toto et Denise à la ferme pour que Marguerite soit un
peu soulagée et que marie soit plus tranquille, ils ont beaucoup de plaisir. On
a acheté à Toto une paire de petites bottes en caoutchouc comme celles de mon
oncle Jacques et il l’accompagne aux écuries, c’est lui aussi qui rentre le
bois pour la cuisine, il est très fier de se rendre utile. Il est fort amusant.
Hier, Palma Ranger était venu prendre une charge de paille et en
voyant Toto,
il a dit à Jacques que sa petite fille se rappelle encore
d’avoir joué avec
Toto quand il était à la baie et qu’elle en parle
quelquefois. Toto va à la
baie voir sa maman, il lui raconte tout ce qu’il fait à la
ferme, tout à coup
il dit : Ah ! Mère, Toto a encore quelque chose à dire
à Mère ; la petite fille
de Mr Ranger aime bien Toto, et Toto aime bien cette petite fille, il
en rêve
toutes les nuits, Toto va aller la voir !...Il ne t’a pas
oublié et, en voyant
ton portrait dans la maison, il a dit tout de suite, c’est mon
oncle Francis !
Denise est beaucoup plus calme, c’est un grosse mère
tranquille, tout le
portrait de sa mère quand elle était jeune. Nous sommes
encore avec le paysage
d’hiver, neige partout, mais le temps se radoucit et nous annonce
un dégel
prochain, il y a encore eu deux bordées de neige, comme disent
les gens du
pays, cette semaine, tu ne peux te figurer une telle abondance de
neige, je ne
m’imaginais pas qu’il pouvait en tomber autant en un hiver
; on prédit après
cela une année de récolte magnifique ! Tu voudras bien
remettre à Ninie
l’argent pour les oeufs de Pâques des enfants, si je me
souviens bien c’est 10
frs par enfant et 15 frs pour mon filleul ce qui ferait 55 francs,
Ninie te
dira si c’est bien cela, je n’ai pas ici le livre dans
lequel tout cela est
noté. Au sujet du calorifère, bon-papa Jonglez me dit
qu’il y a un nouveau
système dont il parlera à Burms, étudie la chose
et soumets-moi les devis. Je
serai très content que Jacques puisse rester ici le plus
longtemps possible, il
pourrait s’occuper d’apprendre ce qu’il est
nécessaire de savoir et il aurait
encore un mois au retour pour se préparer, j’ai
l’intention de quitter fin août
ou commencement septembre. Si nous pouvions partir par le St Laurent,
j’aimerais voir Québec et faire ce trajet très
joli, dit-on. La Compagnie des
Transatlantiques va mettre plusieurs bateaux cette année pour le
service du
Havre à Montréal. Informe-moi. Je t’embrasse bien
affectueusement, tous tes
frères et soeurs se joignent à moi. Compliments aux
bonnes. Ta Mère qui t’aime
E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie, 3 avril 1909
Mon cher Francis, Je t’écris avec la porte du jardin toute
grande ouverte, 16°
au dessus de zéro à l’ombre, à trois heures
de l’après-midi. C’est très bizarre
d’avoir cette température printanière avec encore
de la neige partout. Elle
fond, mais on s’en aperçoit seulement en constatant que
l’on voit davantage des
clôtures chaque jour, on continue à passer le lac en
traîneau et à circuler sur
les routes de la même façon. Il y a une telle
épaisseur de neige cette année
qu’il faudra plus longtemps pour fondre. Elle a diminué de
plus d’un pied en 2
jours. Marie va bien, elle est maintenant complètement remise de
sa chute et je
lui rendrai dans quelques jours mes deux petits pensionnaires Toto et
Denise.
Ils s’amusent à la ferme et ne demandent pas du tout
à retourner chez eux ;
j’ai acheté une paire de petites bottes en caoutchouc pour
Toto, il peut ainsi
suivre ses oncles partout. Ninie s’amuse avec les poupées,
elle joue en ce
moment sur la galerie tout en chantant pour endormir sa fille. La jeune
Paulette a deux dents, elle est toujours aussi facile. Jeanjean grossit
toujours, tu le trouveras bien changé au mois d’août
quand tu viendras. Chez
Lucy tout va bien, les santés sont excellentes partout Tu
demandes à Jean dans
ta dernière lettre des nouvelles des affaires Mathon ; bien que
leur associé
pour les fourrures, Mr Jo Boyle, ne leur ait jamais envoyé autre
chose que des
promesses au lieu de capitaux, ils ont pu jusqu’à
présent s’en tirer tant bien
que mal. Naturellement, il n’est plus question
d’association et ils ont du
payer seuls tous les frais pour l’établissement du poste
de fourrures à Abitibi
; ils ont restreint leur nombre de commis et taché de faire le
plus d’économies
possible, afin de pouvoir faire face à tout malgré leurs
capitaux restreints,
le plus difficile est passé. Le commerce de fourrures rapporte
beaucoup, mais
il faut de l’argent pour acheter, Mr Lapérière
s’y connaît en peaux, c’est lui
qui va au poste faire les achats aux sauvages ; il y en a qui échangent leurs
peaux contre de la marchandise, André a là tout un stock, c’est un double
profit. Si l’insuffisance de capitaux ne leur permet pas de continuer, ils
chercheront à recéder ce poste à une compagnie ; c’est une leçon pour eux, ils
ne seront plus si confiants une autre fois, je t’en réponds. Les affaires ont
été calmes l’hiver mais les gens reviennent des chantiers et on s’attend à ce
qu’il y ait plus de vente au magasin ; hier quand j’y suis allé, il y avait
beaucoup de monde. J’ai reçu une longue lettre de Charles, il compte rester à
Cannes jusqu’au 15/20 mai ; il me paraît content de la santé de sa femme. Je te
quitte, mon cher Francis, en t’embrassant bien affectueusement, tous tes frères
et soeurs se joignent à moi ; Toto et Nini embrassent mon oncle Francis. Ta
Mère qui t’aime E.M. J’ai lu dans les journaux les différents articles de l’impôt
sur le revenu, il me semble que je ne paierai pas beaucoup plus que maintenant.
----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie, 15 avril 1909 Mon
cher Françis, Nous voilà enfin au printemps, presque plus de neige et ce qui
reste fond vite, avec 15° au dessus de zéro, les traîneaux vont être remisés
jusqu’à l’hiver prochain, mais quelle boue et que d’eau ! ! ! La terre n’est
pas encore dégelée assez profondément pour absorber toute cette neige qui a
fondu ; les ruisseaux sont débordants, notre creek fait un bruit qui rappelle
en tout petit les chutes du Niagara, on l’entend de la maison ! Notre voisin,
Mr Bastien, va faire habiter sa ferme par son frère, il se construit un
poulailler, des écuries, on l’entend tapoter et clouer toute la journée ; il a
déjà quelques animaux. On attend maintenant impatiemment de pouvoir commencer
les travaux, tout est prêt, charrues, herses, semences ; si le temps peut-être
propice, on est parti pour faire une bonne année. Tu me parles dans ta lettre
des Mathon qui n’ont pas encore payé les intérêts à bon-papa mais, Paul a écrit
à ce sujet-là à bon-papa qui l’a probablement oublié pour expliquer la cause de
ce retard et lui demander de bien vouloir attendre et toucher les 2 annuités
ensemble. J’ai du te parler dans une de mes dernières lettres de ce qui les
avait un peu déroutés pendant un moment, ils n’ont pas reçu les capitaux promis
par Mr Boyle pour le commerce des fourrures et ils ont dû endosser tous les
frais seuls. C’était un peu juste pour leurs capitaux, ils sont maintenants à
flot ; la banque ici ne fait guère d’avances, et je n’ai pas aimé leur avancer
d’argent afin que la leçon leur profite ; ils ont eu un peu de tracas, cela
leur donnera de l’expérience. Jacques va écrire à Mr Robiquet pour lui demander
s’il a reçu une réponse au sujet de sa demande d’être versé dans la cavalerie,
il t’écrira dés qu’il saura quelque chose. Bon-papa me dit qu’il est question
que vous repreniez une filature à Fourmies, ou ailleurs, que dans ce cas on
pourrait peut-être en donner à Charles la direction commerciale, la maison
Masurel Frères a-t-elle vraiment l’intention d’étendre ses affaires ? Tu ne
m’en dis rien dans tes lettres ! Charles, jusqu’à présent, a pu vivre sur ses
placements d’argent qui ont été heureux ; avec la santé de sa femme, qui a
nécessité de nombreux déplacements, il ne pouvait songer à autre chose, mais
maintenant que cela va tout à fait bien, je suppose qu’il va s’en occuper au
retour. Je t’embrasse bien affectueusement, mon cher Francis, tous tes frères
et soeurs se joignent à moi. Compliments à tout le personnel. Ta Mère qui
t’aime E.M. P.S. Le lac est encore suffisamment gelé pour qu’on le traverse en
traîneau mais c’est la fin et ne sois pas étonné si le prochain courrier est en
retard. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918) Ville-Marie 22 mai 1909
Mon cher Francis, Je réponds à tes deux lettres du 7 et du 10 courant, la
dernière arrivée ce matin ; Je te félicite de tes succès hippiques, un premier
prix, c’est superbe et des flots de ruban !... Pour le voyage, il est entendu
que tu te charges de retenir le passage à bord de la Lorraine, le 2 septembre,
comme je te l’ai indiqué dans ma dernière lettre et que nous passerons par
Toronto pour voir les chutes du Niagara. Jacques me demande de joindre à ma
lettre, la réponse qu’il a reçu dernièrement de Mr Robiquet, vice-consul à
Montréal, au sujet de son service militaire ; il me semble, d’après cette
lettre que nous ne pouvons qu’attendre, à moins que tu ne connaisses quelqu’un
qui pourrait appuyer la chose en France. Fais pour le mieux. Les semailles sont
commencées depuis hier matin, le temps est à souhait, ces travaux sont très
intéressants à suivre. Les instruments aratoires, très perfectionnés en
Amérique, simplifient beaucoup la besogne et le travail est mieux fait ; ainsi
Jean a semé hier tout un champ en avoine d’une superficie égale à notre
propriété de Mouvaux, c’est l’ancienne pâture sur le chemin, dont tu dois te
rappeler, il a semé là 8 sacs. Aujourd’hui, c’est près de la maison qu’il sème
avoine et mil ensemble parce que cette partie là se fera en foin l’an prochain.
Avec les semeuses mécaniques vous semez ce que vous voulez et on règle la
quantité mathématiquement ! Il y aura beaucoup de terre ensemencée cette année,
si le temps peut être favorable, il y aura certainement des bénéfices cette
année à la ferme. Robert s’occupe du potager et je compte que nous pourrons
t’offrir de bons légumes au mois d’août ; en ce moment il repique des tomates
et des céleris qu’il a eu ce matin à Mr Pommier, le jardinier des Mathon, c’est
un Breton qui s’entend très bien en légumes et en fleurs, tu en jugeras par le
jardin de tes soeurs. Je suis contente des bonnes nouvelles que tu me donnes
des affaires ; l’inventaire s’annonce bien d’après ce que tu me dis. Je verrai
à mon retour, si je puis faire quelques placements, avec l’argent qui me reste,
si je ne puis pas le laisser dans l’affaire. Les ménages Mathon vont bien, Mr
Lapérière est parti au poste d’Abitibi pour y acheter les peaux aux sauvages,
après leur chasse de l’hiver ; il les échange contre des marchandises ou de
l’argent. Les Mathon ont là tout un stock qui se vend à très haut prix ; il est
vrai de dire que pour les amener au poste cela leur revient aussi très cher
comme transport. Je t’embrasse bien affectueusement, mon cher Francis, tous tes
frères et soeurs se joignent à moi, on attend ton arrivée avec impatience. Ta
Mère qui t’aime E.M. P.S. Jacques qui lit ma lettre proteste parce que je ne
parle que de Jean et Robert, je répare ; Jacques a hersé et préparé les champs
à ensemencer avec son étalon et son cheval Boy qui vont très bien aussi pour
les travaux des champs. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Mère (1857-1918)
Ville-Marie 24 juin 1909 Mon cher Francis, J’ai reçu avant-hier ta lettre du 11
juin, tu as maintenant ma réponse au sujet du calorifère et je suppose que tu
t’en es déjà occupé pour que tout soit prêt à mon retour. Tu me demandes si les
Mathon ont fait leur inventaire récemment, ils ne me l’ont pas dit. Ils
attendent avec impatience maintenant le résultat du voyage de Mr Laperière qui
est parti à Woodstock pour voir Mr Jo Boyle, ce dernier ayant gagné son procès
pourra peut-être avancer à son beau-frère les capitaux nécessaires pour
l’affaire de fourrures. La mine d’or de Mr Boyle est estimée à plus de 12
millions, il serait bien facile, il me semble, maintenant de remettre quelques
centaines de mille francs à son beau-frère qui est très connaisseur en
fourrures ; il y a de très gros bénéfices à y faire paraît-il. La mine d’argent
qui se trouve à 2 miles en arrière de notre propriété vient d’être achetée par
un américain qui va la faire exploiter ; Jean en se promenant, il y a quelques
jours dans ces parages a vu l’américain qui y était, nous allons voir ce
qu’elle va donner, si elle était bonne cela ferait du bien à Ville-Marie.
Aujourd’hui Jacques et Jean sont partis avec André et Marie en gazoline aux
courses de New Liskeard ; quelques personnes du pays y courent, c’est une
attraction. Dimanche il y en aura ici. Robert garde la ferme avec Suzanne et
moi. Suzanne est en vacances et nous avons assisté dimanche soir à la séance
donnée par les élèves ; séance intéressante mais il faisait bien chaud ! Il y a
eu en même temps distribution de quelques prix, on n’est pas aussi généreux au
Canada qu’en France, il y a un prix de catéchisme et un d’application par
classe et elle a eu un prix de musique qui lui a été offert par ces dames
Mathon ! Elle a bien travaillé, les religieuses en sont très contentes et
regrettent de la voir partir ; elle même se trouvait fort heureuse au couvent
et s’est raccommodée avec le Canada cette année. Le temps est chaud et sec
cette semaine, on désire beaucoup la pluie surtout pour les prairies, le foin
ne sera pas bien haut si cela continue. Les récoltes sont belles jusqu’à
présent, mais un peu de pluie les ferait encore mieux partir ! Notre potager
devient superbe, hier Robert, le jardinier en chef, a repiqué encore 400
salades, j’espère que tu ne manqueras pas de légumes au mois d’août ! Au
revoir, mon cher Francis, je t’embrasse bien affectueusement, compliments aux
bonnes. Amitiés de tous. Ta Mère qui t’aime E.M. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de
Lucy Mathon-Masurel (1884-1917) Ville-Marie, 1909 Mon cher Francis, Voilà
plusieurs fois que je me propose de t’écrire, je sais que les nouvelles te font
plaisir, je me reprochais de ne pas t’en donner plus souvent. Les journées
passent très vite ici : le matin la marmaille vous prend une grande partie du
temps, l’après-midi nous sortons en voiture ou nous allons passer l’après-midi
avec Mère, en sommes nous avons une vie très agréable maintenant que nous avons
du personnel pour nous servir. Nous aurions tort de nous plaindre, les affaires
qui ont été assez calmes cet été reprennent maintenant. Le poste que nous avons
fait dans l’Abitibi entre Révillon et la baie d’Hudson promet de nous
satisfaire. Mr Lapérrière notre associé est certainement très fort pour l’achat
de la fourrure, de plus il connaît beaucoup de sauvages, c’est un grand
avantage car il ira lui même leur acheter les fourrures après leurs chasses
tandis que Révillon et la baie d’Hudson ne se dérangent jamais, ils ne quittent
pas leurs postes, ils attendent que les sauvages viennent leur proposer leurs
marchandises. J’ai reçu tout dernièrement la carte postale que tu m’as envoyée.
Nous aurons en effet le désir de rentrer en France l’été prochain, rien n’est
décidé cependant, il faut que nous soyons suffisamment satisfaits des bénéfices
de l’affaire, si nous partons nous nous embarquerons vers la fin d’avril. Nous
aurons donc le plaisir de te voir avant que tu ne t’embarques pour le Canada.
Mère nous ayant dit que tu projetais d’y revenir. J’espère que tu nous écrira
bientôt, que tu nous mettras au courant de la chronique qui nous intéresse
toujours beaucoup, en attendant je t’embrasse bien fort. Paul t’envoie son bien
affectueux souvenir. Lucy ----ooooOOOOoooo---- Lettre d’André Mathon-Masurel
(1880-1954) Ville Marie Septembre 1909 Mon cher François, Ta lettre du 16
écoulé m’est bien parvenue, le même courrier m’en apportant une de papa, elles
concordent toutes les deux. J’aurais voulu te répondre plus vite, mais ayant
réduit les frais généraux à leur plus simple expression, nous sommes obligés de
faire beaucoup par nous même. Depuis que nous nous sommes vus tous nos plans
sont changés. D’abord nous liquidons notre magasin de Ville Marie et gardons
nos fourrures qui sont appelées à nous donner un plus beau résultat. La
liquidation est commencée depuis 3 jours et nous sommes assez contents, le plus
difficile est de faire rentrer les comptes, mais avec de la patience nous en
viendrons à bout je pense. C’est malgré tout une affaire de longue haleine. En
faisant notre situation approximative voici comment nous allons probablement
sortir de cette affaire, il nous restera environ 8 à 9000 piastres liquide et
notre poste et nos bâtisses ce qui montera à environ 35 à 36000 $. Somme toute,
nous sortirons comme nous serons entrés. Avec l’argent liquide nous tâcherons
de faire quelque chose à Montréal où dans un centre car mon idée n’est pas
changée, c’est qu’il y a plus à faire au Canada qu’en France. Mais je t’assure
qu’avant d’entreprendre une autre affaire, je l’étudierai à fond et ne serai
plus pris comme je l’ai été cette fois-ci. D’autant plus que le poste nous
permettra d’attendre. Mon chef de poste est descendu ces derniers temps et est
fort satisfait de la marche des affaires. Je ne serai pas surpris qu’il nous
rentre cet hiver 7 à 8000 piastres de fourrures. Notre première année n’a pas
été extraordinaire comme il fallait s’y attendre, ayant à lutter contre la Baie
d’Hudson et Réveillon, mais cet hiver nous aurons notre part au gâteau et je ne
pense pas que ce soit la plus petite. Te voilà donc renseigné, mon cher
François, sur nos projets. Attendons maintenant qu’ils se réalisent. Sitôt
qu’il y aura quelque changement je t’en ferai part. La famille continue à se
bien porter, grands et petits. L’hiver nous arrive vite, hier pendant la nuit
nous avons eu de la neige et je ne serai pas surpris que d’ici trois semaines
le pays en soit couvert, je crains même un hiver rigoureux. Jean et Robert ont
loué leur terre et pris un appartement à Ville Marie, ce qui fait que nous
avons souvent le plaisir de les voir. C'est une distraction pour ces dames. Sur
ce, mon cher François, je te quitte en te serrant la main. Embrasse Mère, Zézette
pour nous, dit leur qu’elles nous manquent beaucoup. Amitiés à tous. Ton beau
frère dévoué André Mathon ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Marie Mathon-Masurel
(1882-1954) Montréal le 31 mars 1913 Mon cher Francis, Ta lettre du 11 mars m’a
fait un vif plaisir, aussi comme tu vois je ne tarde pas à y répondre. André
est de retour d’Abitibi depuis 3 semaines, il s’est immédiatement mis à
l’inventaire avec Mr Bézette le comptable qui était allé avec lui prendre
l’inventaire. Les choses ont été mises sur un très bon pied maintenant et nous
attendons le rapport fait et signé par le comptable ainsi que par les
administrateurs pour l’envoyer en France aux actionnaires. Nous gagnerons $
1200 et quelques dollars. J’ai causé moi-même à l’expert comptable qui est tout
à fait un homme d’affaires et il nous a dit que l’affaire pouvait être très
bonne maintenant que nous avons les capitaux suffisants ; espérons que l’année
prochaine sera réellement bonne. Je te serai en tout cas toujours infiniment
reconnaissante de toute la peine que tu t’es donnée pour moi pendant mon séjour
en France. Je me demande parfois si sans toi je n’aurai pas fini par me
décourager un peu. Joe t’envoie 4 gallons de sirop d’érable, tu peux en faire
beaucoup de cas, c’est le meilleur qu’on puisse trouver dans tout le Canada ;
mais pour Francis, il n’y a rien de trop bon ! dit Joe. Il est aussi, je crois,
enchanté de pouvoir vous offrir quelque chose en échange de la charmante
hospitalité que Mère lui a offerte. Il est venu avec son fils à Pâques ; ce
dernier m’a mis la maison et les enfants sans dessus dessous ; Paulette était
devenue aussi gamine que lui. Je n’ai jamais vu un gamin aussi terrible. Mais
Joe en est très fier, il appelle cela de l’exubérance. En tramway il y a en
face de lui une dame qui ne lui plaît qu’à moitié, il crie tout haut « qu’elle
est laide et a le teint jaune » ; la dame qui comprenait parfaitement l’anglais
a piqué un phare ! ! !... Un monsieur le gène, il lui donne des coups de poing.
Il voit un vieux monsieur tranquillement assis lisant son journal, il lui
chatouille le nez avec un petit drapeau. Fureur du monsieur. Pauline ne
comprenant pas ce qu’il lui dit ne lui répond pas, il se précipite sur elle
pour la taper mais il calcule mal son élan et fonce sur une cafetière qu’il
renverse avec son contenu. Et je pourrais t’en citer comme cela des tas. C’est
assez drôle à raconter, mais c’est moins amusant pour sa mère qui ne veut
absolument plus sortir avec lui. Physiquement il est fort comme un petit turc
et très joli petit garçon. J’attendais une lettre de Mère ce matin, mais il n’y
a pas eu de courrier de France. Je suis anxieuse de savoir si Paul a enfin
trouvé une affaire. Cette pauvre Lucy doit tellement se tourmenter. Je ne la
vois pas très bien non plus à Paris avec ses 4 enfants qui ne sont pas très
faciles et encore fort jeunes. Ils étaient à peu
près décidés pour l’affaire
Aymé comme tu me le dis dans ta lettre, si oui l’affaire
doit être terminée
maintenant. Je serai curieuse de savoir si Charles va reprendre une
partie de
l’affaire d’importation de son beau-père, ce serait
une excellente chose pour
ce dernier et ses héritiers. Tu peux être tranquille je
n’en parlerai à
personne tant qu’on ne m’aura pas appris officiellement la
chose. Mes enfants
vont très bien. Denise a fait sa première communion
d’une façon très édifiante.
Elle avait été opérée des amygdales 8 jours
avant et elle avait montré un
courage de petite femme, les docteurs en étaient
étonnés et m’ont beaucoup
félicitée d’avoir un enfant aussi raisonnable. Elle
va maintenant comme un
charme. Paulette est toujours la plus gamine ; rien
d’étonnant, André la gâte
beaucoup et elle a une nature un peu américaine ; elle est
très indépendante et
se fiche de tout. Jean est doux comme une fille mais n’a pas le
feu sacré pour
ses études. Toto marche bien au collège, il est
demi-pensionnaire depuis mon
retour car les soins de propreté laissaient à
désirer et les enfants il faut
leur apprendre dés qu’ils sont jeunes à être
très propres ; il a d’ailleurs été
ravi de ce changement. Au point de vue sociale, je me suis fait
quelques
nouvelles relations depuis mon retour. Le sénateur Wilson et sa
femme dont la
fortune est estimée une des plus grosses de Montréal ;
ils ont une maison
splendide meublée entièrement à la
française, 3 automobiles, etc... Il y a des
jeunes filles charmantes qui pourraient faire l’affaire de mes
frères plus
tard. Mr Perrault architecte et sa femme. Les Marchand, le juge Bruneau
et sa
femme. Et d’autres, mais je ne puis te les citer tous au long.
J’ai donné un
thé il y a quinze jours ; nous étions 18 à 20
dames, ce fut très gai. Depuis
j’ai eu quelques réunions de bridge, thé, etc... Ce
matin nous sommes rentrés à
2h ½ d’une soirée chez l’honorable
Pérard. Cet après-midi j’ai un thé chez Mme
Duheux, mercredi chez Mme Ferrand. Jeudi nous sommes invités
à une partie de
théâtre suivi de souper par les Marchand. Je suis vraiment
très contente de
voir que petit à petit j’arrive à me faire des
relations dans la plus belle
société de Montréal, et sans me donner de
misère : une relation vous en amène
une autre et ainsi de suite. Je change d’appartement dans 15
à 20 jours, quand
tu m’écriras adresse moi ta lettre au N° 2255 Park
Avenue. The Oatway, c’est le
nom du nouvel appartement, j’en au fait la description à
Mère, elle pourra te
dire qu’il est vraiment pas mal. Nous allons relouer à
Rigain, à la grande joie
de Joe qui compte y venir toutes les semaines du samedi au lundi ;
c’est entre
Ottawa et Montréal et les communications sont faciles, il y a
des trains
constamment. Nous sommes invités par le juge Choquelle et sa
femme à aller
passer quelques jours avec eux dans leur club de Winchester, dans les
montagnes
à 5 ou 6 heures de Montréal. Nous y serons au moment des
« sucres », c’est à
dire quand on retire le sirop des érables. Comme nous serons
toute une bande,
ce sera très gai. Le soir on fera des bridges, on dansera. Le
pays est superbe,
nous y ferons des excursions dans la journée . Avec Pauline je
suis tranquille,
je pourrai lui laisser les enfants. J’ai bien peur que cette loi
de 3 ans
n’empêche Jean de venir en octobre. J’en serai
navrée. Je me faisais une si
grande joie de vous vous voir sous peu toi et lui. Tu remettras
peut-être, dans
ce cas là, ton voyage à 1 an. Dis à Gaston que sa
tante ne l’oublie pas et
qu’elle maintient son invitation pour quand il sera en age de
venir au Canada.
Mon cher Francis, tu ne pourras pas te plaindre cette fois-ci quel
volume
fourni qu’il t’intéresse. Je t’embrasse
très affectueusement et à bientôt
j’espère le plaisir de te lire, amitiés
d’André, baisers des enfants. Ta soeur
qui t’aime. Marie. ----ooooOOOOoooo---- Lettre de Marie
Mathon-Masurel
(1882-1954) 2255 Park Avenue 16 juin 1913 Montréal Mon cher
Francis, J’ai un
peu tardé à répondre à ta gentille lettre
de fin avril qui pourtant m’a fait un
trèsvif plaisir. André est à l’Abitibi depuis le début de mai, il me revient
dans une huitaine, nous installera à Rigaud, repartira jusqu’en Août et
reviendra prendre un mois de vacances avant d’entreprendre son long voyage qui
durera tout l’hiver. Ce n’est évidemment pas gai pour moi ; mais que veux-tu,
si nous voulons gagner de l’argent dans l’affaire de fourrures, c’est le seul
moyen. Je préfère encore qu’André ait une affaire, même si elle a des inconvénients,
que de le voir comme ce pauvre Paul qui cherche encore toujours. Mère t’aura
dit probablement que je suis très désireuse de l’avoir cet automne pour la
naissance de mon cinquième, André ne sera pas là, je vais être bien seule.
Quant’à toi, mon cher Francis, malgré le vif plaisir que j’aurai à te voir , il
serait préférable pour toi que tu ne viennes pas à ce moment là, car tu n’auras
pas beaucoup d’agrément. Vu ma situation de femme intéressante je ne pourrai
pas sortir, et l’ami Joe qui aimerait tant te donner a « good time » sera très
probablement dans des pays perdus à bâtir une ligne de téléphone ; aussi comme
ça ne t’arrive pas souvent de venir en Amérique nous voudrions bien, lorsque tu
y viendras, que tu en gardes un très bon souvenir. Si Mère venait cet automne,
tu pourrais venir la chercher plus tard par exemple. Crois-tu qu’elle vienne ?
J’ai bien peur que non ; la famille va la retenir ; on va lui donner des tas de
raisons etc...et je vois d’ici que mes espérances vont devoir s’envoler. Pour
Jean, quand finira-t-on par savoir si oui ou non il va faire ses 3 ans. Son
appartement de garçon est toujours à louer, le propriétaire m’a dit qu’il
n’était pas pressé... (manquent les pages suivantes) Marie Mathon-Masurel Lettre
de Marie Mathon-Masurel (1882-1954) Rigaud (Québec) 15 juillet 1913 Mon cher
Francis, Je tiens à répondre de suite à ta lettre du 26 juin qui m’a fait grand
plaisir. Je sais par Mère que tu as été très peu à Paris depuis quelques
semaines et tu n’as pas idée de ce qu’elle a été touchée des attentions et des
égards que tu as eu pour elle pendant les moments tristes et prévisibles
qu’elle vient de passer. Pauvre Mère, son rêve serait de te voir marié et
heureux et elle a le ferme espoir qu’il se réalisera. J’avoue que je suis un
peu comme elle et je crois la chose très possible, Rome pour une fois sera
faillible. Je ne garde pas grand espoir de voir venir Mère au Canada en octobre
; Au fond Jette est je crois un peu préoccupée de ne pas encore avoir eu de demande
; toutes ses amies se marient et elle en ferait peut-être volontiers autant. Un
voyage au Canada peut lui faire échapper une bonne occasion ; Je t’avoue que je
n’ose même plus le demander et je n’en parle plus dans mes lettres car je ne
voudrais pas entraver, même momentanément, l’avenir de cette chère petite
Jejette. Somme toutes elle connaît bien peu de monde et, si elle désire se
marier, il faudra qu’elle sorte un peu plus l’an prochain. Elle ne voit que
presque toujours le même cercle et comme les jeunes gens sont rares ce n’est
pas trop étonnant. Je n’ai pas encore reçu tes photos et Joe n’a pas reçu celle
que tu lui a envoyée car il l’attend toujours, je lui en remettrai une des
miennes car je sais qu’il y tient beaucoup. Je ne suis pas étonné que tu aies
trouvé Tomler joli, c’est un superbe enfant ; quant à madame Joe, elle est
mieux que sur sa photo mais elle n’a pas en effet un caractère des plus suaves
; comme beaucoup d’américaines elle est un peu égoïste. Avec ses amies elle est
charmante, mais elle doit être moins agréable avec son mari d’après ce que j’ai
pu en juger. Les Bérard et non Pérard sont à Paris, hôtel Régina, ne te dérange
pas exprès pour eux, seulement si tu en as l’occasion. Je comprends que Lucy
soit agacée d’avoir toujours son mari dans les jambes, si j’étais à sa place je
casserai les vitres une bonne fois en lui disant que, s’il n’est pas capable de
faire vivre sa famille qu’il aille manger ailleurs, qu’à son âge on ne vit pas
au crochet de sa femme. C’est vraiment un honte ! Quant à notre affaire de fourrures,
mon cher Francis, j’attends comme toi le r
ésultat de l’hiver prochain pour voir
si vraiment elle peut être une bonne affaire. Depuis 5 ans
qu’elle marche, nous
n’avons perdu de l’argent que l’année
dernière ; les bénéfices ont toujours
été
très petits c’est vrai, mais l’argent nous a
toujours fait défaut. Cet hiver
André sera 5 à 6 mois dans les bois achetant de la
fourrure pour la compagnie
et tendant des trappes pour son compte qu’il revendra à la
compagnie. Nous
espérons faire un bon inventaire. La fourrure a baissé
cette année, mais elle
peut remonter d’ici le printemps prochain. Nous avons
envoyé les fourrures à
Londres cette année ; elles seront vendues en octobre. Comme
nous avons
suffisamment d’argent, cela nous permet d’attendre
jusqu’à cette date là qui
est la meilleure et sans demander d’avance sur laquelle on
chargeait 10%, ce
qui diminuait encore le bénéfice de la fourrure. Enfin,
j’espère et c’est
beaucoup : aussi n’ai-je pas hésité à
conseiller et à encourager André de
partir tout l’hiver dans l’intérêt de ses
affaires. Il est certainement très
regrettable que cette année justement j’aurai mon
cinquième héritier ; ce sont
des choses qu’on ne prévoit pas toujours. Le moment de ma
couche sera
certainement un peu pénible si je suis seule ; j’ai
heureusement quelques vrais
amis qui me sont très dévoués et sur lesquels je
compte beaucoup ; bien que ce
ne sera jamais comme Mère. Tu verras les photos que j’ai
envoyées des enfants ;
l’appareil n’étant pas très bon, les photos
sont très ordinaires. Cette gamine
de Paulette m’a dit ce matin qu’avec mon gros ventre
j’avais l’air d’un curé.
Elle en a vu un à la distribution des prix qui avait une bedaine
formidable,
elle s’imagine que tous les curés sont affligés de
la même infirmité. Denise,
entendant la réflexion de Paulette lui a dit de se taire, que ce
n’était pas de
ma faute, qu’elle avait remarqué ce changement depuis que
je portais un corset
du Canada et elle m’a dit « tu devrais en commander un
à Paris, comme tu faisais
avant ». Ils sont, jusqu’à Toto, d’une
naïveté étonnante, ils savent pourtant
très bien que je vais acheter un bébé car
j’ai promis, dés mon retour de
Montréal, d’acheter un berceau et on laissera tous les
jours la fenêtre ouverte
pour que la cigogne puisse entrer quand elle passera. Les 3 petits sont
enchantés. Toto trouve que c’est assommant et qu’il
était bien plus tranquille
sans un bébé qui va crier tout le temps. André est
parti jusqu’au 15 Août à
l’Abitibi. Il reviendra ensuite jusqu’au 5 ou 6 septembre
et partira vers cette
date pour 5 ou 6 mois, jusqu’en mars probablement. Comme il y a
bien peu de courriers
dans ces parages là, il apprendra
l’événement des semaines après
l’événement
très probablement. Espérons que tout ira bien ; ma
santé est excellente ; le
grand air de Rigaud m’a fait beaucoup de bien. Tu es au courant
de mon
existence ici par Mère, aussi ne t’en dirai-je pas plus
long ; écris moi
encore, tes lettres sont toujours si intéressantes.
Aussitôt tes photos reçues,
je t’enverrai un mot pour te prévenir. Je t’embrasse
affectueusement, les
enfants se joignent à moi. Ta soeur qui t’aime Marie
Lettre de Marie Mathon-Masurel
(1882-1954 2255 Park Avenue 20 septembre 1913 Mon cher Francis,
André est parti
à la baie d’Hudson il y a quelques jours. Ce départ
était un peu émotionnant vu
la distance, la longueur du voyage et surtout la totale
impossibilité de donner
et de recevoir des nouvelles d’un côté comme de
l’autre. Mais c’était
indispensable si nous voulions faire une bonne année ;
maintenant que nous
avons les capitaux suffisants il faut les faire fructifier et le seul
et unique
moyen dans notre commerce c’est la « trade » qui est
d’ailleurs l’unique but du
voyage d ‘André, il chassera aussi avec le sauvage entre
temps. J’espère que
tes vacances se sont bien passées et qu’elles ne
t’ont pas coûté trop cher, car
les endroits à la mode que tu choisis généralement
sont loin d’être à bon
marché. Nous causons souvent de toi avec Joe, pour lui tu es le
type le plus
chic et le plus gentil qu’il ait rencontré en France, je
lui ai donné ta photo
qu’il a emportée chez lui et »you have made a hit with my wife », c’est ce
qu’il m’a dit. Il viendra me voir de temps en temps cet hiver, c’est un très
bon ami sur lequel je puis compter. Tu n’as pas idée comme je suis navrée de ne
pouvoir assister au mariage de Jette ; si je n’avais pas attendu mon cinquième
pour dans 2 mois je n’aurais pu résister au désir d’aller en France ne fut ce
que pour un mois, mais vu les conditions actuelles il est inutile d’y songer.
Henry (Dewavrin) m’a écrit très gentiment. Son style et son écriture m’ont
beaucoup plu ; cette dernière indique du caractère. Espérons que cette petite
Jette sera heureuse, elle est si gentille, si bonne et d’un caractère si
facile. Sans vouloir faire tort à Nini, Lucy et moi-même, je crois que des
gendres de Mère Henry aura lui aussi tiré le meilleur numéro. Tu es bien gentil
de me complimenter sur mes enfants, tu me prends par mon faible, car je l’avoue
sincèrement j’en suis très fière, ils sont si gentils et affectueux pour moi
que je suis très indulgente pour les petits défauts qu’ils ont comme nous en
avons tous. Mon cher Francis, puisque tu me demandes mon avis au sujet d’un
voyage ici, le meilleur moment serait mai ou juin. J’en ai parlé à Joe, il est
aussi de cet avis. Inutile de te dire que nous serons absolument ravis,
enchantés de t’avoir parmi nous et nous ferons tout ce qui est possible pour te
donner « such a good time » que tu nous reviendras ensuite tous les ans. Je
suis très heureuse de penser que Jean viendra peut-être en sortant du régiment
m’apporter comme il le dit son appui moral. Je ne veux pas trop penser à la
solitude dans laquelle je vais me trouver cet hiver (spécialement au moment de
ma couche) mais tu comprends que cette situation est loin d’être gaie et que
j’en souffre plus que je ne le laisse paraître. Aussi la perspective d’avoir
Jean quelques temps avec moi m’enchante tellement que je n’ose pas l’espérer de
peur d ‘être déçue. Quant à la question de son avenir, il ne faut pas craindre
que je ne l’influence pour ce pays ; c’est une responsabilité que je n’oserais
pas prendre car j’aurais très peur de leur inexpérience des affaires dans un
pays où il y a tant de malhonnêtes gens « in business » auxquels on donne le
surnom pompeux de « Business Men ». Je reçois mes amies de temps en temps pour
un thé ou une partie de bridge ; elles me téléphonent pour avoir des nouvelles,
elles sont vraiment très gentilles et attentionnées ; mais malgré tout, çà ne
vaut la famille et rien ne peut remplacer l’excellente mère que nous avons ; ce
qu’elle va me manquer dans 2 mois ! plus que jamais ! Maintenant mon cher
Francis je vais te dire au revoir ; écris moi quand tu as le temps, j’ai si
grand plaisir à te lire. Je t’embrasse très affectueusement comme je t’aime. Ta
soeur aimante Marie «
Un témoignage de Mary Conlife don’t la grand mère était gouvernante des Emile rasson-Masurel: “
MY GRANDMOTHER AS GOVERNESS IN OCCUPIED FRANCE 1914-1918
As
a child growing up in Derrinsallagh, Borris-in-Ossory, Co. Laois I had
often heard my mother Catherine Hogan (nee Cummins), discuss the great
moral strength, poise and elegance of my grandmother Catherine Cleere
(nee Meagher), a young lady who went to work at the age of twenty eight
in France as a Governess on 30 June 1914 just prior to World War
One. I was almost three years old when she died and only remember
visiting her in bed close to her death. Her sojourn in France is part
of the inscription on her headstone at Clough Cemetery Co. Laois.
Emile Rasson; Tourcoing;my grand-mother was his governess
Les Emile Rasson-Masurel;
Catherine Cleare
She
had been engaged by the famous merchant family of Madame and Monsieur
Rasson/Masurel at 100 Rue Carnot Tourcoing, Nord, a town close to the
border with Belgium and the nearby city of Lille. Communication
with home became impossible and neither side of the family was aware of
the other’s welfare for long periods. In my mothers sitting
room sorting out photos and letters I spent many long evenings amazed
to find a collection of photos and memory cards of the French family
Masurel/Rasson. There was also a collection of postcards sent from
Montmirail a lovely little country village in Sarthe, dated 1906 and
1909 from my grandmother’s sisters who seem to be employed by a
glass merchant family who owned the Castle in Montmirail.
I
checked the internet and found that the Masurel family had been engaged
in the industries of wool, spinning and silk since the year
1508. In the year 1894 the company employed one
thousand workers. Francois Masurel was in control of the family
business and when he died in 1894 his death lead to public
mourning. From a book called The Emergence of Modern
Business Enterprise in France 1800-1930 by Michael Stephen Smith I
noted that the Masurel family were serious collectors and patrons of
important artists like Joan Miro, Fernand Leger, Roger Dutilleul, Pablo
Picasso, Andrew Derain, Georges Braque, Henri Laurens, Frenand Leger,
Modigliani, Klee, Georges Rouault and many more. I decided to
contact Sophie Levy, curator of the Greater Lille Museum where the
collections are now housed. She gave me a contact of a descendant
called Thierry Prouvost living in Paris. He is compiling two
volumes of family history and extended families in the business. I have
seen part of the monograph which includes a photo of the same house as
per the1906 postcard sent to Ireland. I am trying to
establish how the connection with France evolved. Hence in
October 2013 I visited Montmirail to try and establish some contacts
there. Progress is slow. I met with Thierry Prouvost in Paris who has
promised to include some details of my grandmother’s
connections with his family in his new book. A future visit
to the town of Tourcoing should shed more light on the story.
It
appears that Catherine arrived in France on 1 July 1914, just one month
prior to the outbreak of World War One after German troops invaded
Belgium on 4 August. All this information is gleaned from letters, and
a diary which somehow reached Ireland during the conflict. It is
amazing how a young woman from rural Ireland managed to settle into
such an alien environment, becoming fluent in the French language after
a very short time. Many of the letters are now in my
possession and I have combed them carefully in an effort to arrive at a
picture of Catherine’s life with the family. She conveyed
some sense of how the war impinged on the local community. She
heard the cannons grumbling, saw the soldiers on their long and weary
marches and shared the anxiety of local parents anxious for their sons
caught up in the fighting. Deprived of correspondence from home she
only managed to post a letter to Ireland after being in the country for
one whole year. She returned to Ireland in 1918 and
always maintained a correspondence with the Rasson/Masurel family as is
evident from the letters.
From Mary Conliffe, maryconliffe@hotmail.com
: dont Eugénie
Masurel 1881, tertiaire de Saint François, épouse de Charles 2 Prouvost
1875, ci dessous, qui habitèrent
le château Masurel, 28, rue de Wailly à Tourcoing, aujourd'hui restauré.
Cette
belle usine art déco datée de 1945 est d'un très
bon architecte qui travaillait assez fréquemment pour les
industriels du Nord, Marcel Forest. (page 248 du guide d'architecture
de la métropole lilloise, éditions le passage, 2011,
notice concernant l'édifice par Richard Klein)
Initiatives de soin des malades de
Madame Charles Prouvost-Masurel pendant la première guerre
mondiale. (documents Alain Prouvost)
Les Masurel furent aussi, de 1908 à 1978, à la tête des usines textiles de Fourmies, classées Monument Historique et aujourd’hui écomusée.
A coté le château de Théophile Legrand puis Masurel puis Prouvost-Masurel construit par Théophile Legrand.
"Bon-papa me dit qu’il est question que vous repreniez une filature à Fourmies, ou ailleurs, que dans ce cas on pourrait peut-être en donner à Charles la direction commerciale, la maison Masurel Frères a-t-elle vraiment l’intention d’étendre ses affaires ? Tu ne m’en dis rien dans tes lettres ! Charles, jusqu’à présent, a pu vivre sur ses placements d’argent qui ont été heureux ; avec la santé de sa femme, qui a nécessité de nombreux déplacements, il ne pouvait songer à autre chose, mais maintenant que cela va tout à fait bien, je suppose qu’il va s’en occuper au retour. "Lettres par Lucie Hermance Masurel 1884-1917, fille de François Masurel 1855-1894 et Eugénie Louise Jonglez 1857-1918 et épouse de Paul Edouard Mathon 1882, transmises par Stéphane Mathon :
Le frère d’Eugénie Prouvost-Masurel était Jacques Henri Masurel-Lepoutre : adjoint au maire de Tourcoing, administrateurs des établissements François Masurel frères, vice-président de la foire commerciale de Lille et vice-président de la foire Internationale textile, président de nombreuses sociétés régionales et locales et fondateur des amis de Tourcoing.
Son petit fils
est Jacques Masurel-Roussel
Diplômé de l’EDHEC 1964 – 1968FMF (textiles) à Tourcoing, directeur technique 1968 – 1978 Sublistatic SA (textile, filiale
de Ciba-Geigy aujourd'hui Novartis) successivement à Roubaix, directeur
commercial, Osaka (Japon), président zone Asie-Pacifique, Genève, directeur zone
Europe 1978 – 1982
Groupe Chaumet, Genève et Tokyo :
directeur marketing et fondé de pouvoir 1982 –1989 BSP Informatique SA,
société de conseil informatique créée à titre personnel à Genève 1990 – 1991 Perray du Cray
(Genève) : associé. 1991 – 2002Interconcept (Paris),
société de Conseil en marketing : gérant.
AUTRES ACTIVITÉS 2002 Vice–président
de l'association des Amis de Teilhard de Chardin. 2007 Délégué général de l’association
SLC –Sauvons le Climat 2009 Président de l’association
SLC –Sauvons le Climat (http://sauvonsleclimat.org/) |
OUVRAGES PUBLIÉS
1994 « La vente
multi-niveaux » - traité de marketing
2002 « Questions
pour un monde en devenir » - traité philosophique
2005 « Teilhard de Chardin,
visionnaire du monde nouveau » avec André Danzin
2006 « Et si on inversait les
pôles ? » avec André Danzin et Jean Loup Feltz – essai sur l’Europe.
2007 « L’affaire
Lipowski » - thriller écologique
2009 « Une Europe nouvelle pour un
monde nouveau » avec André Danzin et Jean Loup Feltz
Le réchauffement climatique : une opportunité pour l’humanité ? Energie et civilisation sont liées : une étroite corrélation existe entre dépenses énergétiques et niveau de civilisation, selon l’acception générale qui est faite de ce terme, et c’est en grande partie grâce à la découverte de nouvelles formes d’énergie que les lois de Malthus ont été contournées. Le « développement », qui est un droit, implique l’accès à une énergie abondante et au meilleur coût. Alors que ce droit reste une virtualité pour une grande partie des humains, il est inquiétant de constater qu’en termes d’énergie nous sommes arrivés à une sorte de rupture d’équilibre avec notre environnement. Bien que le diagnostic ait été souvent fait, il convient d’en rappeler les grandes lignes : l’origine anthropique du réchauffement en cours, le risque de dépasser un seuil au-delà duquel le changement climatique s’auto-accélérera, rendant vains tous les efforts de réduction de l’effet de serre que nous pourrions accomplir. On rappellera le jeu de ceux qui ont intérêt à retarder la prise de conscience de la gravité du phénomène. Le protocole de Kyoto : signé en 1997, il fournit l’exemple de ce que peuvent produire des attitudes incantatoires. Les émissions de gaz à effet de serre mondiales ont augmenté de prés de 28 % depuis 1990, alors qu’il avait été prévu qu’elles seraient réduites de 5,5 % ! L’écart entre les intentions et les réalisations est abyssal. La conférence de Copenhague s’ouvre dans un contexte très différent mais sera-t-elle pour autant couronnée de succès ? On évoquera les points de repères permettant de situer ce que préparent les grands Etats. Face aux défis qu’il va falloir relever, le plus grand risque est de voir la majorité des humains se réfugier dans le confort d’un immobilisme entretenu par tous ceux qui y voient un moyen de protéger des avantages, des privilèges ou des parcelles de pouvoir. Nous sommes maintenant engagés dans la traversée d’un gué très délicat, et il faut nous convaincre qu’il est déjà trop tard pour revenir en arrière. Tout conduit désormais l’humanité à devoir - mais aussi à pouvoir - s’unir pour contrecarrer ce qui est, pour la première fois dans son histoire, un défi commun qui dépasse les frontières politiques et culturelles. Ce défi va la contraindre à trouver une nouvelle manière de concevoir la croissance économique, ce qui implique de considérables mutations éthiques, politiques et sociales, laissant présager qu’elle va devoir atteindre l’âge adulte… Plus que jamais l’immobilisme nous est interdit, et c’est là une chance.
Marie Pauline Jeanne Masurel, née le 29 décembre 1882, Tourcoing,
décédée le 22 juin 1954, Mouvaux (71
ans), mariée le 29 avril 1903, Mouvaux ,
avec André Alfred Mathon, né le 28 septembre 1879, Roubaix,décédé
le 7 août 1954, Mouvaux (74
ans).
Lucie Hermance Masurel, née le 29 juillet 1884, Mouvaux ,
décédée le 27 avril 1917, Arcachon (33,
Gironde) (32 ans), mariée le 13 octobre 1903, Mouvaux ,
avec Paul Edouard Mathon, né le 4 août 1882, Roubaix,,
Jacques Henri Masurel, né le 21 juillet 1888, Tourcoing,
décédé le 24 janvier 1951, Wasquehal
(62 ans), marié le 7 février 1911, Roubaix,avec
Jeanne Clémence Lepoutre.
Jean Alphonse Masurel, né le 1er février 1890, Tourcoing,
tué le 4 mars 1917, Bois des
Caurières (Meuse), inhumé, mort pour la France (27 ans), sous-lieutenant au
299ème Régiment d'Infanterie.
Suzanne Masurel, née le 9 juin 1893, Mouvaux ,
décédée en 1975 (82 ans), mariée le 14 octobre 1913, Tourcoing,
avec Henri Dewavrin, né le 3 février 1891, Tourcoing,
décédé le 8 novembre 1938 (47 ans),
Rosy Masurel, née à Tourcoing , mariée
avec Hubert Jalenques Colinet de Labeau,
décédé avant 1977, mariée avec Henry Thierry-Mieg, né à Cernay
(Haut-Rhin).
Sous branche des François Masurel : les Edmond Masurel :
Quelques
personnalités de cette branche (sans liens généalogiques) et alliances:
Edmond I
Masurel-Baratte,
président du
consortium des filateurs de laine,
dont Edmond
Eugène Masurel époux de Marguerite Prouvost (fille d’Albert Félix Prouvost
1855-1916)
|
Edmond II Eugène
Masurel 1883 &1908
Marguerite Prouvost 1887-1968
|
Edmond III
Masurel,
né le 5 octobre
1913, Tourcoing, décédé le 16 septembre 1956 (42 ans),
industriel
lainier, directeur des "Ets François Masurel" à Tourcoing.
marié le 26 mai
1941, Lille, avec Marie-Claire Descamps, née le 16 janvier 1921, Lille
|
Edmond IV Masurel &
Edith Paugam
|
Paul-Edmond V Masurel
tous deux présidents des Crick-Sicks et de la société de géographie.
Yves Masurel,
fils d’Edmond I
« Administrateur de sociétés. Né le 29 juin 1918 à La
Saussaye (Eure). Fils d’Edmond Masurel, Industriel textile, et de Mme, née
Marguerite Prouvost. Illustration familiale : son oncle, l´industriel et
éditeur Jean Prouvost. Veuf de Mme, née Maddy Dewavrin (3 enf. : France
[Duchesse des Cars], Yves-Alain, Laurence [Mme Michel Cazeaux Cazalet]); et de
Mme, née Anne Paris; Re marié le 18 janvier 1990 à Mlle Françoise Kine. Etudes
: Collège de Tourcoing, Faculté de droit
de Lille. Dipl. : Licencié en droit. Carr. : Président-directeur général des
établissements François Masurel Frères (1958-66), Gérant puis
Administrateur-directeur général des Filatures Prouvost-Masurel, de la Lainière
de Roubaix et de Prouvost Masurel S.A. (1966-78), Président-directeur général
(1969) puis Administrateur (1979-83) de la Banque cotonnière et textile (Bancotex)
devenue la Société de banque et de participation (VIA-Banque), Administrateur
du Crédit du Nord (1951-81) et de Lloyd Continental (1951-99), Membre puis
Président du conseil de surveillance de Valeur Pierre 5 (1990-2002).
Décor. : Croix de guerre 39-45. » Who’s who
|
Lettres par Lucie Hermance Masurel 1884-1917, fille de François Masurel 1855-1894 et Eugénie Louise Jonglez 1857-1918 et épouse de Paul Edouard Mathon 1882,
transmises par Stéphane Mathon : France Masurel, née le 6 mars 1943, Wasquehal ,
mariée le 9 septembre 1965, Bondues ,
avec Arnaud de Bailliencourt dit Courcol, né
à Paris, mariée le 15 juin 2002 avec François de Pérusse, duc des Cars (7e), né à Paris.
Yves-Alain Masurel, marié avec Martine Réquillart.
Et Laurence, Geneviève, Edmond Masurel, Journaliste.
Laurence Masurel, née le 17 décembre 1946 à Wasquehal . Fille
d’Yves Masurel, Industriel, et de Mme, née Maddy Dewavrin. Mar. le 21 février
1980 à Michel Cazeaux-Cazalet, né en 1935, décédé le 13 juin 2008, inhumé le 20
juin 2008, Paris 16ème , cimetière de Passy, ancien directeur général de Siaci
Saint Honoré (2 enf. Guillaume, Charles). Etudes : Institutions Mary Mount à
Neuilly, Notre-Dame-des-Oiseaux à Verneuil-sur-Seine,
Notre-Dame-de-l´Assomption à Paris, Faculté des lettres de Paris. Dipl. : Licenciée
ès lettres. Carr. : Enquêteur (1969-71), Reporter (1971-76), Reporter politique
(1976-88), Chef des informations (depuis 1988), Rédacteur en chef adjoint
(1993), Rédacteur en chef (depuis 2005) de Paris-Match, Vice-présidente
de l'Association de la presse présidentielle (APP) (depuis 2005) . Œuvre
: Nos princes mis à nu (1997). Décor. : Chevalier de l'ordre national du
Mérite.Sport : tennis. Membre du Polo de Paris.
Hubert Masurel, marié en 1943, Tourcoing, avec Julie Tiberghien,
Jean Boyer
Chammard +1753
|
Martial Boyer
Chammard 1740-1810
|
Jean Baptiste
Boyer Chammard 1770-1838
|
Martial Boyer
Chammard 1800-1885
|
Gabriel Boyer
Chammard 1842-1923
|
Georges Boyer
Chammard 1876-1952
|
Michel Boyer
Chammard 1904-1983
|
Michel Boyer
Chammard
|
Michel Boyer
Chammard
|
Mathurin Boyer
Chammard
Marié le 23 mai 1901
avec Camille Lefebvre,
née le 23 mai 1878,
Roubaix ,décédée le 22 novembre 1956,
Anglet (64, Pyrénées-Atlantiques) (à l'âge de 78 ans), dont
2 Les Ernest Masurel 1829-1884,
Tourcoing (54 ans), marié le 20 octobre 1851, Roubaix, avec Rosine Pollet
Annuaire "Les grandes familles de Roubaix", 1912, photo Ferdinand Cortyl
Quelques
personnalités de cette branche (sans liens généalogiques) et alliances:
fut père d'Albert, député du Nord,
Dans un écrin boisé Monsieur Albert Masurel se fait construire une importante demeure en 1890. Entre les deux guerres, le château des Francs disparaît et ses piliers d’entrée sont réinstallés à l’entrée du Parc central, rue de la Latte à Mouvaux près de Lille.et père d'Emile, dont le fils Ernest Masurel
vécu au château de Luchin.
Marguerite Masurel, née le 13 juin 1885, Roubaix,
décédée le 23 janvier 1918, Paris XVI
(32 ans), mariée le 24 avril 1906, Roubaix, avec
Léon Segard,
Marcelle Masurel, née
en 1919, décédée en avril 2010, inhumée le 19 avril 2010, Antibes (91
ans), mariée en 1937, Roubaix,avec René Grimonprez, parents de Corinne,
Madame Albert-Bruno Prouvost.
Marie Louise Masurel, née le 13 mars 1890, Roubaix,
décédée en 1957 (67 ans), mariée le 15 février 1909, Roubaix,
avec Marcel Leclercq, né le 21 juin 1887, Roubaix,décédé
le 6 juin 1964, Roubaix (76
ans), industriel,
créateur des comptoirs d'achat de laine d'Amérique du Sud, d'Australie, Bolivie: " Par ses voyages a travers le monde, il créa de nombreux comptoirs d'achat de laines et vécut des aventures extraordinaires. Car a cette époque - en 1860 - on voyageait a cheval et il parcourt de cette façon la pampa argentine et les déserts d’Australie. II s'y fit, peu a peu, une situation prépondérante et avait étendu son action a la planète entière car il achetait et vendait des laines, non seulement d’Amérique du Sud ou d’Australie mais aussi de Nouvelle Zélande et d’Afrique du Sud a tous les lainiers du monde. Sa maison, Masurel fils, était 1'une des plus grandes firmes du négoce international. C’était un homme très dur en affaires. II ne déplora pas les mines causées par la crise de 1900 chez ses concurrents qui étaient parfois de proches parents. Et lorsque mon père, Albert-Eugene Prouvost, son propre petit-fils, créa une affaire de négoce concurrente sous l'appellation « Prouvost-Lefebvre », il en conçut un tel mécontentement qu' il interdit au rejeton des Prouvost que j' étais, d' aller jouer dans son pare avec mes petits cousins Masurel.
Merci à Ferdinand Cortyl pour ses photographies.
Cimetière de Mouvaux
Construit en 1874 par les Descamps, elle construit un véritable château de pierre
de taille en plein Lille : 1 400 m2, tout de plafonds vertigineux, de
moulures ouvragées et de parquets nobles. Succédèrent les Crépy Saint-Léger
pûis ce sera la Banque de France au lendemain de la Grande Guerre.
« En 1922, remanié par l’architecte Alphonse Defrasse et adapté au
confort de l’époque (force baignoires sont notamment ajoutées), il logera deux
hommes clés (littéralement) de la Banque de France : le directeur, bien sûr,
mais aussi le caissier, logé comme le concierge dans l’aile droite. La
succursale lilloise ayant longtemps, prospérité industrielle oblige, compté
parmi les plus puissantes de France, les pénates des cadres se devaient
d’arborer un lustre idoine. »
Son voisin est aussi son jumeau : l’hôtel d’Hespel, construit
en 1896 par E. Meurillon pour le comte d'Hespel, qui ruiné, ne put l'habiter
(75 rue royale) ; tous les deux à la Banque
de France.
« Jules Masurel avait un fils, Jules et trois filles dont Marguerite qui était ma grand’mère ».
Son fils, Jules Masurel n° 2,
ne parvint pas a maintenir florissante 1'affaire familiale. Avec leur associe,
ses enfants jugèrent le négoce de laine peu rentable et choisirent des voies
diverses. La guerre a éprouvé mes « oncles » Masurel. Le fils ainé de
Jules (n°2), mon grand ami Jean (1910-1991) blessé au moment de la Libération
de Paris, perdit une jambe. Le second Antoine (1912-1990) résistant de la
première heure, compagnon de la Libération fut déporté et, par chance, en
revint. Le troisième, Gérard,(1918-1995) laissa un pied dans la ligne Maginot.
Quant a Monique, elle perdit son mari, faute de soins, pendant la guerre et le mari de Nicole, Teddy Rasson, fut tué au combat en 1945.
Teddy
Rasson (1905-1944) « est un industriel, et officier et
résistant français, né à Roubaix le 16
janvier 1905 et mort le 24 novembre 1944 près de Saverne en
Alsace.
Teddy (Édouard) Rasson
naît le 16 janvier 1905 à Roubaix, dans le Nord. De 1920
à 1922, il fait ses études (filière
mathéma-tiques) au Collège de Normandie en
Seine-Maritime. Il entre ensuite à la Lainière Vanoutryve
à Roubaix-Tourcoing. De mai à novembre 1926, il accomplit
sa formation d'officier de réserve à l'école
d'application de Saumur. En 1929, il épouse Nicole Masurel. Il
participe au développement du polo en France et pratique ce
sport à un haut niveau (tournois en France et en Angleterre
notamment, en équipes privées et en équipe de
France).
En septembre 1939, il est
mobilisé à Sedan au 31e Dragons comme officier de
renseignements et après la capitulation, est
démobilisé en juillet 1940. Il entre alors au service de
la Résistance. Il fera partie entre autres des réseaux
P2/Étoile et Phratrie.
Recherché personnellement
par l'ennemi, il gagne l'Angleterre le 5 avril 1944. Il y rencontre le
Général Leclerc et rejoint la 2e Division blindée,
nommé à l'état-major de Leclerc, rattaché
au Bureau central de renseignements et d'action et au Service de la
sécurité militaire.
Avec la Division Leclerc, il
participera à la campagne de Normandie, à la bataille de
Paris, à la campagne des Vosges et à la campagne d'Alsace.
Il est tué à
l'ennemi le 24 novembre 1944 près de Saverne. En 1947 en ces
lieux, une stèle de grès fut érigée en sa
mémoire, sur la D 421 à la sortie de Saverne vers
Dettwiller. Le monument a été restauré et
réaménagé en 2012 à l'initiative de
l'asso-ciation du Souvenir français.
Distinctions
Citation à l'Ordre du Régiment
Citation à l'Ordre de l'Armée
Chevalier dans l'Ordre National de la Légion d'Honneur
Croix de Guerre avec Palme
Médaille de la Résistance Française
Références
B. Linder,
« Capitaine Teddy Rasson dit Robert Trévoux (1905-1944)
», Pays d'Alsace, no 239, mai 2012.
Archives du Service historique de la Défense, Paris. » Wikipedia
Jean reçut de René
Dutilleul, son oncle, dont je parlerai plus loin, de nombreuses toiles achetées
au début du siècle : Braque, Leger, Modigliani, Picasso, De Staël, auxquelles
il ajouta lui-même Miro, Klee, et tant d’autres. II fit don de ces oeuvres
prestigieuses au musée de Villeneuve d’Ascq, construit spécialement pour les
accueillir. " Albert Prouvost Toujours plus loin
fut père
de Louise Lucie Julie Marie Masurel née le 16 septembre 1868 à Roubaix. décédée
le 28 avril 1954 à La Madeleine ;épousa Paul Laurent Joseph Prouvost fils de Paul
Alexandre PROUVOST et Laurence Louise Ghesquière, le 22
mai 1888 à Mouvaux St Germain. Paul est né le 7 avril 1866 à Roubaix. Il est
décédé le 26 décembre 1932 à Mouvaux.
de Paul Masurel, né le 26 octobre
1874, Roubaix, 59, décédé le 3 avril 1952, Antibes, 06 (77 ans), négociant en
laine, collectionneur de tableaux, marié
le 16 avril 1907, Paris, 8e, avec Marie-Thérèse Collart Dutilleul, née en 1884,
décédée en 1969
dont Jean Masurel-Roche de la Rigaudière,
célèbre collectionneur, commandeur des Arts et des Lettres,
Né à Roubaix en 1908, Jean Masurel est le fils de négociants en
laine.
Il monte à Paris en 1923 pour préparer son baccalauréat, et loge
chez son oncle, Roger Dutilleul :
Roger Dutilleul; sera peint par Modigliani
qui transmet à son neveu son amour de l'art. Leur commune
sensibilité permet aux deux hommes de s'adonner au soutien aux artistes
d'avant-garde et à la collection de tableaux. Roger Dutilleul est alors un des
rares collectionneurs français de ces peintres d'avant-garde, défricheurs de
courants que l'on nommera ensuite fauvisme, cubisme, école de Farts... les
Derain, Rouault, Van Dongen, Braque, Picasso, Modigliani... excusez du peu !
A l'époque de leur production artistique, ces artistes ne jouissent
d'aucune reconnaissance de la part de l'establishment. Ils écoulent leurs
œuvres auprès de quelques marchands qui les encouragent et les font connaître
aux mécènes ainsi qu'au public.
Très vite, Jean Masurel acquiert un jugement très sûr au diapason
de celui de son maître et oncle parisien. Il achète à la veille de la guerre le
célèbrissime "Homme nu assis" de Picasso, il cueille des
gouaches de Klee et de Kandinsky dans les cartons, comme on le fait aujourd'hui
pour les lithographies... Il apporte un soutien particulier à des artistes du
Nord, Eugène Dodeigne, Eugène Leroy ou Arthur Van Hecke.
Jean Masurel et sa femme Geneviève complètent et enrichissent la collection de Dutilleul dont ils deviennent légataires en 1956. Cette collection, ensemble d'œuvres représentatives de tous les courants de la peinture française contemporaine, va ensuite trouver son musée dans notre département, comme Jean Masurel en a exprimé le souhait dès 1974. Il déclare à cette occasion qu'il désire céder sa collection - plus de 200 peintures, dessins, gravures et sculptures - à une collectivité territoriale du Nord de la France, à charge pour elle de bâtir le bâtiment qui les présentera au public. Jean Masurel déclare que le futur musée devra abriter la donation, organiser des expositions temporaires, poursuivre les achats d'œuvres contemporaines. Il souhaite également que le musée soit édifié dans un environnement paysager et qu'il s'ouvre très largement à la jeunesse. C'est la Communauté Urbaine de Lille qui répond à l'offre des Masurel, en 1976. Le Musée d'Art Moderne de Villeneuve d'Ascq voit le jour en 1983. Lors de son inauguration, Jack Lang, alors ministre de la culture, remet à Jean Masurel la cravate de Commandeur des Arts et des Lettres, un titre qui récompense une vie au service de l'art et du public, dont le musée de Villeneuve-d'Ascq est le plus beau témoin. Jean Masurel s'éteint huit ans plus tard. Son nom restera attaché au musée de Villeneuve d'Ascq, la plus belle œuvre d'un homme de l'art... et homme du Nord.
« Luc Ferry, dans la "Révolution de l'Amour ", explique le cycle "Déconstruction/Reconstruction" des Arts, fin XIX, où les anarchistes finalement, après la dèconstruction, recrée un nouvel art que la Bourgeoisie au XX éme achète et fait connaitre. Les ennemis d'hier se retrouvent dans l'art.C'est une belle histoire finalement. » François Olivier-Six
Quelques
notes sur cet ouvrage par François Olivier-Six : Le bohème, le bourgeois
et l’amour
*Déconstruction (nécessaire) des traditions vers 1850: Valeurs/Autorité/Musique/Art
moderne/Cubisme/Danse (Béjart)/
Morales conventionnelles, religieuses, bourgeoises. Invention de la vie de
bohème (1850): Déconstruction des valeurs et autorités traditionnelles: Création
à Paris de mouvements: 2 sortes - Bohèmes riches et snobs, - Bohèmes de
mansarde (pauvre).
Esprit de révolte, Haine du Bourgeois. Les J’men foutistes : (de la réussite, de l’argent, rejet des
bourgeois)
* les Fumistes : Fumeur d’opium (forme de contestation). Les Incohérents en
1880 : Création d’objet surréaliste (la balançoire de mur pour calmer les
enfants). Refus du Modèle Social. Début
du 20éme – Montmartre - Le bateau Lavoir
– Premier atelier d’artistes -où Picasso invente l’art moderne. 1920 : Dadaïsme
1930 : Surréalisme 1950 : Situationnisme
1968 : Avant Gardisme Bohème. INVIVIDUALISME REVOLUTIONNAIRE ; Révolte ;
Ordre bourgeois, tradition, héritage, patrimoine. Tout se passe à Paris Mais le
Penseur est NIETZSCHE: ’’La Philosophie du Marteau’’- Casser les Idoles de la
tradition et de la religion - Création du NIHILISME. Alain Renaut dans son
livre La pensée 1968 mentionne:
‘’ Lancement de la Consommation’’ ’IL FALLAIT DECONSTRUIRE LES VALEURS/
AUTORITES, POUR CRÉER LE CAPITALISME DE LA CONSOMMATION ; Les
Frères ennemis se réconcilient ; Les Bourgeois achètent l’Art Moderne,
Georges Pompidou –banquier- François Pinault etc.…La grande Bourgeoisie et
non les bourgeois philistins
(Définition: Bourgeois, grossier et vulgaire, n'aimant ni les arts ni les
lettres.). PICASSO , Communiste Stalinien, est intronisé par Pompidou….1968 –
REVOLUTION PRINCIPALEMENT SOCIETALE : * Condition Féminine
* Homosexualité ; HEDONISME : Jouir sans entraves / Interdit d’interdire ;
CONSOMMATION;
Marie-Laure Masurel, née
en 1954, mariée avec Mariano, marchese Cittadini Cesi, duca di Acquasparta, né
le 6 août 1949, Madrid
Et Antoine
Masurel
Commandeur de la
Légion d'Honneur
Compagnon de la Libération - décret du
19 octobre 1945
Croix de Guerre 39/45 (2 citations)
Médaille de la Résistance
Membre de l'Empire Britannique (GB)
Officier de l'Ordre de la Couronne (Belgique)
Croix de Guerre avec palme (Belgique).
Il épousa Anne-Marie Gallant.
« Né le 10 juillet
1912 - Roubaix (59, Nord); Décédé le 7 avril 1990 - Montfort-l'Amaury (78,
Yvelines) Commandeur de la Légion d'Honneur, Compagnon de la Libération -
décret du 19 octobre 1945, Croix de Gu
erre 39/45 (2
citations), Médaille de la Résistance, Membre de l'Empire Britannique (GB),
Officier de l'Ordre de la Couronne (Belgique), Croix de Guerre avec palme
(Belgique).
Antoine Masurel est né
le 10 juillet 1912 à Roubaix.
Bachelier, il fait son
service militaire en 1932 au 1er Régiment d’aviation au Bourget.
Il exerce lui-même en
famille la profession de négociant en laines et voyage beaucoup dans
l’hémisphère sud jusqu’en 1939. Mobilisé comme sergent de réserve dans l'Armée
de l'Air le 31 juillet 1939 à Paris, il est affecté à Beyrouth aux Forces
aériennes françaises en Orient-Méditerranée en décembre 1939.
Démobilisé sur place fin
juillet 1940, il rejoint la France en septembre 1940.
Favorable depuis le
début à l'action du général de Gaulle, il s'installe à Cannes.
Il entre en contact avec
Rewez alias Jacques Robert, fin 1942, au moment où ce dernier, revenu de
Londres, développe le réseau "Phratrie".
Antoine Masurel s'engage
dans les Forces françaises combattantes le 1er novembre 1942, sous le nom de
Jules Mouton. Comme deuxième adjoint du chef de réseau il prend, à ce titre,
une part des plus actives à la création de l’organisation qui devient en
quelques mois le plus important réseau de renseignements de France. Il apporte
également une contribution financière personnelle importante et attire de
nombreux agents dans l’organisation.
Au moment de
l'arrestation de Rewez à Nice en avril 1943, il participe activement à son
évasion, qui réussit à la troisième tentative, quatre jours plus tard.
Antoine Masurel, alias
Marc, devient, après le départ pour Londres de Rewez en juin 1943, le 1er
adjoint de Jean-Louis Chancel, alias Chavagnac, nouveau chef de
"Phratrie" ; il se dépense sans compter pour développer et
perfectionner le réseau qui comprend plusieurs sous-réseaux. En août 1943, il
fait un stage à Londres où il parvient par une opération aérienne en Lysander
et est de retour à Lyon début septembre 1943.
En février 1944, après
le départ pour Londres de Chavagnac, il prend la direction de "Phratrie"
qui est en contact constant avec le Bureau central de renseignements et
d’action (BCRA).
En avril, la centrale de
Phratrie et Antoine Masurel quittent Lyon pour Paris où se regroupe la majorité
des organes de commandement de la Résistance. L'importance du réseau est à ce
moment devenue telle que son éclatement devient indispensable (au sommet de son
activité, en juin 1944, ce réseau enverra pas moins de 330 messages quotidiens
en Grande-Bretagne). Il dirige cette réorganisation et cette division de "Phratrie"
en huit réseaux indépendants qui couvrent dès lors la presque totalité de la
France.
Arrêté avec plusieurs
camarades le 19 mai 1944 à Renescure dans le Nord au cours d'une mission de
communication avec Londres, il est emprisonné successivement à Gand, puis à
Fresnes en juillet et enfin à Bruxelles à la mi-août 1944. Maintes fois
interrogé et brutalisé il se défend avec sang-froid et habileté, ne livrant
rien à l'ennemi qui puisse compromettre la sécurité du réseau.
Antoine Masurel condamné
à mort est finalement envoyé en déportation à Buchenwald dans un des derniers
trains à quitter Bruxelles pour l'Allemagne. En raison de l'approche des Alliés
qui bloquent le train à Bruxelles, il est libéré in extremis, le 3 septembre
1944, avec plusieurs centaines d'autres déportés.
Rapatrié, Antoine
Masurel remplit alors plusieurs missions pour les services secret de la DGER
jusqu'en 1945.
Démobilisé, il retrouve
sa famille et son métier de négociant en laines, puis part pour l'Argentine où
il réside environ quinze ans.Antoine Masurel est décédé le 7 avril 1990 à
Montfort l'Amaury dans les Yvelines. » http://www.ordredelaliberation.fr
Son fils est
Son frère est Olivier Masurel, ingénieur
ISEN, marié en 1969, Le
Touquet-Paris-Plage, avec Pascaline Dewavrin, née à Wasquehal.
Angélique Masurel,
née à Croix, mariée en 1994, Paris (75) - 5ème
arrondissement, avec Pierre-Edouard de Leusse,
|
B Branche cadetteJean-Baptiste Joseph Masurel (1772-1850)
Quelques
personnalités de cette branche (sans liens généalogiques) et alliances:
fut père de Charles dit Carlos, et de Félix.
Carlos Masurel (1807. 1863) fut le premier maire élu au suffrage
universel ; il fut maire de Tourcoing ; il reçut l’Empereur Napoléon III qui
vient en visite à Tourcoing, et père de
Charles (1834.1890), dont
Les Carlos Masurel :
Carlos (Charles) I Masurel 1807-1863
&1828
Charlotte
Dervaux 1808-1887
|
Charles II Masurel 1834-1890 &
Cécile Scrépel
1835-1883
|
Carlos III
Masurel 1862 &1887
Adèle Leclercq
1865
|
Carlos IV
Masurel 1892-1970 &1921
Gabrielle Nollet
1900
|
Carlos V Masurel
&1949
Marie Motte
|
Carlos VI Masurel
Annuaire "Les grandes familles de Roubaix", 1912, photo Ferdinand Cortyl
Les Georges Masurel
Quelques
personnalités de cette branche (sans liens généalogiques) et alliances:
Georges-Charles Masurel epoux d’Elise Leclercq
Photo médiathèque de Roubaix.
L’industriel Georges Charles
Masurel-Leclercq fait construire un hôtel particulier dans les années 1890,
alors que le boulevard de Paris connaît relativement peu de constructions, sur
un terrain allant de la rue Vauban au boulevard de Cambrai. L’hôtel a sans
doute connu les bâtiments de la ferme Lepers qui se trouvait jusque vers 1893
de l’autre côté du boulevard. Ceux-ci seront expropriés et démolis peu après.
Georges Charles Masurel-Leclercq,
né à Tourcoing en 1858, est marié avec Élise Adèle Leclercq. Il a repris
l’usine Cordonnier, rue de Mouvaux à Roubaix. Il va habiter la propriété avec
ses cinq enfants, ce qui va contribuer à remplir ce grand bâtiment.
La famille habite la propriété jusqu’avant
la dernière guerre : Le Ravet-Anceau de 1939 n’indique plus d’habitants au
114. Les allemands l’occupent et y entreposent des munitions. Il est incendié
en Août 44 au départ des occupants et complètement détruit, sauf est épargné
Les communs et la conciergerie qui existent encore aujourd’hui. L’endroit reste
en friches plusieurs années. On y construit en 1951 un immeuble sur les plans
de l’architecte Porte, habitant avenue Jean Lebas. C’est un ensemble de
standing, construit en briques, qui forme un quart de cercle face au parc
Barbieux.
dont Elise
1880,Georges 1882-1961, André 1883-1915, René Louis 1884-1970, Jacques 1886-1914, Agnès 1888, Raymond
1890, Pierre 1891-1916, Maurice 1899-1979
dont Georges Masurel 1882-1961 &1905 Germaine Rosine Masurel 1885
dont Georges Masurel & Godeliève Ruffelet +2007
dont Georges Masurel
Article par
Andreï Nizamoutdinov, RIA Novosti. Deux anciens de la légendaire escadrille
Normandie-Niémen, Georges Masurel et Georges Mounier, se sont vu décerner des
médailles russes à l'occasion du 60e anniversaire de la victoire dans la Grande
Guerre patriotique (1941-1945). Andreï Nizamoutdinov, RIA Novosti. Deux anciens
de la légendaire escadrille Normandie-Niémen,
Georges Masurel et Georges Mounier, se sont vu décerner des médailles russes à
l'occasion du 60e anniversaire de la victoire dans la Grande Guerre patriotique
(1941-1945). En remettant les décorations, l'ambassadeur de Russie en France,
Alexandre Avdeïev, a souligné que les pilotes de Normandie-Niémen avaient écrit
l'une des pages glorieuses de l'histoire de la victoire commune sur le fascisme
et fourni un bel exemple de la fraternité d'armes russo-française. Pour leur
part, les anciens combattants ont déclaré qu'ils conserveraient jusqu'à la fin
de leurs jours les souvenirs les plus chaleureux de tous ceux avec lesquels ils
avaient combattu, plus de 60 ans plus tôt, contre l'ennemi commun. Masurel et
Mounier ont commencé leur parcours au Proche-Orient et en Afrique du Nord, puis
sont arrivés en URSS à la fin de 1942 au sein d'un premier groupe de
volontaires français. "C'était une époque dure et affamée. Après deux
années passées en Afrique, on avait peur de nous retrouver dans une Russie
froide et enneigée. Mais l'accueil chaleureux qui nous a été réservé a dissipé
toutes les craintes. Dès les premiers jours, nous avons senti appartenir à une
nouvelle famille unie", a raconté Georges Masurel. Georges Mounier lui a
fait chorus en qualifiant l'accueil réservé aux volontaires français d'
"absolument fantastique". Masurel et Mounier étaient mécaniciens lors
de la première campagne de l'escadrille qui a duré la plus grande partie de
1943, puis ils ont été rappelés. "Nous voulions rester au sein de l'escadrille,
j'ai demandé même qu'on me permette de passer l'examen de pilotage, car j'avais
de l'expérience de vol, mais l'attaché militaire français de l'époque était
catégorique", a-t-il expliqué. On ne contredit pas les ordres, et les amis
sont rentrés au Proche-Orient où ils se sont battus au sein des troupes
françaises de l'étranger, puis ont participé à la libération de la France, et
Masurel était déjà pilote. Le sculpteur russe Vladimir Sourovtsev qui a assisté
à la cérémonie a exposé aux anciens combattants son projet de monument aux
combattants de l'escadrille Normandie-Niémen qui représenterait deux pilotes,
un Français et un Russe, rentrant après une mission. L'idée a semblé plaire aux
combattants français qui ont demandé au sculpteur que le pilote russe ressemble
à leur chef, le général Zakharov.
et Carlos
Fils de René Masurel, Olivier Masurel, vice Champion du Monde de voltige aérienne et coach de l'Equipe "Advanced" confie sa communication à Igor Biétry en vue de promouvoir sa participation aux Championnats du Monde "Unlimited" 2013 qui se dérouleront au Texas en octobre prochain. Olivier, garçon discret et dont le talent est tout bonnement phénoménal, a non seulement un talent de voltigeur hors pair mais également celui de metteur au point. Sans doute aidé par sa formation d'ingénieur, il sait préparer, avec la complicité de Régis Alajouanine, le Cap 332 qui lui permet de figurer au plus haut de la hiérarchie mondiale. Igor a créé un site internet et se chargera des relations avec la presse comme il le fait également pour Mélanie Astles depuis fin 2011
« L’allure
élancée, les cheveux en pétard, le regard émerveillé, Olivier Masurel donne
l’impression d’être né pour toucher le ciel. Destin accompli, puisque le jeune
homme n’a que 26 ans, et vient d’être sacré champion du monde de voltige aérienne
par équipe le mois dernier, à Grenade, en Espagne. La France n’avait pas
remporté un tel titre depuis sept ans. Il a de quoi être fier, surtout que les
adversaires étaient redoutables, et que c’était la première fois que le jeune
Palois se présentait à un tel championnat. Entre les Russes, très expérimentés,
et les Espagnols, tenaces, le combat était de taille. « La voltige aérienne
s’appuie sur le système de notation du patinage artistique.
Les juges notent
aussi bien les compétences techniques (précision, synchronisation, difficulté)
que celles artistiques (originalité, rythme, harmonie) », explique Olivier
Masurel en vrai pédagogue. C’est dans le libre intégral qu’un pilote montre
toute sa palette. Il a quatre minutes pour enchaîner des figures difficiles aux
noms poétiques : vrilles, ruade ou double éventail. Aux commandes, pas question
d’être dans les nuages, il doit garder les pieds sur terre. « Le vol demande de
gérer le stress, le vent et les effets d’optique dus à la vitesse », déclare le
jeune homme qui excelle dans cette discipline. A Grenade, il est arrivé
deuxième, juste derrière son coéquipier Renaud Ecalle. Ses enchaînements dans
son bel avion rouge (modèle Cap 232) ont séduit les juges. Il faut dire que le
jeune homme a été formé au Pau Pyrénées Air Club (PPAC), tout comme les anciens
champions du monde, Eddy Dussau et Sylvie Breton. Ces deux anciens enseignent
toujours là-bas. Le PPAC serait-il un laboratoire à champions ? En tout cas,
Olivier Masurel a reçu le soutien de la Ville de Pau, de la Fédération
Nationale Aéronautique, des Conseils Général et Régional et de l’entreprise Locavions
Aéroservices qui prête les engins. Ses soutiens sont essentiels, lorsqu’on sait
qu’une heure de vol coûte 380 euros. A peine sorti du championnat du monde, le
jeune pilote et son équipe se préparent pour les Jeux Mondiaux de l’Air de
Turin en 2009. Cette compétition regroupe toutes les disciplines aériennes du
parapente à la voltige aérienne. Pour l’occasion, les pilotes suivent des
stages de cinq jours au sein d’aéroclubs à Marmandfe, Jonzac ou Tarbes,
financés en grande partie par la Fédération Nationale Aéronautique.
L’aviation,
une
passion depuis toujours Olivier Masurel aurait-il été
envoûté par la magie de
l’écriture de Saint-Exupéry ? « Pas vraiment
», répond-il. Bien sûr, comme tous
les enfants, il a dévoré « le Petit Prince »,
mais le petit Olivier était
surtout « un passionné d’aéromodélisme
». « J’aimais faire voler et piloter à
l’aide d’une télécommande mes maquettes
», raconte l’enfant devenu grand.
Aujourd’hui, il a concrétisé son rêve : il
est devenu un vrai pilote, sans
rejoindre l’armée. La guerre, c’est pas son rayon.
Il laisse ça à Maverick, le
héros du film « Top Gun » incarné par Tom
Cruise. Même les numéros de la
Patrouille de France du 14 juillet le laissent de marbre. Olivier
Masurel n’a
rien d’un guerrier : il ressemble plus à Porco Rosso, le
personnage imaginé par
Hayao Miyazaki, la tête de cochon et le ventre en moins. En plus
de piloter
comme lui un aéroplane rouge, il aime se sentir libre, tel un
oiseau qui plane
haut dans le ciel. » par Thomas
Arles
Les Félix Masurel
fut père de
Félix Henri Masurel (1845--1916) dont postérité.
(Nord B 1341,
1467, 1559; 16 G 369; 33 H 41, 55, 69; 204 H 12; Demay; Paroissiaux de
Tourcoing)
Hervé Masurel a été nommé en octobre
2010 délégué interministériel à la
ville, en remplacement d’Yves-Laurent Sapoval. Il était jusqu’alors secrétaire
général du Comité interministériel de prévention de la délinquance.
Né en décembre 1954, diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et
de l’Éna, Hervé Masurel a débuté sa carrière en 1980 en tant que directeur de
cabinet du préfet du Tarn-et-Garonne, et a été ensuite nommé à divers postes de
sous-préfet ou sous-directeur : sous-préfet de Figeac, secrétaire général de la préfecture du territoire
de Belfort, sous-préfet de Soissons, sous-directeur des personnels à la
Direction des personnels, de la formation et de l’action sociale (DPFA)
à la Direction générale de
l’administration (DGA) du ministère de
l’Intérieur. Secrétaire général de la
préfecture du Val-d’Oise de 1992 à 1996, il a
été ensuite nommé sous-directeur
des étrangers et de la circulation transfrontalière
à la Direction des libertés
publiques et des affaires juridiques (DLPAJ) du ministère de
l’Intérieur de
janvier 1996 à juillet 1999. Puis il a été
coordinateur du service de la
justice et des affaires intérieures à la
Représentation permanente de la France
auprès de l’Union européenne, de 1999 à
2003. Préfet de la Haute-Saône de 2003
à 2006, il a été désigné
préfet délégué pour
l’égalité des chances auprès du
préfet de la Seine-Saint-Denis de janvier 2006 à
août 2007.
André Masurel, né le 14 août 1883, Roubaix,décédé le 25 septembre 1915,
Beauséjour (51, Marne) (32 ans), sergent au 156ème RI. marié le 7 mai 1908,
Roubaix,avec Aline Roussel
Pierre Masurel, né le 10 novembre 1891, Roubaix,décédé le 20 octobre 1916,
Vadelaincourt (55, Meuse) (24 ans), lieutenant au 401ème RI.
Hôtel Masurel: 85 rue Nationale
Type : Inventaire général du patrimoine culturel, 1913: maître d'oeuvre
inconnu
Hôtel Rasson-Masurel
Histoire : L'hôtel Rasson-Masurel, qui n'apparaît pas au cadastre de 1885,
a été construit à l'extrême fin du 19e siècle (analyse stylistique).Adresse :
100 rue Carnot ; Inventaire général du patrimoine culturel: 4e quart 19e
siècle
Auteur(s) : maître d'oeuvre inconnu
Hôtel Wattine-Masurel
Histoire : Cet hôtel, qui n'apparaît pas au cadastre de 1885, a été
construit vers 1890-1895 (il est stylistiquement proche des maisons construites
place du Théâtre datées de 1893). Il a été construit après regroupement de deux
parcelles (cadastre 1885 C 1082,1083) dont les maisons sur rue ont été démolies
à cet effet. Il était le logement patronal de la filature Wattine-Masurel, qui
était située à l'arrière de la parcelle (cadastre de 1885) et a été démolie
depuis lors.
Adresse : 31-33 rue de Gand :inventaire général du patrimoine
culturel ;4e quart 19e siècle: maître d'oeuvre inconnu
Légions d’honneur :
Masurel Albert Julien Charles, Né le
09/04/1863 à Lille
Masurel Edmond Jules Joseph, né le
30/03/1857 à Tourcoing
Masurel Francois Joseph, né le
09/10/1826 à Tourcoing
Masurel Paul Victor Joseph, né le 16/02/1835 à Tourcoing.
Lille : Notre-Dame de Consolation.
1850. — Cloche provenant de l'église Notre-Dame de Tourcoing.Anno Domini MDGGCL, ecclesias Beatse Marise Angelorum Turcundii, dederunt me plures
parochian, neenon generosiores quidam Juvenes, quorum nomina sequuntur : Franciscus Desbonets, Paulus Watine, Henricus Masurel, Fidelis et Augustinus
Vansslande, Franciscus Masurel, Ludovicus et imllius Leroux, Achilles Desurmomt, Ludovicus Amandus Flipo, et quatuor fratres Ëdmundus, Leo, Henricus et
Ëmilius Lorthiois. Fuerunt milii patrini Leo Lorthiois et Elisa Masurel, ambo decem annos nati, a quibus vocata sum Maria Leonia Elisa. 1. La seconde cloche
ne porte pas d'inscription.
Jusqu'à la 8e génération. Base Roglo
Lambert Masurel, né vers 1570,
Tourcoing (Nord), décédé, Tourcoing (Nord).
Marié en 1594, Tourcoing (Nord), avec Marie Marlier,
née vers 1575, décédée après 1631, dont